Notre Maison blanche se trouve dans le Harlem noir

3 octobre 1984

Le 3 octobre 1984, toujours à Harlem, c’est devant 500 personnes réunies d l’école Harriet Tubman, que Sankara prend la parole. Le texte ci-dessous est la retranscription d’un enregistrement du meeting, organisé par la Coalition Patrice Lumumba’.

L’impérialisme ! [Cris de  « À bas !»] L’impérialisme ! [Cris de  « À bas !»] Le néo-colonialisme ! [Cris de  « À bas !»] Le racisme !

[Cris de  « À bas !»] Le fantochisme ! [Cris de  « À bas !»] Gloire !

[Cris de  « Au peuple !»] Dignité !

[Cris de  « Au peuple !»] Pouvoir !

[Cris de  « Au peuple !»]

La patrie ou la mort, nous vaincrons !

La patrie ou la mort, nous vaincrons !

Merci camarades. [Applaudissements]

Je ne serai pas long parce que ceux qui m’ont précédé ici ont dit ce que doit être la révolution. La camarade membre du Comité central (du All African People’s Revolutionary Party) toujours dit et je le répète, que notre Maison blanche se trouve dans le Harlem noir. [Applaudissements prolongés]

Ils sont nombreux ceux qui considèrent que Harlem est un dépotoir. Ils sont nombreux ceux qui considèrent que Harlem est fait pour étouffer. Mais nous sommes aussi nombreux, nous qui pensons que Harlem donnera à l’âme africaine toute sa dimension. [Applaudissements] En tant qu’Africains nous sommes nombreux et très nombreux nous devons comprendre que notre existence doit être vouée à lutter pour la réhabilitation de l’homme africain. Nous devons mener le combat qui nous soustraira à la domination des autres hommes et à leur oppression.

Certains Noirs ont peur et ils préfèrent s’inféoder aux Blancs. Il faut les dénoncer, il faut les combattre. Nous devons être fiers d’être Noirs. [Applaudissements prolongés] Souvenez-vous, il y a beaucoup de ces hommes politiques qui ne pensent aux Noirs qu’à la veille des élections. [Applaudissements prolongés] Nous devons être Noirs avec les Noirs, le jour comme la nuit.

Mais nous comprenons que notre lutte est un appel à la construction. Nous ne demandons pas que le monde soit construit uniquement pour les Noirs et contre les autres hommes. Nous voulons en tant que Noirs apprendre aux autres hommes à s’aimer entre eux. Malgré leur méchanceté contre nous, nous saurons résister et ensuite leur enseigner ce que c’est que la solidarité. Nous savons également qu’il nous faut être organisés et déterminés. [Applaudissements] Nos frères sont en Afrique du Sud, ils doivent être libérés. [Applaudissements prolongés]

L’année dernière j’ai rencontré Maurice Bishop [le Premier ministre de Grenade]. Nous avons discuté longuement. Nous nous sommes donnés mutuellement des conseils. Quand je suis rentré dans mon pays j’ai été arrêté par l’impérialisme. J’ai pensé à Maurice Bishop. Quelque temps après j’ai pu être délivré de prison grâce à la mobilisation de la population. J’ai pensé encore à Maurice Bishop. J’ai préparé une lettre pour lui. Je n’ai pas eu l’occasion de la lui envoyer. Là encore à cause de l’impérialisme. Alors nous avons compris qu’il faut désormais lutter contre l’impérialisme sans relâche. Si nous ne voulons pas que demain on assassine encore des Maurice Bishop, il faut que nous nous mobilisions dès aujourd’hui. [Applaudissements]

Et c’est pourquoi je veux vous montrer que je suis prêt contre l’impérialisme. [Il tient sa mitraillette dans les airs. Applaudissements prolongés et cris] Et je vous prie de croire que ce n’est pas un jouet. Ce sont des balles réelles. Et lorsque nous tirerons ces balles, ce sera contre l’impérialisme. Ce sera en faveur de tous les hommes noirs. Ce sera en faveur de tous ceux qui souffrent de la domination. Ce sera également en faveur des hommes blancs qui sont de véritables frères pour les Noirs. Et ce sera également en faveur du Ghana parce que le Ghana est un pays-frère.

