Voilà un discours jusqu’ici totalement inédit jusqu’ici, pourtant parmi les fondamentaux prononcés par Thomas Sankara.

Le discours de la première conférence nationale des CDR, s’attaquait aux insuffisances des CDR à grand renfort de détails et d’exemples. Thomas Sankara se lançait alors en effet dans une critique sans concession des CDR, jamais égalée jusqu’ici, non sans humour, mais avec force précisions, démontrant sa connaissance précise de la réalité sur le terrain.

Le discours ci-dessous, tout aussi important, fut prononcé à l’issue de la clôture de la deuxième conférence nationales des CDR à Dédougou.

Il commence par une description détaillée de l’impérialisme, qu’il accompagne de nombreux exemples que connaissent les Burkinabè dans leur pays. Belle illustration des qualités pédagogiques de Thomas Sankara. Le film Capitaine Thomas Sankara de Christophe Cupelin a très largement popularisé la phrase suivante “On me demande où se trouve l’impérialisme ; regardez dans vos assiettes quand vous mangez. Les grains de riz, de maïs, de mils importés, c’est ça l’impérialisme, n’allez pas plus loin“, jusqu’à en faire, pour nombre de spectateurs peu politisés, la définition de l’impérialisme, avec la complicité, reconnaissons-le, de Thomas Sankara lui-même.

Eh bien, justement, Thomas Sankara va beaucoup plus loin, rendant le concept d’impérialisme bien plus perceptible. Et nous conseillons bien sur ce discours qui décrit l’impérialisme en détail par les différentes façons dont il intervient et s’empare des mentalités comme des économies devenues dépendantes des pays occidentaux. Et le leader de la révolution burkinabè s’attarde longuement pour mieux rebondir sur la nécessité vitale de l’indépendance économique, qui ne peut passer que par la construction d’une économie autocentrée, dont l’objectif est de produire et de consommer burkinabè. Et bien sur il fustige les bourgeois qui ne consomment que des biens d’importation. Mais aussi les petits bourgeois et autres pseudo révolutionnaires qui réfutent ce mot d’ordre le jugeant irréaliste sous prétexte que cela demanderait trop d’effort aux consommateurs burkinabè.

Ce discours a été prononcé en avril 1987. Thomas Sankara a lancé la discussion sur l’élargissement des forces politiques parties prenantes de la Révolution, et se heurtent à ceux qui s’y opposent. Ceux-là même qui, derrière un purisme révolutionnaire, se refusent aux efforts nécessaires que demandent la consommation des produits locaux. Ce sont eux qui font faire alliance avec Blaise Compaoré pour mettre fin à la Révolution.

Ce discours apparait aussi, avec le recul, comme un plaidoyer, adressé aux forces les plus engagées dans le processus révolutionnaire que sont les CDR, pour livrer le combat économique, finalement le plus efficace contre l`impérialisme, à savoir produire et consommer burkinabè.

Nous nous permettons donc de classer ce discours parmi les discours fondamentaux de Thomas Sankara au côté du discours d’Orientation politique (dont il n’est pas l’auteur mais auquel il a souscrit), celui consacré à la libération de la femme, celui prononcé devant l’assemblée générale de l’ONU, celui consacré à la dette, et d’autres encore, nous ne pouvons tous les citer.

Nous connaissions l’existence de ce discours et l’avions longuement recherché sollicitant des amis au Burkina, d’autres en France. Nous voulions notamment qu’il soit intégré à l’ouvrage La Liberté contre le destin, discours de Thomas Sankara. Nous avions du nous résoudre à abandonner cette idée faute de l’avoir récupéré à temps malgré de nombreuses recherches.

Et c’est finalement un jeune admirateur de Thomas Sankara, que nous connaissons depuis longtemps, tout autant passionné que nous par son histoire et la révolution burkinabè qui nous l’a fait passé sous forme de photos d’une feuille dactylographiée. Il s’agit d’Ulysse Perez. Qu’il soit très chaleureusement remercié. Il avait bien très largement entamé la retranscription électronique, que nous avons terminée avec quelques membres de l’équipe du site thomassankara.net.

Ajoutons que le nombre de personnes se lançant dans des recherches augmentant considérablement plusieurs personnes nous ont gentiment confié d’autres discours inédits, que nous vous livrons petit à petit. Eh oui, le recueil des discours et autres écrits de Thomas Sankara ne semble pas terminé.

Bonne lecture à tous, merci encore à Ulysse Perez et aux membres de l’équipe du site.

Bruno Jaffré


Page dactylographiée reçcu, notre source du discours de cloture de Thomas Sankara à la 2ème conférence nationale des CDR
Page dactylographiée reçue, notre source du discours de cloture de Thomas Sankara à la 2ème conférence nationale des CDR

Camarades Militantes et Militants de la Révolution Démocratique et Populaire

Camarades militants de la Révolution soeur du Ghana

Chers amis invités

A cet instant précis, je ne voudrais pas vous prononcer  un discours. Tout a été dit, et bien dit. Il reste à faire et à bien faire. (Applaudissements).

Je voudrais tout d’abord remercier notre frère du Ghana, le Lieutenant-Colonel ASSASSI dont la brillante intervention est pour nous le signe, l’indication sûre, que la Révolution du Burkina Faso s’est adossée à une révolution sûre, la révolution du GHANA. Le Camarade ASSASSI, tout à l’heure, a souhaité que, quel que soit le temps que le Camarade Rawlings et moi-même pourrons prendre pour réussir cette fusion dont nous avons tous besoin, que déjà au niveau des CDR du Ghana et du Burkina Faso cette intégration se réalise. Le Camarade ASSASSI a vu juste, et je voudrais simplement l’assurer qu’avant qu’il ne retourne au Ghana, pour notre part, nous allons proclamer l’intégration entre les CDR du Ghana et ceux du Burkina Faso (applaudissements).

Est-ce que les représentants des CDR du Burkina Faso ici présents sont-ils d’accord pour leur intégration avec les CDR du Ghana ? Oui ! (répond l’assistance).

Est-ce que vous êtes d’accord ? Oui ou Non ? Oui (répond l’assistance).

Est-ce que vous êtes d’accord oui ou non ? Oui (répond L’assistance).

