Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous les modèles que tous les charlatans de même acabit ont essayé de nous vendre 20 années durant. Il ne saurait y avoir pour nous de salut en dehors de ce refus là. Pas de développement en dehors de cette rupture là. Il faut ranimer la confiance du peuple en lui-même en lui rappelant qu’il a été grand hier et donc, peut-être aujourd’hui et demain. Fonder l’espoir “. Thomas SANKARA

Quinze octobre 1987, qui se souvient qu’il a fait un peu plus froid même sous les tropiques ? Comme si une main glaciale avait étreint nos souffles. Qui remémore le fait que le monde a semblé s’arrêter ? Qui se rappelle le fait que beaucoup sont descendus du train de l’espoir croyant le message mort avec le messager ?

Le quinze octobre 1987, le héros est tombé. Nos vingt ans se sont pétrifiés comme se figeaient nos espoirs.

Etait-il possible que l’Afrique n’ait pas d’autre solution que l’acceptation servile de définitions d’elle-même et de sa destinée par d’autres ? Etait-il possible que la seule possibilité qui nous soit accessible soit celle d’accepter le mépris et l’offense faite à l’Afrique sans réagir ?

Etait-il possible que notre Thomas n’ait été qu’un combattant contre des moulins à vents le temps d’être arrêté ?

Etait-il possible que la funeste et tentaculaire Françafrique ait eu à toujours le dernier mot sur nos destinées d’Afrique ?

Il a soufflé sur nos cœurs un vent paralysant.

Isidore Noël Thomas SANKARA était devenu en quelques années le visage de nos rêves d’Afrique. Orateur exceptionnel il savait nous toucher dans ce que nous avions d’essentiel : notre africanité, notre dignité, notre humanité, notre appartenance pour une partie de la jeunesse à la gente féminine. Nous avions vingt ans et voici qu’un homme nous offrait par son regard, son action et ses mots des lendemains autres que le fait de marcher sur les sentiers largement battus de l’Afrique aux ordres.

Isidore Noël Thomas SANKARA, figure de la liberté, de la dignité, de l’audace, d’une jeunesse autrement. Les François Mitterrand et autres Félix Houphouet Boigny auraient voulu le réduire au rôle du jeune agité utopiste et incontrôlable. Ils auraient voulu que l’on ne voie en lui que cela. Mais voilà, Sankara était porté par un feu qui parlait aux braises de nos désirs de liberté et, en nous se levait un feu pour la terre mère, pour nos nations.

Il est une jeunesse en Afrique, jeunesse d’hier ou d’aujourd’hui qui n’a pas pour ambition de revêtir le costume de l’oncle Tom en singeant l’occident et ses valeurs. Cette jeunesse n’a pas pour fin l’entrée dans les schémas allogènes de la réussite au point de ne plus se soucier des intérêts du pays ou du continent. La force de la jeunesse c’est sa capacité à embrasser avec passion des idéaux élevés. Que communiquons-nous à notre jeunesse, laissons passer le souffle de Thomas.

Thomas Sankara a été une voix quasi prophétique pour réveiller nos esprits en somnolence pour les inviter à repenser l’Afrique autrement et avec espérance. « La plus grande difficulté rencontrée est constituée par l’esprit de néo-colonisé qu’il y a dans ce pays. Nous avons été colonisés par un pays, la France, qui nous a donné certaines habitudes. Et pour nous, réussir dans la vie, avoir le bonheur, c’est essayer de vivre comme en France, comme le plus riche des Français. Si bien que les transformations que nous voulons opérer rencontrent des obstacles, des freins » Thomas Sankara

Oh il ne caressait pas l’auditoire dans le sens du poil. Il lançait des défis par les mots. « Ces aides alimentaires (…) qui installent dans nos esprits (…) ces réflexes de mendiant, d’assisté, nous n’en voulons vraiment plus ! Il faut produire, produire plus parce qu’il est normal que celui qui vous donne à manger vous dicte également ses volontés . » 1ère conférence nationale des CDR, 4 avril 1986.

Les « aînés » africains et autres gouvernants français auraient aimé réduire sa passion et sa fougue en une exaltation de quelque illuminé, mais l’homme avait sur le monde plus qu’une œillade, il avait un regard, une vision.

Il a osé parler de et à l’occident avec fermeté : « Le pillage colonial a décimé nos forêts sans la moindre pensée réparatrice pour nos lendemains ” 1983, Paris, Conférence Internationale sur l’arbre et la forêt.

Il s’est arrogé le droit de dénoncer et de s’attaquer aux fondations de la Françafrique. « Le système néocolonial tremble quand le peuple devenu maître de sa destinée veut rendre sa justice ! » (T. Sankara)

La pieuvre ne pouvait rester inerte elle avait un tentacule prénommé Blaise qui a opportunément oublié que Thomas et lui avaient été amis. Le tentacule osera nier cette amitié après le crime odieux. Thomas est tombé, Compaoré peut régner. Oui mais voilà après la tétanie, après la pétrification, après les colères et autres désespoirs, la voix et le souffle de Thomas éveillent encore et toujours nos esprits. Compaoré et ses comparses gouvernent (si l’on peut dire) des pays, mais ils ne règnent pas sur nos libertés de penser et d’envisager l’Afrique. Thomas et ceux qui l’on précédé ont frayé des chemins de liberté dans nos conscience. Ils ont tué un homme, ils ne l’ont pas vaincu pour autant.

