Vingt ans Ferme
Nous publions ici trois articles extraits du numéro spécial de Bendré http://www.journalbendre.net/ paru le 15 octobre 2007 à l’occasion de la commémoration du 20ème anniversaire de la mort de
La Formation militante d’un combattant
Par Pabeba SAWADOGO
Pour la première fois en Haute Volta, au sein même de la direction politique de l’État, un ministre ose démissionner. Nous sommes le 21 avril 1982. Le capitaine
C’est cette démission qui révélera à la jeunesse et au peuple voltaïque, l’homme politique Sankara ou plus précisément le militant progressiste. Mais avant d’en arriver là, un retour sur le parcours politique de cet officier iconoclaste.
Le Président
Conscient très tôt qu’il était un devoir patriotique de faire œuvre utile pour son pays, en combattant pour libérer ses frères et sœurs de la misère écrasante, de la dépendance politique et économique, Thomas par une auto formation rigoureuse et scientifique va se préparer à l’avènement de la révolution.
Nous vous donnons ici un bref aperçu de ce parcours militant avant son ascension à la gestion du pouvoir d’État. Séjour à Madagascar
Après son bac au prytanée Militaire du Kadiogo, Thomas est envoyé à Madagascar, plus précisément à l’Académie Militaire d’Antsirabé pour y subir une formation d’officier. Laissons parler Bruno Jaffré dans “Biographie de
Ce travail de communicateur sera apprécié positivement par la hiérarchie de l’Académie qui le signifiera en ces termes : “Félicitations pour son comportement remarquable et son travail personnel, les résultats obtenus au cours du cycle de formation et l’influence heureuse qu’il a eue comme rédacteur en chef du journal de l’Académie”.
Sciences humaines
Bruno Jaffré dans la biographie précitée nous apprend que Thomas “… se passionne pour les sciences humaines, économie politique la première année, sociologie la deuxième et sciences politiques la troisième. Son professeur de sociologie, M. Théophile Andrianoelisoa, qui deviendra plus tard Conseiller Suprême de la Révolution exerce une certaine influence sur lui. Il s’agit surtout de sociologie pratique, alors, on étudie par exemple les stratégies de pénétration des paysans”.
Thomas tout en se formant contribuera à la formation de certains de ses cadets qui débarqueront aussi à Antsirabé pour conquérir des gallons. L’ancien Président nigérien Ibrahim Baré Maïnassara dira de lui : “Il faisait notre formation idéologique. Nous avons beaucoup appris grâce à lui… En tant qu’aîné, disait-il, il était de son devoir de nous ouvrir les yeux sur les réalités du monde. Ce qui m’a le plus frappé, c’est sa très grande disponibilité à se mettre au service des autres. Et puis sa franchise, disons sa sincérité. Et enfin sa manière d’expliquer les choses avec simplicité et pragmatisme. Aujourd’hui, on dirait qu’il avait tout simplement le don de communiquer. Nous passions des heures à l’écouter sans nous lasser”. (Mon ambition pour le Niger. Entretien avec Senen Andriamirado, J.A n° 1894-1895).
Le retour au pays
Rentré au bercail,
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Sankara aimait-il son peuple ?
PAR O.A. DJAMILA
Lorsqu’un homme politique aime le peuple qu’il sert, cela signifie que ses préoccupations de tous les instants sont tournées vers la satisfaction des besoins essentiels de son pays. En ce moment on ne mène pas une politique du ventre pour soi mais une politique de justice sociale vis-à-vis des populations. Autrement dit, un homme politique doit être jugé sur la base de ses résultats et apprécié du point de vue des intérêts du peuple.
La Révolution d’Août 1983 s’est imposée après un état des lieux sur le plan politico-économique, socio-culturel du pays frisant le désastre. Vingt trois années “d’indépendance” pour la forme, vingt trois années de dépendance dans le fond ne pouvaient que mener un patriote de la trempe de
“Je suis un paquet de projets, de conviction, de foi en un avenir qui parfois requiert plus que de l’audace” Pour sortir de ce gouffre,
Armes quantifiables
Ces armes sont d’une part quantifiables et peuvent être recensées dans un bilan chiffrable :
c’est sous
Assurément
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Les 1505 erreurs de la Révolution d’août
Par Charles OUEDRAOGO
Justice considérée avant tout comme un combat contre l’exploitation capitaliste et impérialiste. Mais les révolutionnaires burkinabé ont, sur bien de points confondu la justice et l’égalité, avec l’égalitarisme. Aussi ils ne se sont pas rendus compte que les progrès de la justice sont indissociables du développement du pluralisme social. Ce penchant égalitariste s’est accompagné d’une ignorance -une négation diront certains- de l’individu au profit du collectif.