Alors, Camarade ASSASSI, vous emporterez avec vous en plus de ce que vous avez entendu, cet engagement que nous venons de prendre. En retour, nous savons que celui du Ghana ne tardera pas à venir.

Camarades ! Nous avons déjà eu l’honneur, le bonheur, le plaisir d’organiser notre Première Conférence Nationale des CDR. C’était à OUAGADOUGOU. Cette conférence avait été l’occasion pour nous de faire le bilan de l’exercice du pouvoir populaire.

Cette conférence avait été l’occasion pour nous de stigmatiser un certain nombre de comportements erronés, de déviations. Cette conférence avait été l’occasion pour nous de faire l’introspection l’autocritique des CDR, la critique entre révolutionnaires.

A l’occasion, je vous avais parlé de l’attitude, du comportement juste du bon militant CDR. J’avais peint et dépeint aussi des militants qui n’avaient pas fait honneur à notre révolution. Je sais aussi qu’à l’époque la réaction et les opportunistes infiltrés dans nos rangs s’étaient répandus en propos diffamatoires pour laisser croire que le glas avait sonné pour les CDR, parce-que même le Président du Faso avait lancé des attaques directes contre les CDR !

C’était mal connaître la révolution avec ses exigences de critique et d’autocritique. Nous sommes tous des militants CDR. Une critique contre les CDR est une critique contre nous tous, Et lorsque nous critiquons les CDR, le Secrétariat Général National des CDR, la première question que nous devons nous poser, c’est de savoir ce que nous avons fait en tant que militants CDR, pour que les Comités de Défense de la Révolution soient à la hauteur de nos exigences. C’est dire que c’est nous tous ensemble qui faisons la vie des CDR. Nous sommes responsables des erreurs et des échecs des CDR. C’est dire aussi que seuls les révolutionnaires ont l’audace et la capacité de se critiquer comme nous le faisons. Certes, la critique a été entendue. Certes des leçons ont été tirées et des améliorations ont été constatées et méritent que nous félicitions les Comités de Défense de la Révolution, (applaudissements). Les plus malheureux sont les réactionnaires patentés au Burkina Faso qui avaient tenu des propos de ce genre : « les CDR ne sont que des oisifs. Les CDR ne sont que des bandits regroupés. Les CDR ne sont que des enfants irresponsables et manipulés. Les CDR ne constituent aucune base sociale ».

Si les CDR sont des oisifs, nous leur donnerons le travail que les réactionnaires occupent (applaudissements). Si les CDR sont des bandits, nous leur confierons alors la mission de retrouver les bandits puisqu’ils les connaissent mieux que quiconque. Si les CDR sont des enfants irresponsables, alors nous leur donnerons le droit d’exiger tout ce qu’un enfant peut exiger d’une grande personne.

Tout en réalisant avec détermination des transformations nécessaires au niveau de la phase d’explication, d’organisation et de discipline, nous devons être capables de regarder devant nous. C’est pourquoi, sans avoir abandonné le combat pour la discipline au sein de nos Comités de Défense de la Révolution, il nous est apparu indispensable d’ouvrir les horizons sur d’autres préoccupations complémentaires et nécessaires.

Il y a quelques temps dans notre pays, parler de l’impérialisme c’était se faire qualifier d’étudiant au sens péjoratif. On disait que ces mots en « isme » n’étaient que l’apanage, le verbiage des étudiants, des intellectuels irresponsables. L’on a voulu nous faire croire que l’impérialisme n’existait que dans les esprits qui avaient voulu créer cet impérialisme.

Camarades, l’impérialisme existe bel et bien. L’impérialisme est un animal qui a des crocs et des griffes. L’impérialisme est un animal qui est méchant ! L’impérialisme est un animal puant !

Le 26 mars 1983 à la Place du 3 Janvier d’alors, place de la Révolution d’aujourd’hui, ensemble nous avons osé dénoncer cet impérialisme. Cette date est importante et nous devons nous en souvenir chaque fois que nous allons affronter l’impérialisme. En effet, c’est le 26 Mars qu’ensemble nous avons secoué l’impérialisme Nous l’avons dérangé, nous l’avons réveillé. Il a rugi et il a chargé ! Nous avons alors tous compris que l’impérialisme était capable du plus grand cynisme, et des plus grandes attaques. A cette occasion, nous avions dit que « lorsque le peuple se met débout, l’impérialisme tremble ». Nous avions vu juste parce que quelques semaines après l’impérialisme dans sa hargne avait développé des assauts qui nous ont meurtris. En effet, après le 17 Mai 1983, notre peuple, debout avait fait trembler l’impérialisme Aujourd’hui encore, l’impérialisme tremble réellement. C’est parce que l’impérialisme savait que nous devions être conscients que celui qui n’a pas le courage d’affronter les abeilles pour prendre le miel doit éviter de déranger la ruche (applaudissements).

Nous entrons dans une phase où plus personne ne nous fera de cadeau. Nous entrons dans une phase où nos ennemis d’ici et  d’ailleurs ont réalisé que leurs armes traditionnelles sont inopérantes contre la Révolution au Burkina Faso. L’on prédit la chute immédiate de la Révolution à cause de son inexpérience. Deux semaines après le 4 Août l’on avait prédit que la révolution devait tomber. L’on avait dit que trois semaines après, des mercenaires devaient débarquer. Vous vous en souvenez. L’on avait dit un mois après que les apatrides réorganisés allaient occuper le pays. Trois mois après, l’on avait dit que l’on avait prédit que, grâce à la bouche de charlatans et d’autres magiciens, la révolution ne verrait pas les prochaines pluies. L’on avait prédit également que les dirigeants de la révolution allaient être atteints de maladies incurables et devaient en mourir. L’on avait raconté beaucoup de choses sur la révolution. Il ne se passait pas de semaine sans que nos ennemis ne colportent des rumeurs de ce genre. Tout avait été dit. Tout a été essayé. Des journaux ont écrit contre le Burkina dans le but de saper le moral des dirigeants et de les affaiblir.  Tout a été dit et prédit. Mais la révolution continue de marcher victorieusement (applaudissements).

