Publié dans le Reporter N°154 du 15 novembre 2014
Le peuple burkinabè vient de réaliser ce qui était impensable pour bien des acteurs, il y a à peine une semaine. Quelle analyse et commentaire faites-vous de l’évolution de la situation et du dénouement auquel l’on a abouti ?
Nous vivons des moments historiques. La révolution des 30 et 31 octobre est l’évènement sociopolitique le plus important depuis l’avènement de Blaise Compaoré au pouvoir. C’est une véritable révolution avec ses martyrs qu’il faudra très vite honorer. Un véritable panthéon burkinabè doit recevoir ces héros qui ont donné leur vie en ces jours et tous ceux qui ont ouvert la voie à la conscience du peuple. Hommage aux morts de la révolution, à des jeunes assassinés par le régime mourant et mort, pensée et hommages à Norbert Zongo, à Sankara et à tous les héros.
Il s’agit d’une colère phénoménale, une colère d’anthologie du peuple souverain qui a rappelé qu’il peut tarder à sonner le glas mais qu’il ne meurt jamais et qu’il est invincible. Elle n’existe pas cette femme qui peut enfanter un fils qui puisse tenir tête à un peuple déchaîné. L’ancien président et ses séides paient ainsi le prix de leur entêtement, de leur aveuglement, de leur nombrilisme mais également de leur enivrement des luxures du pouvoir. On ne peut pas avoir le beurre, l’argent du beurre, la fille de la crémière et le sourire de cette dernière.
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Un mouvement comme l’insurrection du 3 janvier 1966 ?
L’analogie avec l’insurrection du 3 janvier 1966 est pertinente, mais l’insurrection d’octobre 2014 est spectaculaire par sa jeunesse, car en définitive, c’est la démographie de la jeunesse qui a chassé Blaise Compaoré. Sous son règne, la population a plus que doublé : de moins de 8 millions à plus de 16 millions d’habitants. Mais il faut noter que contrairement au 3 janvier, les syndicats officiels ont majoritairement été à la marge de l’histoire. Depuis la doctrine Tolé Sagnon de démarcation avec la lutte contre le Sénat et contre la révision de l’article 37, le collectif syndical s’est occupé du front des revendications corporatistes et a laissé l’avant-garde de la lutte pour la démocratie et la liberté. L’histoire l’a déjà retenu.
Il faut retenir de ces évènements la puissance du peuple. Un peuple endormi n’est pas mort, il est du reste éternel. Il faut également retenir que « Mansa kélé télé té douya ban », c’est-à-dire que le règne d’un prince ne saurait être éternel. Il faut que ceux qui aspirent à nous gouverner ici au Burkina Faso et ailleurs en Afrique, apprennent définitivement la leçon : les ivresses du pouvoir conduisent à la poubelle de l’histoire. Les partisans zélés sont les premiers rats qui quittent le navire. Où sont-ils ces messieurs qui jouaient aux matamores ? Les Dermé Salam, Assimi Kouanda, Salia Sanou, Alpha Yago, Alain Edouard Traoré, Alain Yoda et autres?
Le régime déchu de Blaise Compaoré a été victime de son entêtement à se maintenir malgré le rejet d’une bonne partie du peuple attaché à la limitation des mandats. Peut-on parler d’une nouvelle révolution démocratique et populaire ?
Le régime a été emporté par son entêtement suicidaire, engoncé dans des certitudes fermement ancrées dans le vide, il s’est enfermé dans un égoïsme repu, dans un entêtement revanchard, dans une stratégie cynique. Il a versé dans la ploutocratie en pensant que l’argent pouvait tout acheter. Tout le monde sait que sans les valises d’argent, les députés de l’ADF-RDA et même du CDP n’allaient pas annoncer leur vote en faveur de la modification de la Constitution. Gilbert Ouédraogo fait partie de ces satrapes, tout comme Hermann Yaméogo, qui ont longtemps considéré notre système politique comme un marché sur lequel ils investissent le capital mais aussi la dextérité en la matière de leur père. On peut tout dire mais Maurice Yaméogo et Gérard Kango étaient des experts de la fraude politique et de la ploutocratie, ils ont vécu de la politique. Certes, ils sont aujourd’hui plus qu’égalés par la classe politique, mais monsieur Gilbert Ouédraogo et monsieur Hermann Yaméogo sont les descendants de leur père. Ils ont participé à désabuser complètement le peuple, à désorienter une jeunesse volée et violée. Mais il faut leur rendre justice pour dire qu’ils ne sont pas seuls. Beaucoup de personnes utilisent leur position dans l’espace public pour alimenter leur confort personnel. Il y a bien entendu tous ces messieurs du CDP qui vivaient au-dessus de leur niveau réel, et qui pour la plupart dans aucun système au monde n’auraient accédé au dixième de leur position sociale et économique actuelle. Monsieur François Compaoré aurait été un ordinaire fonctionnaire en fin de carrière, une carrière quasi banale, si le sort ne lui avait pas accordé le bénéfice de la violence de son frère par la captation de la rente du pouvoir.
