Publié sur http://borromee04.wordpress.com le août 4, 2014 par Charles K. Somé
“…les supputations sur la préparation de la révolution n’étaient plus qu’un secret de polichinelle. J’étais informé de la chose et de son imminence, même si je ne connaissais pas le jour.” affirme l’ancien Conseiller du Président Thomas Sankara, le camarade Fidèle Kientega. De tous les coups qu’a connu le Burkina Faso, celui du 4 août 1983 qui va porter le révolutionnaire Thomas Sankara et ses camarades au pouvoir était sans conteste le plus attendu des populations. Si bien que l’annonce du renversement du régime du Commandant Médecin Jean-Baptiste Ouedraogo ressemblait, à n’en point douter, à une formalité. Aujourd’hui, 4 août 2014 soit 31 ans après, nous vous proposons une série de témoignages, dont celui du camarade Kientega qui a bien voulu partager avec nous son expérience du 4 août 1983 et de l’avènement de la Révolution en Haute-Volta d’alors. Lisons
Témoignage de Fidèle Kientega, ancien conseiller du président Thomas Sankara
“Ayant été dans le mouvement étudiant puis ayant continué en entrant dans la vie active à approfondir ma formation politique avec le Parti africain de l’indépendance (PAI) et principalement avec Soumane Touré, imaginez le reste!
Toutes ces organisations de gauche qui croyaient tirer les ficelles pour faire agir les militaires pour leur compte. Il va donc de soi que dans les milieux politiques à Ouagadougou et ses connexions, les supputations sur la préparation de la révolution n’étaient plus qu’un secret de polichinelle. J’étais informé de la chose et de son imminence, même si je ne connaissais pas le jour. L’avant-veille, le 2 août 1983, alors que j’étais en stage au Niger je reçois un message me demandant de rentrer d’urgence au pays.
Le 4 août au soir vers 17h30, j’arrivais de Niamey par 1 vol d’Air Afrique après 2 mois de stage au service du protocole d’État du Niger, c’était sous le Président Seyni Kountché. Avec les formalités à l’aéroport, j’ai eu à peine le temps d’arriver chez-moi que l’on entendait le crépitement des armes marquant la prise de Ouagadougou par l’insurrection populaire partie de Pô.
A l’instar de beaucoup de voltaïques qui souvent sans en avoir une idée précise ni même une quelconque connivence avec les leaders de la Révolution rêvaient de devenir des burkinabé au regard des événements politiques majeurs ayant jalonné les trois précédentes années et dont le point culminant aura été le 17 mai 1983.
Puis quelques instants plus tard, c’est la voix saccadée par l’émotion ou l’essoufflement, certainement les deux, du Capitaine Thomas Sankara livrant la désormais historique déclaration du 4 août, qui finissait de porter notre exaltation au summum de l’euphorie. Euphorie qui a grisé plus d’un et drainé dès le lendemain 5 août des milliers de ouagavillois dans la rue pour saluer l’action courageuse, patriotique et salvatrice menée par ces dignes fils. Dignes fils tels que le Capitaine Thomas Sankara dont les actes de bravoure qui confinaient à l’épopée inspiraient respect et admiration!
Pour quelqu’un comme moi qui a milité dans les mouvements scolaires et estudiantins, appelant la révolution de tous ses vœux, quelqu’un qui depuis sa plus tendre enfance a refusé l’injustice et exécré la domination et régulièrement exprimé cette position face à plus fort que lui sans crainte aucune, l’avènement de la Révolution d’août 1983 se présentait comme du pain béni, et je m’y suis engagé sans réserve…
Contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, notre origine commune (Sankara & moi) dans la province du Passoré n’est en rien cause de ma proximité en tous points avec lui. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement car l’homme n’est en rien régionaliste. Il avait les mots les plus durs pour condamner le régionalisme, disant chaque fois en dernier ressort que s’il y a une région à laquelle il se sent sentimentalement attaché, ça ne serait pas le Passoré même s’il y est né, mais plutôt le Poni où il a grandi.
Bref, je suis à l’origine agent de la Présidence du Faso comme d’autres sont agents des Finances, des Transports, de la Fonction publique ou encore de la Santé pour avoir été mis à la disposition de cette institution et je figure dans cette mise à disposition sur le même arrêté que d’autres camarades de ma promotion. Je pense que quand les rêves sont francs, sans ambiguïté et sans fioritures, une force immanente quelque part leur permet de se réaliser.
Comme on le constate, il y a des moments où le hasard répond à certaines affectations à la Présidence du Faso, comme un coup du sort pour faire rencontrer mon destin et celui de Sankara. Et de fait, nos destins ne se sont pas manqués, jusqu’à ce que son assassinat sordide et déloyal nous sépare le 15 octobre 1987!”
Fidèle Kientega, ancien conseiller du Président Thomas Sankara
Source : http://borromee04.wordpress.com
Information: Espace De Liberté et Borromee04 restent disposés pour publier votre témoignage relatif à cette date du 4 août 1983. Comment avez-vous vécu et accueilli l’avènement du CNR? Où étiez-vous et que faisiez-vous? Quel âge aviez-vous? Comment était l’ambiance autour de vous en ce moment-là? Et certainement d’autres anecdotes qui vous reviendraient à l’esprit. Vous pourrez nous envoyer votre récit en version word et au moins une photo de vous par e-mail: lesommet04@gmail.com