L’impérialisme est un mauvais élève. Il apprend à retardement. L’impérialisme est capable des plus grandes bassesses. Il n’a point de cœur, et les discours sentimentalistes n’ont aucune prise sur l’impérialisme. C’est pourquoi nous devons comprendre que l’impérialisme va développer dès maintenant une nouvelle stratégie. Étant des hommes, nous avons besoin d’un certain nombre de biens et de nourriture pour vivre. Et, ayant appris à consommer ce qui vient de l’extérieur, l’impérialisme cherchera à nous affamer pour mieux nous affaiblir. Le combat est donc devenu un combat économique. La lutte anti-impérialiste est de manière de plus en plus évidente une lutte économique. Le discours anti-impérialiste sincère doit devenir un comportement anti-impérialiste conséquent. Il nous faut maintenant des actes. Nos discours ont été utiles.

Ils doivent être étayés maintenant par des actes anti-impérialistes. C’est pourquoi il importe que nous nous souvenions chaque fois de l’hymne de la victoire, le DITANYE, Il nous enseigne que, “Contre la férule humiliante il y a déjà mille an, la rapacité venue de loin les asservir il y a cent ans, contre la cynique malice métamorphosée en néocolonialisme et ses petits servants locaux“. C’est dire que nous devons comprendre qu’il y a longtemps, très longtemps dans la nuit des temps, des hommes exploitaient, opprimaient des hommes dans cet espace sur la base d’un système arriéré de type féodal. C’est dire que nous devons comprendre qu’il y a à peine un centenaire, des hommes étaient venus de loin pour nous asservir, pour nous exploiter, pour nous dominer. C’est dire aussi qu’hier seulement des hommes d’ici servaient le colonialisme et avaient instaurés dans notre pays le règne du néocolonialisme. Nous devons avoir cela dans la conscience en permanence comme indication, comme souvenir. C’est pourquoi, notre lutte doit être permanente. Nécessairement victorieuse, elle doit développer une intelligence révolutionnaire, créatrice de solutions à de problèmes concrets qui se posent à nous.

Depuis des semaines, des mois, vous vous êtes organisés à la base pour débattre de ce thème important de la Deuxième Conférence Nationale des CDR, sur une économie nationale indépendante. A la base des discussions se sont menées, notre école de démocratie s’est trouvée renforcée et améliorée. Puis démocratiquement, vous avez été choisis pour venir représenter vos militants de base à DEDOUGOU, Pendant cinq jours, venus des 30 provinces de notre Faso bien aimé, ensemble vous avez discuté, échangé vos points de vue. A voir une telle assemblée, l’on ne peut qu’être ému ! Ému parce que jamais notre pays n’avait connu autant de démocratie. Jamais notre pays n’avait connu un cercle où la volonté, le point de vue, les avis du peuple pouvaient s’exprimer avec autant de liberté, de franchise et de courage (applaudissements).

Même à l’époque où des gens étaient sélectionnés pour discuter, payés pour parler dans une assemblée nationale, l’on n’avait pas posé les problèmes du peuple avec autant de franchise que maintenant.

Haute Volta. Ouagadougou. Le 06/08/1983 Manifestation de soutien au CNR. Traduction de la banderole : "Le CDR de Googa (le nom d’une localité?) suit de toute sa force la volonté du CNR"
Haute Volta. Ouagadougou. Le 06/08/1983
Credit:Archives Jeune Afrique-REA

Souvenons-nous là-bas les questeurs et autres requetteurs se préoccupaient beaucoup plus de la comptabilité des perdiems que des décisions à prendre en faveur du peuple. Évidemment, les temps ont changé. Ce que nous faisons aujourd’hui sera pris au sérieux. Quand l’Assemblée Nationale de la Haute Volta se réunissait, l’impérialisme ne tremblait pas. L’impérialisme était à l’aise, parce que l’Assemblée Nationale voltaïque ne pouvait rien contre 1’impérialisme. Elle était surtout préoccupée à veiller sur les intérêts de l’impérialisme en Haute Volta, Aujourd’hui nos réunions inquiètent et les regards sont tournés vers nous. Chaque jour l’on décortique chaque mot que nous prononçons.

A l’heure où je vous parle ils m’entendent parce qu’ils nous suivent (applaudissements).

A l’heure où vous, applaudissez, ils s’inquiètent parce qu’ils savent que vous êtes débout (applaudissements).

Mais puisque nous sommes là pour le bonheur du peuple burkinabé, il ne serait pas normal de nous préoccuper outre mesure de ce que pensent et veulent les autres. Nous n’avons rien contre personne. Nous avons tout pour le Burkina.

Une réflexion m’avait beaucoup inquiété, mais elle était en même temps un grand enseignement pour moi. En effet, notre Ministre des Ressources Financières rentrant d’une conférence m’avait rapporté que ses collègues africains, lui demandaient comment il réussissait à payer régulièrement les salaires des fonctionnaires sans prendre de prêts. Nous avons compris que c’est sur ce point qu’on veut nous tenir un jour. J’avais reçu un homme brillant que j’admire beaucoup. Au cours de notre conversation, j’avais été obligé de lui dire : « Monsieur, le Burkina Faso ne refusera rien qui pourra l’aider à améliorer son sort, à améliorer le sort de ses masses populaires. Mais le Burkina Faso a cessé d’être demandeur. Vous êtes habillé en tergal et moi je suis habillé en Faso Dan Fani, la différence est faite. Dans tous les villages du Burkina Faso, l’on sait cultiver le coton. Dans tous les villages du Burkina Faso, des femmes savent filer le coton, des hommes savent tisser ce fil en pagnes, et d’autres hommes savent coudre ces pagnes en vêtements. Par conséquent, je n’ai aucune inquiétude ». Notre conversation s’est arrêtée parce que nous nous sommes très bien compris.

La lutte économique est une exigence. Nous devons comprendre que les huit millions de Burkinabè que nous sommes, si nous intéressons des pays dans le monde, ce n’est point par charité, ce n’est point par générosité, c’est bien parce dans la poche de chacun, se trouve un centime à prendre. Et cela ferait au moins 8 millions de centimes à prendre. Nous intéressons des hommes dans le monde, ce n’est pas seulement les vendeurs des Euro-building, ce n’est pas seulement ceux qui viennent nous promettre cent milliards de dollars américains sans taux d’intérêts mobilisables immédiatement. Nous intéressons d’autres hommes beaucoup plus raffinés. Ces derniers savent qu’ils ont réussi à faire de nous 3 millions de consommateurs de leurs produits. Chaque fois qu’on fabrique une voiture dans le monde, on pense aussi au Burkina Faso. Chaque fois qu’une moto est fabriquée dans le monde, on pense au Burkina Faso. Chaque fois qu’on mettait du champagne en bouteilles, on pensait au Burkina Faso. Chaque fois qu’un produit de consommation est fabriqué dans le monde, on pense également au Burkina Faso. C’est pourquoi, on a taillé la publicité et 1e marketing spécialement pour le Burkina Faso aussi. Nous avons été comme des bêtes auxquelles on a inculqué des réflexes conditionnés.