Ce qui s’est passé est une révolution populaire, un soulèvement populaire, une insurrection populaire contre l’autocratie. Une insurrection populaire résultat de la surrection des consciences. La dimension populaire est indéniable. La dimension démocratique également, bien que celle-ci demande à être confortée dans le réel.
Depuis la chute de Blaise Compaoré chassé par la rue, l’armée appelée à prendre ses responsabilités a montré des signes de division et d’absence d’un commandement digne de ce nom. Doit-on forcément compter sur elle pour organiser la transition ?
L’armée constitue la limite de ces évènements, bien qu’une partie ait sympathisé avec le peuple. Elle a annoncé, après des divisions et des tergiversations, un adoubement du Lieutenant-Colonel Zida. Mais il faut bien comprendre qu’on l’a aidé à s’installer. On a tous vécu le manque d’imagination politique de l’opposition et son dépassement par le rythme des évènements, ses louvoiements incompréhensibles, pendant que nous avons connu tout de même une relative bonne conduite de la contestation politique depuis deux ans. D’abord, il a fallu la pousser littéralement à demander la démission de l’ancien président pour qu’elle y accède finalement en début de soirée, le 30 octobre, après deux déclarations complètement insipides. La tergiversation de l’opposition avec d’interminables discussions chez le Mogho Naaba, avec des messages contradictoires, officieusement favorables à Lougué, une personnalité arlésienne typique, et officiellement pour un pouvoir civil. Comment peut-on appeler avec tant d’insistance et aussi durablement quelqu’un au pouvoir cependant qu’il déclare lui-même qu’il y va à condition que le chef d’Etat-major l’adoube ? Mais surtout l’opposition a été incapable de donner une direction d’avant-garde claire et en phase avec la réalité. Elle n’a fait aucune offre politique concrète ni au peuple, ni à ses partenaires. Jusqu’à cette nuit du samedi 1er novembre, elle n’énonce aucun principe opérationnel, elle n’avance aucun nom, elle ne propose aucune équipe, elle reste dans une attitude tactique de contestation de type syndical, sans imagination politique. En définitive, l’immobilisme, l’aphonie, l’atonie et surtout le manque d’initiative politique du CFOP explique largement les errances de l’ensemble du mouvement insurrectionnel. Par ailleurs, la société civile que l’on sait diverse et par moments contradictoire, a montré des divergences tactiques qui ont profité aux militaires. Elle s’est illustrée dans des communiqués divergents à tout le moins et a alimenté la confusion. Mais beaucoup de personnes ne reconnaissent pas leur rôle et tentent de charger le Balai citoyen qui a eu le malheur de porter le chapeau du coupable idéal. L’opposition n’a pas été habile dans la gestion de ses relations avec la société civile durant ces jours d’insurrection. Elle a alimenté les accusations par presses interposées. Elle n’a pas été conséquente à nos interpellations sur la nécessité de proposer immédiatement une offre politique, elle n’a pas été sensible à nos interpellations de ressouder avec des initiatives courageuses et pragmatiques les partenariats. En définitive, la stratégie de l’opposition autour de l’option républicaine est restée figée. Déjà, vendredi matin, nous avons annoncé sur Ouaga FM que la stratégie républicaine supposait une République à minima. On ne peut pas être républicain dans une République qui n’existe pas. Mais il ne faut pas être trop dur avec l’opposition. Elle a eu une contribution inestimable et une direction courageuse jusqu’à l’insurrection. Elle a montré de la constance et de la consistance pendant plus de deux ans.
