Contradictions : Blaise, où est ton frère?
Accusé d’avoir tué son "ami", le président Compaoré esquive les attaques et la mort de Sankara demeure officiellement une énigme.
"Le jour où vous entendrez que Blaise Compaoré prépare un coup d’État contre moi, ce n’est pas la peine de me prévenir. Car, ce serait trop tard". C’est ce que disait Thomas Sankara à des journalistes qui l’interrogeaient peu après l’apparition de divergences entre les dirigeants de la révolution burkinabè. C’est dire si lui-même savait que Blaise Compaoré, son fidèle compagnon depuis leur intégration dans l’armée, pouvait comploter contre lui. Ou alors, qu’il le faisait déjà, et qu’il n’y avait en réalité plus qu’à attendre l’issue fatale.
Joseph Hien, confident de feu Joseph Sankara, père de l’autre, est plus explicite en rapportant les propos de son défunt ami. Dans une lettre ouverte publiée sur thomassankara.net, il déclare en faisant parler Sankara père : "Ils étaient tous deux mes enfants, l’un a tué l’autre. Le père que je suis est en droit de savoir ce qui s’est passé. C’est tout ce que j’attends de lui. S’il ne vient pas, quand je rejoindrai Thomas, certainement qu’il me dira ce qui s’était passé".
Qu’est-ce qui aurait pu expliquer que Thomas Sankara s’épanche ainsi dans les médias? Serait-ce la proximité de Chantal Compaoré, épouse de Blaise, métisse franco-ivoirienne, avec la famille d’Houphouët-Boigny, le président ivoirien qui ne voyait pas d’un bon œil l’insubordination du capitaine Sankara vis-à-vis de la France tutrice? Les rumeurs sur les financements occultes que Compaoré percevrait d’Abidjan? De là à se résoudre à boire le calice, ne peut-on pas penser que Sankara avait conscience de la faiblesse de son propre camp, les soldats qui le poussaient à "frapper Blaise avant qu’il ne frappe"?
L’"accusé" Compaoré n’a jamais répondu clairement à ces interrogations que les sankaristes portent contre lui. Mais ce n’est pas faute d’en avoir eu l’occasion. Dans son édition de la semaine dernière (numéro 2439 du 7 au 13 octobre 2007), l’hebdomadaire Jeune Afrique a obtenu du président du Burkina Faso qu’il fasse le bilan de ses vingt années de pouvoir qui coïncident avec le vingtième anniversaire de la mort de Sankara. "Thomas Sankara et, plus récemment, Norbert Zongo constituent les deux morts célèbres de l’ère Compaoré. Saura-t-on jamais la vérité sur ces assassinats?", demande l’intervieweur.
Réponse de l’interviewé : "Je ne crois pas que le Burkina soit le seul pays à connaître des affaires non élucidées. Pour Thomas, l’enquête n’a pas abouti, dans un contexte, à l’époque, d’Etat d’exception. Pour Norbert Zongo, c’est également le cas, même si le dossier n’est pas clos".
La version officielle, au lendemain des événements du 15 octobre, parlait pourtant de la "mort naturelle" de Thomas Sankara. Jusqu’à ce que les plaintes de la famille Sankara aboutissent en avril 2004 à une décision du Comité des droits de l’homme des Nations unies qui dénonce "Le fait que la mort de Thomas Sankara puisse être faussement attribuée à des causes autres que celles qui ont causé son assassinat, mine sa réputation et dégrade le sens de sa vie". Aussi jugeront les Nations unies, "le Burkina Faso a l’obligation d’enquêter et de déterminer les circonstances de sa mort, au lieu de se réduire à simplement rectifier son certificat de décès".
Joseph Hien, confident de feu Joseph Sankara, père de l’autre, est plus explicite en rapportant les propos de son défunt ami. Dans une lettre ouverte publiée sur thomassankara.net, il déclare en faisant parler Sankara père : "Ils étaient tous deux mes enfants, l’un a tué l’autre. Le père que je suis est en droit de savoir ce qui s’est passé. C’est tout ce que j’attends de lui. S’il ne vient pas, quand je rejoindrai Thomas, certainement qu’il me dira ce qui s’était passé".
Qu’est-ce qui aurait pu expliquer que Thomas Sankara s’épanche ainsi dans les médias? Serait-ce la proximité de Chantal Compaoré, épouse de Blaise, métisse franco-ivoirienne, avec la famille d’Houphouët-Boigny, le président ivoirien qui ne voyait pas d’un bon œil l’insubordination du capitaine Sankara vis-à-vis de la France tutrice? Les rumeurs sur les financements occultes que Compaoré percevrait d’Abidjan? De là à se résoudre à boire le calice, ne peut-on pas penser que Sankara avait conscience de la faiblesse de son propre camp, les soldats qui le poussaient à "frapper Blaise avant qu’il ne frappe"?
L’"accusé" Compaoré n’a jamais répondu clairement à ces interrogations que les sankaristes portent contre lui. Mais ce n’est pas faute d’en avoir eu l’occasion. Dans son édition de la semaine dernière (numéro 2439 du 7 au 13 octobre 2007), l’hebdomadaire Jeune Afrique a obtenu du président du Burkina Faso qu’il fasse le bilan de ses vingt années de pouvoir qui coïncident avec le vingtième anniversaire de la mort de Sankara. "Thomas Sankara et, plus récemment, Norbert Zongo constituent les deux morts célèbres de l’ère Compaoré. Saura-t-on jamais la vérité sur ces assassinats?", demande l’intervieweur.
Réponse de l’interviewé : "Je ne crois pas que le Burkina soit le seul pays à connaître des affaires non élucidées. Pour Thomas, l’enquête n’a pas abouti, dans un contexte, à l’époque, d’Etat d’exception. Pour Norbert Zongo, c’est également le cas, même si le dossier n’est pas clos".
La version officielle, au lendemain des événements du 15 octobre, parlait pourtant de la "mort naturelle" de Thomas Sankara. Jusqu’à ce que les plaintes de la famille Sankara aboutissent en avril 2004 à une décision du Comité des droits de l’homme des Nations unies qui dénonce "Le fait que la mort de Thomas Sankara puisse être faussement attribuée à des causes autres que celles qui ont causé son assassinat, mine sa réputation et dégrade le sens de sa vie". Aussi jugeront les Nations unies, "le Burkina Faso a l’obligation d’enquêter et de déterminer les circonstances de sa mort, au lieu de se réduire à simplement rectifier son certificat de décès".
Source : Quotidien Mutations (Cameroun) du 15 octobre 2007 http://www.quotidienmutations.info/mutations/octobre/1192412038.php