Prenons l’exemple du pain. Le pain n’est pas d’origine burkinabè, ni voltaïque. Le pain est venu de très loin. Le pain de blé n’est pas de chez nous. Lorsque le pain était introduit chez nous, il y a quelques années, vous vous en souvenez tous, sauf nos camarades pionniers, il était une friandise. Lorsque l’on achetait du pain et l’on en donnait un morceau à son meilleur ami, l’on réservait la croûte pour plus tard. C’était un bien rare, une friandise qu’on essayait d’accommoder avec tout. Ainsi, l’on a vu au Burkina Faso des hommes manger du pain avec la sardine bien sûr, avec du fromage ou du beurre, avec de l’huile, avec des sauces. On mangeait également du pain importé avec de la sauce des feuilles de baobab, avec de la pâte d’arachides, du soumbala même, excentricité des excentricités (applaudissements).

Le pain était vraiment étranger chez nous. Il n’était simplement qu’une friandise. Aujourd’hui, le pain nous a pénétrés à tel enseigne que lorsque nous disons que tu gagneras ton pain à la sueur de ton front, quelle que soit la quantité de maïs, de mil, ou de riz récoltée l’on estime qu’on n’a pas réussi dès lors que le pain de blé manque.  C’est cela la réalité. Et ailleurs, des hommes disent qu’au Burkina Faso, l’achat de leur blé est garanti.

C’est avec quelques tessons de bouteilles que nos parents ont pourchassé d’autres parents pour en faire des esclaves. Ce n’est pas le blanc qui a attrapé le Noir pour le mettre dans le bateau comme esclave. C’est le Noir qui a attrapé le Noir pour le remettre au Blanc, Ne l’oublions jamais, et c’était simplement pour la pacotille. Voyez jusqu’à quel point, par une habileté dans la consommation, on était  arrivé à opposer des Africains à des Africains. A l’Ile de Gorée, par où transitaient nos aïeux s’en allant vers l’Alabama ou quelque part dans les Caraïbes comme esclaves, je suis persuadé que là-bas, les Noirs étaient tristes sûrement à cause des négriers blancs qui les emmenaient loin en esclaves.  Mais ils étaient plus tristes à cause de leurs parents qui les pourchassaient, les attrapaient et les vendaient à des blancs contre du rhum, des miroirs, des tessons de bouteilles et autres pacotilles. C’est quand même triste de penser que des grands hommes comme les Martin Luther King sont issus de parents qui ont été échangés contre quelques gouttes de rhum. Cuba nous a vengés en produisant du rhum pour l’exportation.

C’est également triste de savoir qu’au temps de l’Armée Française, la dépravation des mœurs, la transformation des habitudes sociales avaient disloqué des cellules familiales. Des femmes de chez nous étaient devenues des bêtes de plaisir de petits militaires français colonialistes. Il n’y a pas très longtemps, l’on parlait, à Bobo-Dioulasso du Bar Normandie, du Lion d’Or et que sais-je encore ! C’était des créations, des habitudes de consommation qui ont fait de telle sorte que des hommes se sont déplacés d’un type de civilisation vers un autre type de civilisation. Et l’on dit qu’on nous apportait la civilisation. En effet, Camarades, on nous apportait la « siphilisation ».

Qui nous a apporté ces maladies sexuellement transmissibles si ce ne sont pas eux ? Aujourd’hui, on nous-parle du Sida. Le Sida, n’est rien d’autre que les conséquences de ces désordres et perversions. Le Sida, c’est la maladie du riche. Le pauvre n’a pas le sida. Le Sida, c’est la maladie de ceux qui veulent acheter les femmes. Aujourd’hui ils veulent une femme blanche demain, ils veulent une femme noire. Après-demain, ils veulent une femme petite. Le lendemain, ils veulent une femme grande. Les exploiteurs, les riches de là-bas qui ont cette maladie et ont honte disent que le Sida vient d’Afrique, Le Sida ne vient pas d’Afrique. Le Sida vient de là-bas. Et tout Africain qui a le Sida est un Africain colonisé. Le sida est signe, de domination culturelle.

L’impérialisme continue à nous exploiter. Nous nous sommes laissé faire. Il faut que nous résistions. Il nous faut redresser la tête et continuer d’évoluer pour nous, et non plus être des asservis. Au Burkina Faso, nous produisons des poulets, des pintades, es œufs, mais nous importons chaque jour des œufs. Dans les supermarchés de  Ouagadougou, l’on prend soin de vous dire : « Ça, c’est la viande du pays. Ça c’est la viande locale ». Et quand vous demandez « et cette viande là ? » « Elle vient de très loin, elle vient de France. » Pourtant en France, le peuple français est contre ces produits-là, parce qu’ils sont artificiels et peuvent avoir des conséquences néfastes sur la santé des consommateurs. Donc, si nous écoutons le peuple français qui nous aime et que nous aimons bien, nous avons la meilleure viande. Pourquoi donc l’on veut nous faire consommer de la viande venue de là-bas ?

jpg/thomas_sankara.jpgVous vous souvenez que chez nous, la fête de Noël était l’occasion pour faire venir de France des sapins. Si c’était pour protéger la végétation burkinabé et déboiser celle de là-bas, tant mieux!  Combien d’entre nous ici ont déjà pris un avion ? Mais, il y a des branches qu’on faisait voyager depuis Paris jusqu’à OUAGADOUGOU. Tout cela, c’est de la caporalisation. C’est pourquoi, le 4 Août 1986, je vous invitais à vous blinder contre les agressions culturelles. Tant que nous n’allons pas nous protéger contre les agressions culturelles, nous serons toujours à la merci des autres. Un chef d’État que je respecte beaucoup m’avait dit ceci ! « Un de mes grands soucis est que mon pays est arrosé par les images venant des télévisions voisines. Et j’ai beau procédé à l’éducation politique de mes compatriotes, le lendemain les télévisions voisines leurs transforment encore l’esprit. C’est dire qu’à la limite, si je pouvais dresser un mur pour protéger mon pays, j’allais le faire ». Il a raison. Au Burkina, ceci, quelle que soit la qualité de la décision qui sera prise, les gens attendent RFI ou Africa N°1 pour savoir si c’est bien ou pas bien.