C’est pour cela que le CFOP doit observer qu’il partage, de fait aujourd’hui, bien curieusement, les positions tactiques de la nébuleuse pcrviste qui a pourtant freiné des quatre fers la lutte et a distrait les gens avec un contre-front via l’instrumentalisation de la vie chère.
Je ne comprends pas que le CFOP ait perdu autant de temps ; qu’il ait accordé autant d’attention à des organisations inopérantes comme la CEDEAO et l’ONU.
Ceci étant, le rapport de l’ensemble de la classe politique et sociale avec l’armée est très particulier ; contradictoire pour beaucoup et même malsain pour certains. A une conférence publique organisée au Centre de presse Norbert Zongo, le 2 juin 2014, nous avions expliqué la nature fragmentée et suspecte de notre armée. Par conséquent, nous avions noté que nous ne pouvions pas envisager quelque chose avec l’armée. Les centaines de participants, dont plusieurs journalistes, qui ont entendu la réaction de Etienne Traoré, qui objectait et disait ne pas croire que notre armée puisse manquer aujourd’hui de patriote comme Sankara, ont bien compris l’ambigüité des positions. Le Pr Mahamadé Sawadogo, mon respecté aîné, a indiqué à une conférence du mouvement des intellectuels, que si nous arrivions dans un chaos, y compris militaire, il y avait des solutions prêtes pour nous tirer d’affaire par le haut. Où sont passées ces personnes ?
Non, il faut se tourner vers l’avenir et constater à notre amer regret, que l’armée est dans la donne et est incontournable parce que nous n’avons pas pu prendre physiquement Kossyam. Pourquoi ? Parce que la puissance de feu qui y est rassemblée était insurmontable par une stratégie éclatée, et insuffisamment efficace. Le peuple ne peut pas se saigner éternellement.
Quelle peut-être à votre avis, la composition ou le format de la transition ?
Pour la transition, bien évidemment que la réalité de l’armée est massive. Mais elle ne peut pas et ne doit pas piloter une transition exclusivement ou essentiellement militaire. A notre corps défendant, il faut non pas être réaliste, mais voir la réalité et agir avec et sur elle. Les positions tactiques ne tiennent pas au lendemain d’une révolution, il faut un renouveau stratégique et rapide des acteurs les plus importants, dont l’opposition et la société civile. Il faut s’organiser concrètement pour imposer au plus vite une relation équilibrée avec l’armée. Je serai heureux que nous puissions nous passer des militaires, mais j’observe que nous avons laissé passer les minces chances que nous avions pour cela.
Certains acteurs de la chute de Blaise Compaoré craignent que leur victoire ne soit volée par les acteurs politiques ou les militaires. Quelle peut-être, à votre avis, la quintessence de la feuille de route de la transition ?
Il faut que nous nous investissions tous dans la transition en organisation. Des principes supérieurs doivent guider cette transition. Vendredi 31 octobre, dans la matinée, nous avons annoncé sur Ouaga FM, avant le départ du dictateur, les principes qui devaient gouverner la transition. Avec le peu de recul que nous avons, les voici actualisés. En premier lieu, l’organe de transition doit être un reflet des forces politiques et sociales et des couches populaires et de la jeunesse qui ont nourri et fait aboutir l’insurrection populaire. La révolution ne saurait accoucher d’un simple pouvoir militaire. Il ne faut ni un pouvoir exclusivement militaire, ni un pouvoir de politiciens à 100%. Il faut une dose minoritaire de militaires, des autres forces de sécurité, notamment la gendarmerie et la police, de représentants de partis politiques ayant contesté Compaoré et son projet de monarchie, une représentation du corps social à travers les organisations et mouvements qui ont porté l’insurrection populaire et bien entendu de jeunes démocrates. Les notables et la chefferie traditionnelle, les religieux, pour les plus proches des aspirations du peuple, peuvent également avoir quelques représentants. Dans tous ces compartiments, il faut des gens connus et reconnus pour leur attachement à l’intérêt du peuple, à la liberté et à la démocratie.