Ce faisant, les révolutionnaires ont réduit le processus de transformation sociale en un “communautarisme” en oubliant que le libre développement de chacun est condition du libre développement de tous. Beaucoup de chose ont été dites sur la révolution, il appartient à chacun aujourd’hui, avec le recul, sans passion ni éclectisme, de se pencher sur cette période déterminante de notre histoire. Nous espérons ouvrir par l’article ci-dessous un débat contradictoire et constructif.
Lorsqu’en 1987, le Front populaire prenait le pouvoir au Burkina Faso, son objectif était “d’approfondir la révolution du 4 Août” en la rectifiant. Cette rectification consistait à corriger les erreurs de la révolution (4 Août 1983 au 15 Octobre 1987). Notre propos n’est pas ici de juger de l’opportunité ou non de la rectification encore moins de savoir si les rectificateurs ont réussi. Il s’agit plutôt avec le recul du temps d’introduire le débat sur les erreurs et insuffisances de la période révolutionnaire.
Il y a ceux qui pensent qu’il n’y en a pas eu ou qu’il faut éviter d’en parler. Un point de vue développé par d’anciens acteurs et responsables du défunt CNR. Une seconde catégorie de citoyens (les “réactionnaires” d’alors) jurent que la révolution en elle-même était une erreur. Tout durant cette période était franchement mauvais. Enfin la troisième catégorie (d’anciens acteurs et de non acteurs) reconnaît que la révolution a apporté de bonnes choses mais aussi de mauvaises. Il serait alors “malhonnête” de parler des acquis à longueur de journée et éviter de parler des insuffisances. Retenons seulement que les partisans du 15 octobre ont misé sur les manquements de la révolution pour prendre et fixer leur pouvoir.
Les erreurs de la Révolution ?
atteintes aux droits de l’homme et aux libertés ; absences de démocratie politique (encore qu’au vu de ce qui se passe aujourd’hui, il y a des questions à se poser) ; licenciements et dégagements massifs pour des raisons syndicales et/ou politiques ; bavures CDR ayant coûté des vies humaines ; détentions, arrestations, assassinats, etc.
1-Durant les quatre ans de “la première révolution”, on a tenté d’instaurer au Burkina Faso une démocratie de classe. (cf. DOP). Ainsi, il y avait d’un côté le peuple (ceux qui étaient acquis à la révolution de l’autre côté les réactionnaires (le non peuple ?) ; pour ces derniers, point de salut, de liberté, de droits.
2-La réalité du pouvoir. Qui détenait le pouvoir de décider, de sanctionner ? Malgré les organisations politiques civiles dans ce qui composait les instances de l’exécutif d’alors on sait aujourd’hui que la “fraction militaire du CNR avait son affaire en main”.
3-Les organisations politiques membres du CNR. C’est généralement dans les problèmes de révolution, de ses forces motrices et de ses objectifs finaux que se manifeste avec plus de relief la nature de tout courant politique prétendant découvrir la voie du développement et du progrès social. Aussi, il suffit de savoir comment certains tranchent la question de la transformation sociale pour comprendre à qui profitent leurs opinions.
Disons-nous le, dans certaines de ces organisations, on trouvait des doctrinaires vaniteux et ambitieux qui préféraient avilir le rôle de la théorie en se contentant de généralités nationales. “Si tu n’es pas avec eux, tu es contre la révolution, si tu ne partages pas leurs idées, tu es opportuniste”. Ils étaient la norme, le thermomètre et la température.
4-Les hommes. Des voix s’élèvent aujourd’hui pour condamner les insuffisances du CNR. Ces mêmes voix hier ont justifié des atteintes aux droits de l’homme, encouragé la torture, réclamé des vies, dénoncé tel ou tel autre, abusé de leur pouvoir, évité de critiquer, etc. Osons croire que les professions de foi actuelles ne sont pas circonstancielles mais résultent d’une réelle prise de conscience. Sur le plan économique, social et culturel, les insuffisances de la Révolution ont plus porté sur la forme que sur le fond. C’est vrai qu’il faut “compter sur nos propres forces”. C’est vrai qu’il faut “faire des sacrifices”. C’est aussi vrai qu’il faut “plus de justice sociale”.
D’importantes mesures et décisions ont été prises dans ce sens, mais hélas la précipitation, la contrainte et le volontarisme aidant, d’aucuns n’ont pas compris le sens et la portée de ces mesures. Comme quoi on ne peut faire le bonheur de quelqu’un contre son gré.
La Révolution d’août a entrepris un combat résolu contre certains maux de notre société mais un combat dispersé. Un projet révolutionnaire doit permettre l’expression de tous les groupes sociaux et de toutes les catégories sociales. Il doit, s’appuyer sur le respect des individus et des minorités, l’affirmation des droits universels de l’homme et de la femme, le refus de toutes les formes d’exploitation et d’oppression.