Quand ces stations étrangères disent que les dirigeants Burkinabè ont pris une décision qui n’est pas appréciée, des Burkinabè enchaînent pour dire : « nos dirigeants se précipitent. Les militants de base n’ont pas été consultés. Nous n’avons pas été associés ». Par contre, lorsque RFI dit que le Burkina Faso est un pays Africain qui cherche une voie pour se développer, des gens bombent la poitrine pour dire : « Comment, nous sommes là ? » Il faudrait savoir si le bureau politique ou le Comité Central se trouve à Paris, à Libreville, à Londres ou ailleurs. Je n’ai absolument rien contre ces stations de radiodiffusion. Je veux simplement déplorer le fait que nous y sommes attachés, que nous manquons de contrôle au point d’aller ailleurs chercher la sanction de ce que nous faisons chez nous. Il y a beaucoup à dire sur nos déviations.

L’impérialisme a compris que nous faisons des discours pour des transformations qualitatives. L’impérialisme cherchera à nous rationner les produits, à nous affamer, à nous mettre à genoux. Ne soyons pas surpris quand il va manquer de temps en temps de gaz, de l’essence, et que sais-je encore. L’on joue sur les prix, l’on joue également sur les délais de livraison. Prenons un exemple, la Bataille du Rail. Elle avance mais elle n’avance pas comme nous le souhaitons non pas qu’il manque de bras ici. Je suis sûr que s’il ne tenait qu’à vous, vous aurez pris les rails sous les bras, sur la tête pour courir en direction de Tambao. La bataille du rail n’avance pas, parce qu’il y a des pressions çà et là pour que les rails ne soient pas livrés à temps, pour que nous n’enregistrions pas une victoire de plus.

L’impérialisme est capable de tout cela, L’impérialisme sabote souvent nos commandes des pièces importantes. L’impérialisme essaie, chaque jour de poser des conditions draconiennes. Et nos projets n’avancent pas à la vitesse souhaitée, parce qu’on ne veut pas que nous gagnions des victoires. Ainsi, ils sont très malheureux quand nous annonçons que bientôt il y aura un meeting des orpailleurs à Ouagadougou.

A Dori il y a de l’or. Depuis longtemps, il y a de l’or à Gaoua. De Banfora à Fada N’Gourma, il y a de l’or. Il jaillit partout de l’or au Burkina (applaudissements).

Quand les suppôts locaux de 1’impérialisme arrivent à Ouagadougou, ils ne sont pas contents par jalousie, ils ont des pincements au cœur. Ils ne sont pas contents, même quand ils nous disent que nous avons fait du bon travail. Vous  savez, quand on est obligé de féliciter l’enfant du voisin alors que son propre enfant ou l’enfant qu’on aime bien a mal travaillé, on ne le fait que du bout des lèvres.

L’impérialisme vient nous féliciter et profère des menaces contre ceux qu’il aide et épaule grassement. « Vous, on vous donne les moyens, et vous êtes incapables de faire ceci ou cela, prenez l’exemple sur OUAGADOUGOU (applaudissements) ». Cela est une réalité ! 0n n’attaque pas le Burkina Faso parce qu’il a commis des fautes. Non ! Si le Burkina Faso était un pays médiocre, si le Burkina Faso était un pays qui sombrait dans la misère, dans le découragement, personne ne nous aurait attaqués (applaudissements).

Par contre, chaque fois que nous gagnons une victoire, c’est un ennemi de plus que nous dressons contre nous. Alors, on organise une campagne pour dire que le Burkina Faso prépare un complot contre tel ou tel pays. Vous avez entendu que des commandos s’étaient entraînés au Ghana, étaient venus se perfectionner au Burkina Faso pour aller ensuite attaquer le Togo. Mais comment et pourquoi le Burkina Faso va-t-il soutenir des commandos pour attaquer le Togo qui est un pays frère ? Comment peut-on envoyer une vingtaine d’hommes pour envahir le Togo et prendre le pouvoir ? Si c’est réel, c’est que ce sont les Togolais eux-mêmes qui soutiennent ces hommes? Sinon ils ne peuvent pas. Ce n’est pas sensé. Dans tous les cas, nous avons d’excellentes relations avec le Togo, Nous sommes prêts à rencontrer les dirigeants Togolais ici, au Togo ou ailleurs pour cette question. Mais à condition que le Ghana, accusé aussi soit associé à cette rencontre. Jamais nous ne pouvons discuter de cette question sans la participation du Ghana qui a été accusé au même titre que le Burkina.

J’ai voulu prendre simplement cet exemple pour vous montrer que 1’on cherchera toujours à nous opposer aux autres, à créer des inimitiés autour de nous. Parfois, malheureusement ces inimitiés pourraient avoir prise et nous déranger. Nous n’avons pas honte de le dire, nous n’avons pas peur aussi de le dire. Ce que je vous dis ici, je dirai partout la même chose.

Je ne m’écarte point de notre sujet. Je veux surtout vous faire sentir que nous courrons chaque jour des risques. Et les risques ne cesseront que lorsque nous aurons vaincu l’impérialisme.

L’impérialisme s’inquiète beaucoup. L’impérialisme étant un voleur, je voudrais faire cette comparaison. Lorsqu’un voleur entre chez vous et vole vos biens, si vous ne résistez pas, si vous ne vous opposez pas à lui, si vous n’essayez pas de lui barrer la route, si vous ne tentez pas de récupérer ce qu’il a pris, le voleur vous dira merci ! Il n’y a pas d’affrontement, de combat. On raconte même le cas de quelqu’un pris de frayeur quand un voleur est entré chez lui qui s’est camouflé. Le voleur voulant, accéder à des effets sur une armoire, est monté sur le dos du propriétaire pour prendre ce dont il avait besoin. Ce propriétaire-là n’a pas réagi et le voleur ne lui a rien fait, et il est réparti. Mais chaque fois qu’il vient nous voler quelque chose, si nous ne disons rien, il nous félicite et il repart. Si nous essayons de nous opposer, il y aura coups, blessures et peut-être même mort d’hommes. Il faudrait en être conscient !