En deuxième lieu, le principe intangible de non-compétition aux élections présidentielles pour tous les membres du gouvernement de transition, le chef de la transition en tête. Cela relève du bon sens que l’on ne peut pas être arbitre et concurrent. Ainsi, tout militaire, tout homme politique, tout leader qui veut participer ou qui accepte d’aller dans l’équipe de transition est automatiquement exclu de la présidentielle à venir et doit en faire le serment devant la nation et signer une déclaration dans ce sens. Le chef de la transition doit donner l’exemple en premier.
En troisième lieu, la transition doit être la plus brève possible. Il est impératif que nous ne jouions pas au maximalisme et qu’on aille rapidement à des élections pour sortir de cette phase délicate. Nous avons beaucoup de chance que le système électoral semble assez prêt pour des élections rapides.
En quatrième lieu, il est bien naturellement exclu de voir les visages de l’ancien régime devant comme derrière la scène. La mouvance CDP et ses alliés ADF-RDA, UNDD, CFR, et consort sont périmés et il faut les enterrer. Malheureusement, et il faut le constater, nous ne pouvons pas efficacement exclure tous les militaires. C’est mon sentiment mais je serais heureux d’être démenti par la réalité. Également, il faut faire attention à ceux qui n’ont pas pris part à l’insurrection ni à la longue lutte depuis plus de deux ans. Les syndicats officiels sont restés cantonnés à une plateforme réactionnaire, jusqu’au jour de l’insurrection, défendant des intérêts matérialistes. On ne peut pas avoir confiance en des gens qui ont refusé la lutte pour la liberté et qui ont préféré le pain des errances budgétaires de Compaoré. Il en va de même de ces organisations qui nous ont durablement distraits avec des positions qui en définitive étaient des alliances objectives avec l’ancien régime. J’ai dénoncé il y a plus d’une année, des responsables du PCRV mourant et leurs supposées organisations vitrines. Ceux qui organisaient une campagne pour le droit des prisonniers et faisaient la sourde oreille à l’appel à la résistance contre le Sénat et la révision de l’article 37 sont dans la poubelle de l’histoire, il faut les y laisser et ne pas risquer de compromettre le renouveau en construction. Ce que j’ai appelé la doctrine Tolé Sagnon est en définitive une attitude de collaboration. La clarification est nette. Il faut laisser tout ce monde à leur conscience et à leurs théories biscornues d’une révolution qu’ils ne veulent du reste pas. La jeunesse doit être lucide, sans esprit revanchard, mais garder ses distances avec ceux qui ont conduit la lutte du collectif après l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons, dans le cimetière de la compromission et dans les bras de Blaise Compaoré.
En cinquième lieu, la transition n’est pas destinée à traiter des questions de développement socioéconomique. Il ne s’agit pas de créer des emplois, ni de régler la question de l’électricité, encore moins la crise de l’éducation ou celle de la santé. Il s’agit d’assurer, dans la sécurité et la quiétude, le renouveau institutionnel et démocratique du pays. Le reste est du ressort du prochain président démocratiquement élu.
Quelle pourrait être la nouvelle configuration de la scène politique nationale ?
Il est trop tôt pour le dire. Mais croyez-moi, nous n’avons pas fini le travail. Le plus dur a été fait avec l’insurrection du peuple. Il faut travailler stratégiquement avec patriotisme et sens de la responsabilité et clairvoyance pour que Compaoré ne nous rie pas au nez depuis son exil.
Comment maintenir la flamme de la mobilisation citoyenne afin de maintenir la pression sur l’organe de transition pour s’assurer qu’il veillera à restaurer les principes de bonne gouvernance mais surtout à organiser un processus devant aboutir à l’organisation d’une élection libre et transparente ?
