Les révélations en boucle de Prince Johnson sur RFI : y aurait-il un marionnetiste derrière les rideaux?

RFI avait récemment, à l’occasion de la célébration du 21 ème anniversaire du décès de Thomas Sankara, consacré nombre d’émissions à l’illustre disparu. La radio est revenue sur la mémoire de Thomas Sankara en relatant les propos de Prince Johnson au sujet de sa participation à l’élimination du PF. Propos qui avaient fait grand bruit, donnant lieu à de nombreux commentaires dans es médias. Mais le fait d’y revenir -avec on peut dire la grosse artillerie- le 27 octobre 2008, puisque Prince Johnson est lui-même entré en scène pour confirmer les faits, a fait dire à beaucoup qu’il ne fallait pas prendre à la légère le traitement en boucle du dossier. On avait là une espèce de méga « buzz » avec des répliques à n’en plus finir : interviews de Stephen Smith puis d’Amara Essy, émission de Juan Gomez «La parole aux auditeurs » du 31/10/08 et le même jour, « Afrique Presse ».
Un « buzz » tout d’abord parce qu’il vient en quelque sorte recharger les accus de la famille Sankara et de tous les fidèles de l’illustre disparu dans leurs actions pour donner des suites judiciaires, politiques, au dossier Thomas Sankara, jusqu’à présent contrarié par des déclarations et décisions défavorables. Avec les propos de Prince Johnson, lancées à travers la radio mondiale, il y a le sentiment d’un aveu déterminant qui peut ramener l’intérêt autour de l’affaire et favoriser sa réactivation au Burkina Faso comme devant le Comité des droits de l’homme des Nations Unies. Du coup, beaucoup se mettent à s’interroger sur les conséquences qui peuvent en résulter par rapport à l’avenir politique, judiciaire… de Blaise Compaoré.
Le « buzz », il vient aussi de ce qu’on se coupe les cheveux en quatre pour comprendre pourquoi depuis quelques deux mois pratiquement, RFI s’est découvert une soudaine passion pour cette affaire au point d’ouvrir ses ondes à des intervenants qui n’y auraient pas eu droit, par le passé. Au fil des années, il s’était en effet construit comme un pacte secret entre le pouvoir burkinabé et la radio internationale au point que beaucoup étaient convaincus que la radio jouait pour le Burkina Faso, un rôle de conseil, de lobbying, pour lui assurer une image des plus avenantes au plan international, auprès des bailleurs de fonds et de l’opinion internationale d’une façon générale. Autant tout ce qui était susceptible d’arranger l’image du pouvoir dans quelque domaine que ce soit –politique, économique, sportif, diplomatique, culturel…- était encouragé, autant toutes les affaires et tous les acteurs qui pouvaient agir en sens contraire, étaient comme la peste, écartés de la radio mondiale.

Que s’est-il passé pour qu’aujourd’hui, on rompe le pacte sacré ?

Une question entraînant l’autre, on en vient à une préoccupation de plus en plus envahissante par rapport à toutes les autres. N’y aurait-il pas dans cette affaire des mains invisibles qui chercheraient à se venger de Blaise Compaoré ou pour une raison ou une autre, à le déstabiliser diplomatiquement, politiquement ? Et là, les paris connaissent la folle enchère. Si ce n’est pas la France qui est pointée du doigt parce que, au fond, elle n’apprécierait pas le virage américain de la diplomatie burkinabé, ce sont les Libyens pour les mêmes raisons qui sont incriminés. On voit même des regards se tourner du côté des Ivoiriens d’où viendrait la volonté de faire mordre la poussière au grand Médiateur, et ici on pense soit au président ivoirien qui sait que la vengeance est un plat qui se mange froid, soit aux opposants et autres rebelles toujours en armes qui ne semblent pas tout à fait trouver leur compte par la tournure prise par l’Accord de Ouagadougou.

Mais il y en a qui estiment que s’il y a un ou des marionnettistes, il ne faut pas aller chercher si loin mais fouiller plutôt dans le pays et même dans le sillage du pouvoir. En fait, cette autre attaque contre Blaise Compaoré ne serait que la conséquence de la guéguerre qui divise la famille présidentielle opposant sérieusement, il faut finir par en convenir, le CDP et la FEDAP/BC. Et lorsque la rumeur, se mettant de la partie, fait état qu’un baron du CDP en délicatesse avec le régime a séjourné quelque temps au Libéria avant que n’éclate ce brûlot de Prince Johnson, on se dit que peut-être il y a là l’indice majeur qui explique tout.

Et si l’affaire gagne en puissance, c’est bien à cause de cela car, malgré le caractère tonitruant et spectaculaire des propos de Prince Johnson, l’homme n’est pas vu comme un témoin à charge au-dessus de tout soupçon. Par ailleurs, on n’est pas édifié par le sentiment qu’il existerait, avec ses déclarations, un élément vraiment nouveau susceptible de briser les réticences des juridictions burkinabé et des membres du Comité des droits de l’homme des Nations Unies pour faire évoluer le dossier dans le sens attendu par les Hoirs et amis de Thomas Sankara. Des aveux, on en a déjà eus d’édifiants à l’occasion d’interviews ou de dépositions devant la justice au cours desquelles de hautes personnalités ont expliqué les conditions dans lesquelles, passant à l’action le 15 Octobre 1987, il s’en est suivi des pertes en vies humaines dont celle du PF. Que Charles Taylor ou Prince Johnson aient pu, à titre principal ou comme supplétifs, participer à l’entreprise, on en a déjà parlé sous toutes les coutures même si, par ailleurs, d’autres sources relèvent que les Libériens ne sont venus à Ouagadougou du Ghana qu’en 1989. Quant à la mise en cause de Félix Houphouët Boigny, ce n’est pas davantage une nouvelle fraîche. Enfin, l’intérêt qui se dégage de l’entrée en lice de Prince Johnson ne vient pas véritablement de ce qu’on s’attend à ce qu’elle soit convertie en mobilisation décisive de la part des amis de Thomas Sankara et d’actions vigoureuses sur le terrain pour donner du fil à retordre à Blaise Compaoré et à son régime.

Non, l’inquiétude vient de ce que des frères ennemis puissent avoir la puissance financière et relationnelle, le courage de porter le débat à ce niveau mondial. S’ils le font sans réplique significative, montant dans les jours à venir, en crescendo dans les actes de défi, ils pourraient ébranler les convictions internes et internationales et accréditer l’idée d’une puissance de frappe. Cela pourrait remettre en cause des alliances, émousser des confiances et porter préjudice à Blaise Compaoré. Il est un proverbe que les Burkinabé ont tendance à suivre, qui dit que quand le cours de la rivière se fait tortueux, le caïman doit apprendre à se gondoler. On dira ici que si la force glisse du côté des « rebelles », le camp Blaise Compaoré risque de connaître des désertions. En tout les cas, on est arrivé au stade où cette mésintelligence ne nous apparaît plus comme une mince affaire tellement elle traduit une volonté des protagonistes à en découdre par tous les moyens. Et nous voilà insidieusement ramenés comme à la veille du 15 Octobre, à ce face à face où la survie reviendra à celui qui aura la gâchette la plus rapide.
 VT

Source : http://www.sanfinna.com/EtatdelaNation7.htm

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