La lutte ne sera pas simplement des journaux pour nous dénigrer ou nous attaquer, La lutte liera peut être des bombardements, des invasions, des tentatives d’invasion. Parce que l’exemple du Burkina Faso dérange. Lorsqu’au Burkina Faso nous décidons de porter le FASO DAN FANI, donc d’utiliser localement notre coton, nous dérangeons. Nous sortons du circuit de toute cette industrie qui, dans le monde monopolise l’habillement, le tissu, le textile. Nous devenons indépendants. Nous portons atteinte à des affaires. Ainsi nous faisons perdre un paradis à des hommes d’affaires. Et quand on perd un paradis, on est capable de tout pour la reconquérir. Sans oublier que l’exemple Burkinabè envahit les autres pays de plus en plus autour de nous et plus loin, l’on parle de consommer national. C’est très bien ! Par cette décision, nous voulons libérer les paysans du Burkina Faso, Les paysans et les peuples d’ailleurs seront libérés de cette même façon (applaudissements).

Cette année, la production cotonnière a été de 150,000 tonnes. Une telle quantité n’est absolument rien pour couvrir les besoins nationaux, car actuellement le port de Faso Dan Fani ne touche que 0,17 % de la population burkinabé, même pas 1% actuellement. Cette mesure ne touche pas l’ensemble des fonctionnaires du Burkina, qui ne représentant que 0,3% de la population Burkinabé. Et qu’est-ce que cela sera, quand la mesure touchera 1 %,  2%, 5 % et 10 % de la population ? Il faudra alors cultiver le coton dans tout le Burkina. Le Burkina Faso sera même obligé d’importer du coton d’ailleurs pour compléter la production nationale. Donc c’est une force pour sortir d’un carcan. Le jour où le Burkina Faso va décréter : plus de voitures coûtant 5 millions F CFA tant qu’elles ne seront pas vendues à 1.500.000 F.CFA, dans un premier temps, les gens diront « tant pis pour vous, si vous ne voulez pas de voitures ». Dans un deuxième temps, ils viendront ici pour nous demander de négocier. En plus du Burkina Faso, si tous les pays voisins organisaient la grève des voitures, on arriverait à acheter des voitures à prix modiques.

Nous pouvons résister si, nous-mêmes, nous avons pris la détermination de dire non ! C’est à dire que nous sommes maîtres de nos besoins. Un homme qui n’est pas maître de ses besoins n’est pas un homme libre„

On chante partout que le Burkina Faso est un pays pauvre ! Qu’est-ce qu’un pays pauvre ? C’est un pays qui regarde ses voisins. Croyez-vous que nous sommes pauvres quand des gens quittent leurs pays pour venir résider parmi nous ? Croyez-vous que nous sommes pauvres quand des gens quittent leurs pays riches pour venir fréquenter nos écoles ? Nous ne sommes pas pauvres !  (Applaudissements)

Nous sommes même très riches, et les gens ont peur que nous ne soyons conscients de nos richesses. Tout pays est riche. Je ne connais pas de pays pauvre au monde.

Avant la colonisation, nous étions certes dans un système de rapports d’exploitation qui avait introduit aussi des rapports de domination. Il y avait des puissances de type féodal qui exploitaient les autres hommes. Pendant la colonisation, on ne disait jamais que notre pays était pauvre. Ce n’était écrit nulle part, ce n’était dit nulle part. C’est après l’indépendance que nous sommes devenus brusquement pauvres. Subitement, on dit que nous sommes sous-développés. En fait, on a établi une hiérarchie de valeurs pour nous convaincre que nous sommes sous-développés tant que nous ne serons pas comme les autres.

C’est pourquoi, il ne faut pas que nous fassions, comme les autres. Nous ne devons pas être, esclaves de ce que les autres produisent. Il y a des gens ici qui ne veulent-pas le ventilateur qui n’est pas bon pour eux. Ils préfèrent le climatiseur parce que le ventilateur leur provoque un petit rhume. Ce sont des maladies de bourgeois. D’où vient leur appareil respiratoire ? (rire dans l’assemblée).

J’ai connu quelqu’un qui disait qu’il ne mangeait pas du pain sec. Il fallait du beurre là-dessus. Eh bien, c’est parce qu’il a le pain qu’il cherche le beurre (applaudissements).

Vous avez vu jusqu’à quel point nous sommes dominés ! Nous avions tous connu aspro, aspro contre la fatigue, aspro contre la fièvre, aspro contre tout, aspro médicament miracle. Les médicaments évoluent avec les désirs des bourgeois. Tout cela pour montrer que les malades ne sont pas égaux. Et les maladies ne sont pas égales. Il y a la fièvre bourgeoise et la fièvre populaire. Si nos ennemis disent que nos discours dérangent et qu’ils ferment leurs robinets, que deviendrons-nous ? Il sera impossible de vivre apparemment. Alors, posons-nous la question suivante : si demain, il manque de pétrole ? Le pétrole qui nous procure l’électricité, que deviendrons-nous ? Il faut être capable de vivre avec des lampes à huile, en exploitant le beurre de karité. Il faudra en être capable parce qu’il ne dépendra pas de nous de choisir le moment où l’impérialisme va nous attaquer,

La lutte économique est donc une lettre qui nous appelle. C’est pourquoi, j’apprécie à sa juste valeur le rapport final de la Deuxième Conférence Nationale des Comités de Défense de la Révolution, J’apprécie positivement les motions et les résolutions qui ont été adoptées. Si nous les appliquons nous aurons trouvé la voie, non pas pour résoudre tous nos problèmes, mais pour au moins nous donner l’habitude de résoudre nos problèmes. Ces mots d’ordre, bien que justes, seront combattus par nos ennemis à l’intérieur comme à l’extérieur du Burkina. Quels sont nos ennemis ? A l’intérieur du Burkina, nous aurons les forces traditionalistes qui exploitent les masses populaires, la bourgeoisie, la petite bourgeoisie opportuniste ou non opportuniste.