Bien évidemment, la guéguerre entre les forces qui ont porté l’insurrection n’est profitable qu’à l’ancien régime. Elle est suicidaire pour la cause et pour la vie des militants. C’est dégueulasse le pugilat auquel sont soumis les combattants du Balai citoyen. Des aînés restent dans des attitudes irresponsables, ne veulent pas assumer les positions qu’ils ont prises et laissent les responsables du Balai citoyen face à une vindicte qui heureusement s’estompe. Il faut revenir à de l’intelligence partenariale et stratégique. La société civile y travaille, elle doit rapidement trouver un minimum de coordination pour dépasser les positions tactiques divergentes et trouver une cohérence stratégique en faveur d’une pression citoyenne efficace et féconde. Mais il ne faut pas perdre de temps avec ceux qui se sont assignés, d’une manière ou d’une autre, la mission de nous distraire. Sortons des oppositions stériles mais ne prêtons pas le flanc aux théoriciens du grand soir en lévitation sur le réel social. Deuxièmement, le CFOP doit renouveler rapidement sa ligne stratégique et ne pas jouer aux syndicalistes mais être en pratique politique concrète pour l’invention de la transition, sa conduite stratégique et la veille vers le renouveau démocratique. Il faut des propositions, des offres concrètes, il faut sortir du siège du CFOP et aller là où ça se passe.
Comment voyez-vous l’avenir immédiat et proche du Burkina Faso au plan politique et économique, surtout avec les attentes citoyennes qui semblent trop fortes ?
Il faut se focaliser sur la transition. Des mesures conservatoires doivent être prises dès maintenant par ceux qui le peuvent pour ne pas faire le nid à l’impunité, pour que les assassins soient légitimement punis demain dans une démocratie avec une justice honorable. Il faut exercer une veille politique et citoyenne contre la réaction et les contre-révolutionnaires. Il faut que les journalistes, les historiens, les chercheurs, tous accumulent les preuves dures de la réalité actuelle afin de nous permettre de dire de façon claire l’histoire politique, de balayer à jamais les satrapes, les marionnettes et autres entrepreneurs politiciens.
Cependant, je ne suis pas optimiste sur l’avenir socioéconomique immédiat. Il y a une panne de réflexion sur l’économie dans notre pays, il y a un vide d’idées dans les différentes chapelles politiques sur les enjeux économiques, sur les problèmes de la jeunesse, de la santé et de l’éducation. La plupart des lieux politiques restent gouvernés par des idées peu claires, des dogmes désuets et n’ont pas de réflexion endogène propre, systématique et à la hauteur. Nous allons mettre des années à construire une alternative véritable. Il faut que le peuple en soit conscient, au-delà des démagogies. Il y aura des désillusions de la part de ceux qui ont pensé ou à qui on a fait penser que c’était le combat de l’alternative. Il s’agissait du combat contre la dictature ; il s’agit encore du combat pour l’alternance démocratique. Le renouveau économique et social doit être inventé. Il ne faut pas baisser les bras et je crains que les désillusions n’aident pas à ce combat. J’ai été acteur contre la révision de la Constitution au Bénin en 2006 par Kérékou, je sais que la lutte n’est pas finie et que les Béninois n’ont pas obtenu grand-chose de Yayi Boni. Mais le minimum est encore sauvegardé et la révolution burkinabè aidera à cimenter cet acquis dans ce pays voisin.
Mais je veux dire que si nous avions joué aux inintelligents depuis deux ans en nous tiraillant sur les questions idéologiques, comme les contre-révolutionnaires nous y appelaient, Blaise serait encore au pouvoir. Il a fallu une plateforme minimale, certes faible en contenu, mais préalable indispensable. Il faut rester, le temps de la transition, soudé sur l’essentiel. Nous aurons le bonheur des bagarres de fond et des questions idéologiques dans quelques mois In Ch’Allah.
Votre dernier mot ?
Merci. Je veux dire que la révolution est le passage de l’ancien, le régime Compaoré, au nouveau, la démocratie véritable je l’espère. Ce passage rapide et brusque ne peut se faire sans heurt et il est également normal qu’il y ait des bégaiements. Hommage à nos morts. Je finirai par cette phrase d’un révolutionnaire : « Les tragédies des peuples révèlent de grands hommes mais ce sont les médiocres qui les provoquent », Thomas Sankara. Blaise a provoqué la tragédie et en a été victime. Sachons humblement mais avec courage et sens de responsabilité être du côté de l’histoire, du côté de l’avenir.
Propos recueillis par Boureima Ouédraogo
Source : http://www.reporterbf.net/index.php/envoye-special/item/447-interview