Vous savez pourquoi avons-nous organisé avec le Ghana les manoeuvres Bold Union ? C’était pour montrer à l’impérialisme de quoi nous sommes capables en Afrique. Beaucoup d’autres États africains préfèrent organiser leurs manoeuvres en accord avec les puissances extérieures. Lorsque nous aurons les prochaines manoeuvres, il faudra qu’il y vienne, qu’il y ait de Harlem des combattants pour participer avec nous. [Cris, applaudissements prolongés]

Notre révolution est symbolisée dans notre drapeau. C’est le nouveau drapeau de notre pays. Notre pays a également changé de nom. Et ce drapeau, vous constaterez qu’il ressemble au drapeau de votre parti. C’est parce que nous aussi nous sommes dans ce parti. C’est parce que nous oeuvrons pour la même cause que ce parti. C’est pourquoi tout naturellement les couleurs de ces deux drapeaux se ressemblent. Et ces couleurs ont la même signification. Nous n’avons pas mis la couleur noire parce que nous sommes en Afrique déjà. [Applaudissements, cris de  « L’impérialisme A bas ! »] Mais vous pouvez considérer que ces deux drapeaux sont égaux.

Vous savez, il est important que chaque jour chacun de vous se souvienne d’une chose. Pendant que nous sommes là en train de discuter, pendant que nous sommes là en train de nous parler entre Africains, il y a des espions qui sont là pour rendre compte demain matin. Nous leur disons qu’ils n’ont pas besoin d’apporter des micros secrets, puisque même si la télévision venait ici nous allions répéter exactement la même chose. [Applaudissements]

Alors, il faut vous dire que nous avons en nous la force et la capacité de combattre l’impérialisme et la seule chose dont vous devez vous souvenir c’est que quand le peuple se met debout, l’impérialisme tremble. [Applaudissements]

J’ai admiré beaucoup les ballets qui ont été exécutés. C’est pourquoi je voudrais vous inviter à la prochaine semaine nationale de la culture qui se déroulera au Burkina Faso au mois de décembre. Vous devez envoyer ne serait-ce qu’un représentant. Je vous invite également au prochain Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou au mois de février. Tous les États africains seront représentés. L’Afrique du sud sera représentée par le mouvement de libération africain. Harlem doit être représenté. [Applaudissements]

Nous ferons tout notre possible pour vous envoyer ici à Harlem des troupes du Burkina Faso pour des exhibitions en faveur de nos frères et de nos soeurs africains qui sont ici. Je vous demande de les encourager, de les soutenir et de leur permettre d’aller dans d’autres villes américaines pour rencontrer d’autres Africains qui sont dans ces villes américaines.

J’ai constaté que vous avez beaucoup d’estime et de respect pour le camarade Jerry John Rawlings, alors nous vous enverrons des pagnes africains qui portent sa photo. Et sur ces pagnes nous avons écrit : “Ghana et Burkina Faso : même combat.” Il faudra porter ces vêtements partout, au bureau, dans la rue, au marché, n’importe où. Soyez fiers de cela, montrez que vous êtes Africains. N’ayez jamais honte d’être des Africains. [Applaudissements]

J’avais dit que je ne serais pas long et avant de terminer je vous demanderai de vous mettre debout parce que demain, lorsque je ferai mon discours aux Nations unies, je parlerai des ghettos, je parlerai de Nelson Mandela qui doit être libéré. [Applaudissements] Je parlerai de l’injustice, je parlerai du racisme, et je parlerai de l’hypocrisie des dirigeants à travers le monde. Je leur dirai que vous et nous, nous tous, nous menons nos combats et qu’ils ont intérêt à faire attention. Parce que vous représentez le peuple, partout où vous êtes debout, l’impérialisme tremble. Et c’est pourquoi je vous invite a répéter «Lorsque le peuple se met debout, l’impérialisme tremble».

[Cris de  « Lorsque le peuple se met debout, l’impérialisme tremble !»] Encore !

[Cris de  « Lorsque le peuple se met debout, l’impérialisme tremble !»] Encore !

[Cris de  « Lorsque le peuple se met debout, l’impérialisme tremble !»] L’impérialisme !

[Cris de  « À bas !»]
L’impérialisme !

[Cris de  « À bas !»]
Le fantochisme !

[Cris de  « À bas !»]
Le racisme !

[Cris de  « À bas !»]
Le sionisme !

[Cris de  « A bas !»]
Le néo-colonialisme !

[Cris de  « A bas !»]
Gloire !

[Cris de  « Au peuple !»]
Dignité !

[Cris de  « Au peuple !»]
Musique !

[Cris de  « Au peuple !»]
Santé !

[Cris de  « Au peuple !»]
Education !

[Cris de  « Au peuple !»]
Pouvoir !

[Cris de  « Au peuple !»]
Tout le pouvoir !

[Cris de  « À bas !»]

La patrie ou la mort, nous vaincrons !
La patrie ou la mort, nous vaincrons !

Merci camarades.

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