À l’extérieur du Burkina, il y a tous ces gens qui vendent pour gagner de l’argent. Il faut qu’ensemble nous soyons capables de nous opposer à tous ces ennemis parce qu’ils vont tenter de nous décourager en disant que nous perdons notre temps. L’impérialisme essayera de faire savoir que c’est archaïque ce que nous faisons.

« C’est de l’autarcie, c’est anti-scientifique, c’est antiéconomique, c’est anti-progrès .» Dans des journaux, on écrira contre la Conférence de DEDOUGOU, tout cela pour nous décourager. On va essayer de nous montrer que nous ne sommes pas logiques, en nous proposant des produits moins chers que nos produit. On a lu dans les journaux que le Faso Dan Fani coûte très cher et que nous voulons contraindre les masses qui sont déjà dans la misère à le porter. Est-ce que le Faso Dan Fani rapporte directement quelque chose aux salariés ? Mais aimant les masses, et devant vivre avec elles pour vaincre avec elles, nous devons porter le Faso Dan Fani. Pendant la sécheresse, qu’est-ce-que les paysans gagnent ? Rien ! Mais le fonctionnaire continue de toucher son salaire. Quand il y a des inondations, des paysans perdent complètement leurs cultures. Pendant ce temps, les fonctionnaires gagnent tout bonnement leurs salaires. Mieux, ils demandent même des augmentations des salaires. Si nous ne voulons voir que les fonctionnaires, ce mot d’ordre ne nous apportera rien. Cela n’est pas normal. Quels crimes, nos paysans ont-ils commis pour mériter leur sort ? Et nous, nous n’avons aucun mérite particulier pour avoir cette assurance permanente. (Applaudissements)

L’impérialisme va dénaturer nos mots d’ordre. Mais les peuples continueront d’apprécier ce que nous faisons. Il n’y a pas longtemps, j’avais conduit une délégation à Niamey. Nous étions tous en Faso Dan Fani. Nous étions très fiers. II faisait bon d’être Burkinabè ce jour-là. Des Burkinabè résidant à Niamey sont allés se mettre en Faso Dan Fani. Un cameraman non burkinabé était allé se mettre en Faso Dan Fani (applaudissements).

Acheikh Ibn-Oumar 1er à gauche
Thomas Sankara en Faso DanFani

Il ne faut pas croire que nous allons négocier avec l’impérialisme.C’est pourquoi, nous ne sommes pas d’accord avec les jérémiades qui disent : « on ne nous achète plus nos produits à leur juste valeur, on a baissé le prix de notre coton. C’est triste. Il faut qu’ils augmentent le prix de notre, coton ». Pourquoi vont-ils augmenter le prix de vos produits, ils veulent de l’argent ! Pourquoi voulez-vous qu’ils nous donnent de l’argent ? Ou bien, vous n’avez pas compris qu’ils sont régis par le règne du profit, ou alors vous voulez tromper les masses en faisant croire que la faute ne provient pas de vous, mais de ces gens qui sont méchants et achètent votre coton à de faibles prix. Non je suis entièrement d’accord que notre coton soit acheté à des prix très bas. J’ai dit à des hommes d’affaires venus de très loin que je les comprenais. « Vous voulez des profits, je ne peux pas vous l’enlever de votre esprit. Je préfère vous prévenir : si le Burkina Faso va vendre des produits, je ferai en sorte qu’ils vous soient vendus le plus cher possible. C’est une loi normale que vous utilisez ». Donc je ne vais pas vous mendier quelque chose. Et il ne faut pas s’étonner qu’ils en fassent autant. Parce que s’ils avaient du cœur, s’ils étaient préoccupés par notre misère, par nos pleurnicheries, au moins ils auraient dit : « des vaches que vous exportez coûtent 50.000 F. CFA. Nous vous proposons de les acheter à 75.000 F. CFA chacune ». Ou bien, ils pourront nous donner gratuitement les médicaments, puisque c’est pour soigner des malades. Qu’est-ce qu’il y a de plus, triste, de plus misérable que de voir un enfant dans le coma et il faut acheter du sérum et d’autres médicaments pour le sauver. Le sérum est vendu, il n’est jamais donné gratuitement. Même si la mère de cet enfant dans le coma pleure à chaudes larmes, roule par terre dans la pharmacie, elle n’aura jamais gratuitement le sérum pour sauver son enfant. Ne perdons pas notre temps à demander aux gens, pour la grâce de Dieu, donnez-nous un peu, augmenter les prix de nos produits.

En vendant cher, et en refusant nos produits, l’impérialisme nous éduque. On va essayer autour de nous en Afrique et ailleurs de dénigrer ce que nous faisons. D’aucuns diront même qu’à DEDOUGOU, le Capitaine SANKARA a attaqué ses voisins. Je n’ai attaqué personne. Mais on le dira, parce que le Burkina Faso ne va plus acheter des habits ailleurs. Un enfant intelligent n’achète que les galettes de sa mère. (Applaudissements).

Ils vont essayer de monter d’autres hommes contre nous, parce qu’à l’étranger, ce mot d’ordre est considéré comme la deuxième révolution du Burkina Faso. Les masses le soutiennent ardemment. Mais, on va essayer de nous opposer aux autres. Nous résisterons, nous vaincrons !

A l’intérieur du Burkina, nos ennemis ce sont les forces rétrogrades qui exploitent les masses. En campagne, ces rapaces là avec leurs serres vont se mettre encore à tournoyer pour dire aux paysans : « Comment on va faire ? Avec la nouvelle mesure du Gouvernement, ça va être difficile de vous aider. Avant on essayait de vous aider en vous apportant des habits d’occasion. En mooré, on l’appelle « malgmogo », ce qui vient nous sauver. Où se trouve le sida ? Ce n’est pas dans le Yougou-yougou » ? (Rires)

On va dire aux-paysans qu’avant vous pouviez-acheter une chemise à 200 F CFA. Maintenant ce n’est plus possible. Ça ne va plus ! Ils vont dénigrer ce mot d’ordre parce qu’ils sont les représentants serviles de l’impérialisme ah Burkina Faso. Ils ne peuvent plus rien gagner.