Le message de Thomas Sankara était plus grand que les limites de sa peau, il continue à rappeler aux jeunes et moins jeunes qu’une Afrique autrement est possible. Les meurtriers coupables et ou complices de son assassinat n’ont pas tué le rêve ils en ont différé juste la réalisation. Un homme est mort mais il a semé des pousses d’espoir et par toute l’Afrique se lèvent et se lèveront des femmes et des hommes animés de cette sainte jalousie pour l’Afrique et qu’elle le veuille ou non la pieuvre lâchera prise et ira étendre ses ignobles tentacules ailleurs.

« Tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront ! » disait Thomas Sankara.

Nous sommes des Thomas Sankara en puissance. Pour la cause de l’Afrique panafricaine et libre nous devons laisser passer le souffle qu’il portait.

Respects profonds et reconnaissants à ta mémoire Isidore Noel Thomas SANKARA. Que le souffle qui animait tes combats se ranime avec force ce jour et pour la suite des temps afin que l’Afrique notre Afrique se lève comme un seul homme pour refuser désormais pour refuser toute cession sur les terrains de la liberté et de la dignité.

Aussi imparfait qu’il ait été, sa fougue et ses erreurs ne l’avaient pas changé dans sa passion pour une Afrique libre et digne. Il avait rêvé l’Afrique autrement, le nom de son pays aujourd’hui est un écho de son rêve : le pays des hommes intègres.

Sommes-nous prêts à reprendre le flambeau. Le choc brutal de l’annonce de sa mort est passé, l’Afrique attend. Qu’il ne soit pas mort pour rien, pas plus que Lumumba, Nyobe, Biko et les autres.

Nous appelons des dirigeants sur le modèle de Sankara.

Sa vie, son passage élèvent notre niveau d’exigence quant à nos dirigeants.

A BAS LA FRANCAFRIQUE ! VIVE L’AFRIQUE LIBRE DIGNE ET SOUVERAINE.

Nous sommes Sankara

Nous sommes des héros qui ne demandons qu’à nous lever. Mais nous l’ignorons souvent.

Nous sommes africains.

Nous sommes l’Afrique.

A nous de nous lever et aux héros tombés sur le champ d’honneur de reposer en paix.

Chantal Epée

15/10/2010

2 COMMENTAIRES

  1. “Nous sommes Sankara” de Chantal Epée
    Salut,
    Je viens de lire sans interet votre article. Je voudrais aller droit au but et j’y vais. La liberté semble se définir comme un cri qui décrie. Une liberté qui déclame ondule à partir de l’aussi. Le paradoxe ici est d’être en adresse avec celui dont on proclame l’urgence de rupture. Cette liberté par le cri prend comme protagoniste ce qui ne devrait pas être. Par le correction, aucune mue du falsifié. Nous ne pouvons donc pas être Sankara, c’était un CRI, il nous faut nous hisser sur ces épaules pour voir plus loin et devenir parole. Ce n’est pas un défi ou une ligique par le pis de notre existence. Notre pis fut d’être à la mesure du poussiéreux et par là, nous nous sommes zombifiés. Notre heurt fut et demeure l’heure du non-être. Refaire lavérité par son entorse n’est pas structurant. Notre destructuration ontologique consiste précisement dans la vision de l’autre non pas tant comme mon hospice mais essentiellement comme le lieu hostile qui n’ecorche nullement nos existences, mais les fragilise en leur charpente. Qu’est-il né de cela? Du vent et de ce vent, nous nous sommes vampirisés.
    Il faut passer par l’autre rive. Non pas dénoncer par le cri. Il est convient aujourd’hui de porter à la parole ce que nous sommes et pas et ne deviendrons jamais. Rompre l’unité à son origine, c’est aussi, c’est aussi sequestrer tout horizon possible de la rencontre. Le mal est l’irreparable, il l’injustifiable à sa racine. Pour autant devrions-nous nous convaincre que si personne ne le commence, tous, nous le continuons. Qu’un africain soit capable de détourner des deniers publics,de prendre une kalasnikov qui n’a d’avenir prospère que la liquidation de son frère en humanité, voilà notre incapable capacité.

    Prendre la parole, c’est respirer par-delà les ghettos et refertiliser un imaginaire meta-sectaire. L’homme n’est pas une idée, nous n’en sommes pas une. Point de connaissance qui ne le mette à nu et vide de son pouvoir être. Panser l’Afrique devient assumer ses énergies, naviguer dans la mer de ses possiblités infinies. L’Afrique est à la mesure du monde, l’enclore dans la continentalité est la décheoir. Au risque de manquer à notre vocation qui est pro-vocation d’humain, il nous faut conjuguer le verbe-monde par nos sources certainement. La fidélité à nos ancêtres est une surabondance débordante et créatrice. Commencer les temps nouveaux, cette serie d’évènements insoupçonnés parce qu’inedits different l’avenir du futur. Le futur s’annonce dans le present, l’avenir est l’irruption du radicalement neuf qui brise nos schémas conceptuels.L’Afrique est la grande u-topie du monde. On la connait mieux, elle se comprend par l’autrement imprevisibilité.

  2. “Nous sommes Sankara” de Chantal Epée
    Ton message doit avoir un echo tellement violent aux oreilles des porteurs des pseudos modeles dont nous refusons désormais l’appartenance et auxquels nous ne saurons nous pliés .Pour celà ,il me semble important qu’en chacun de nous , se fasse la revolte du Thomas Sankara qui sommeille.

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