Sankara suscite de nouvelles initiatives

Figure emblématique de l’altermondialisme, Susan Georges était ce dimanche 10 octobre dans le sud de la France pour inaugurer un nouveau concept dans un lieu en pleine renaissance, arborant les couleurs du Burkina Faso et baptisé Sankara. D’abord un simple maquis, le bâtiment situé au coeur de la ville basque de Bayonne a été créé il y a quelques années pour “rendre hommage à un révolutionnaire intègre”, clamaient ses concepteurs. Lieu de rencontres, de palabres et de concerts, le “bar” s’est rapidement retrouvé au centre d’une dynamique plus large, écologique et sociale.

Fidèle aux principes qui ont prévalus lors de sa création, le café Sankara de Bayonne est resté un carrefour des initiatives progressistes jusqu’à ce jour d’octobre où, en prélude à la célébration de l’assassinat de Thomas Sankara, l’écrivaine Susan Georges inaugurait un “centre de prêt écologique et social”. Le principe en est simple et le prestigieux dirigeant révolutionnaire n’en aurait sans doute pas renié les principes : il s’agit, pour les habitants de cette agglomération de 100 000 habitants, de bénéficier d’un centre de prêt d’objets, de façon coopérative, histoire de mutualiser les moyens individuels à une échelle collective. Dans une société européenne qui incite à la surconsommation, il est pourtant vain que chaque foyer possède des outils onéreux, souvent pour un usage unique, du matériel culinaire ou de loisir qui ne sert que quelque fois par an. En mettant en commun perceuses, visseuses électriques, matériel de camping ou de ski, plaques à fondues, les habitants de Bayonne font plus que vider leurs appartements de ce genre d’encombrements. Ils contribuent, de fait, à réduire une consommation bien inutile en s’inscrivant dans une démarche moins productiviste et plus écologique. L’intérêt social est également évident puisque tout le monde n’a pas les moyens d’investir dans du matériel pointu, surtout pour un usage restreint.

Cette expérimentation locale est également préconisée pour appréhender des solutions globale, au réchauffement climatique bien sûr, et à l’épuisement annoncé des ressources de la planète, dont nous consommons une fois et demie les capacités selon les dernières études. Gérer ses ressources de manière raisonnée et mutualiser les moyens équitablement entre les plus nantis et les plus pauvres, voilà qui s’inscrit dans l’esprit de la révolution burkinabè et de ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui le sankarisme. La présidente d’honneur d’Attac, Susane Georges, n’en pense pas moins en défendant l’action citoyenne et en inscrivant son action militante dans cette autre mondialisation, raisonnée et sociale. L’auteure de Comment meurt l’autre moitié du monde, citoyenne française et américaine, figure majeure de l’altermondialisme, a bien entendu élargi l’initiative du Sankara à des horizons plus larges, souhaitant que cette initiative basque puisse servir également, en résonance avec son nom, au continent africain. “Pourquoi ne pas pousser cette idée et créer un système de mutualisation avec les pays africains ?” A-t-elle questionné… Une interrogation qui promet de nourrir une réflexion, a rassuré Fabien, le gérant des lieux. Dans cette attente, le nom de Sankara suscitait également un retour au passé et à la mémoire dans la capitale du Pays Basque avec une journée et une nuit de festivité consacrées à sa mémoire ce 15 octobre.

Rémi Rivière

Source : Bendré N° 615 du 16 octobre 2010 voir à http://www.journalbendre.net/spip.php?article3600