Les bourgeois seront contre ce mot d’ordre. En tant que gros commerçants, spéculateurs, ils seront contre le mot d’ordre, parce que leurs produits ne se vendent plus. A OUAGADOUGOU, il y a des marchandises qui ne sont plus achetées. Depuis le 4 Août 1983, combien de voitures Mercedes ont-elles été vendues jusqu’aujourd’hui ? Posons-nous la question. Les affaires ne marchent plus. Les gens n’en veulent plus. Ou ils ont peur de monter dans des Mercedes, ou bien ils en ont honte, ou bien ils n’ont pas l’argent, ou bien ils ont courageusement refusé d’acheter des voitures Mercedes. Je cite Mercedes, j’aurai pu citer les autres voitures de luxe. Nous venons de prendre une mesure au Burkina Faso pour dire qu’à partir de maintenant, il n’y aura plus d’importation de voiture berline. Il faut monter dans les véhicules bâchés. Dans les véhicules bâchés, vous pouvez faire monter deux camarades devant, prendre du sable, du gravillon ou des bancs à l’arrière des exemplaires du Discours d’Orientation Politique, du Statut Général des Comités de Défense de la Révolution. Dans une voiture berline, on ne peut prendre au maximum que cinq personnes. Par contre avec une voiture bâchée par exemple, on peut prendre jusqu’à 25 personnes. Une telle mesure a déjà provoqué des réactions. Ainsi la maison Peugeot en France nous a téléphoné pour nous proposer des voitures.

Les bourgeois perdent dans leur commerce, NOVAPRIC à OUAGADOUGOU n’importe plus rien. Qui va acheter ses chemises qui coûtaient 12,000, 15000 ou 20000 F. CFA. On raconte que NOVAFRIC va vendre du Faso Dan Fani. Tant mieux ! Les bourgeois savent, ils ne sont pas bêtes. Ils savent qu’après les habits, l’interdiction d’importation frappera d’autres produits. L’intelligence du produit existe aussi. Après les habits, nous irons vers le reste. Il va falloir consommer rien que Burkinabé, et ça sera possible.

Nous aurons contre nous ces autres bourgeois qui vont faire du sabotage économique, en essayant de saboter nos dossiers de commande, de saboter les livraisons de produits. Il y a aussi ceux qui fuient le pays, avec le prétexte que les salaires sont faibles. Vous là vous voulez qu’on vous donne quel salaire sortant de la poche de qui ? Désignez-nous des gens chez lesquels on va prendre l’argent pour augmenter vos salaires, Vous ne pouvez pas désigner les bourgeois, parce que ce sont vos amis. Les masses populaires ? Commencez par mettre vos propres parents en avant. Celui qui veut que son salaire soit augmenté, ses parents vont payer des impôts spéciaux pour qu’il soit satisfait (rires).

Alors, si nous ne pouvons pas vivre avec les masses, nous ne pouvons pas vaincre avec les masses. Il y a des gens qui ne sont pas intéressés par les victoires des masses. Ils ne peuvent pas par conséquent vivre avec les masses. C’est normal qu’ils partent. C’est une très bonne chose qu’ils s’en aillent. Et tous ceux qui veulent partir sont invités à partir (applaudissements).

On reconnaît au regard ces gens-là qui veulent partir. Quand vous les regardez dans les yeux vous le sentez. Ceux-là sont contre la Révolution.

Si vous les sanctionnez, ils vont dire que vous êtes contre eux, qu’ils n’ont rien fait contre la Révolution. Des gens plus ou moins attendus à leur cause seront mobilisés. A Cuba, au moment du triomphe de la Révolution, 3000 médecins ont fui leur pays, parce qu’ils disaient qu’ils ne pouvaient pas accepter les salaires proposés par la Révolution. Aujourd’hui Cuba a tellement de médecins à tel point que de nombreux médecins cubains prêtent assistance à des pays amis. Cela veut dire que Cuba a bien résolu son problème.

Ceux qui fuient le Burkina vont aller ailleurs pour gagner les salaires qu’ils veulent. Mais ailleurs, ils vont connaître des conditions de vie dures. On est bien que chez soi ! Nous les rencontrons à l’étranger. Mais ils veulent revenir, mais ils se sentent gênés. Mais, venez donc, ne vous gênez pas, ce pays est à vous ! Vous connaissez tous la parabole de l’enfant prodigue, il est parti, il est revenu. Revenez donc, la maison paternelle est prête pour vous accueillir.

Nous avons contre nos mots d’ordre la petite bourgeoisie. Les Révolutions ont généralement connu des difficultés, parfois échoué, souvent à cause de la petite-bourgeoise. C’est elle qui, historiquement de par sa formation, de par l’ouverture d’esprit que lui a procuré la formation intellectuelle, c’est elle qui est généralement impliquée dans le déclenchement de la Révolution. Mais on a l’impression qu’elle n’est pas toujours intéressée à cette révolution. C’est pourquoi, à un moment donné la petite bourgeoisie devient un cas. Nous sommes tous des petits bourgeois. La Révolution arrive à un carrefour, ou bien vous la radicaliser et toute la petite-bourgeoisie est mécontente, parce qu’elle estime que ça devient trop dur, ou bien vous vous dites : faisons plaisir aux petits bourgeois sinon, c’est scier la branche sur laquelle on est assis. Et par conséquent, vous faites plaisir à une minorité et la révolution tombe. Nous sommes à un carrefour.

Les masses populaires se trouvent à gauche, allons à gauche, allons à gauche. Allons à gauche les yeux fermés. Eh bien, dans beaucoup de pays, ces hésitations ont été fatales. La petite bourgeoisie va développer d’abord des théories. Je voudrais simplement en finir une bonne fois avec ceux qui s’alignent sur tel ou tel grand maître pour venir nous dire au Burkina Faso ce qu’il faut faire. Je leur dirais qu’il y a de grands économistes dont les livres sont là en bibliothèques et n’ont pas su développer l’économie de leur pays. Ils l’on géré, ils ont échoué.

L’économie ce sont les masses qui la font. La loi de l’offre et de la demande n’est valable qu’en fonction des conditions subjectives des masses populaires. Un produit peut-être rare et ne pas coûter cher. Un produit peut-être abondant et coûter cher. Si les masses n’en veulent pas elles n’en veulent pas. Vous pouvez apporter votre caviar ici, les masses le regarderont et se demanderont à quoi ça sert. D’ailleurs pour enlever le goût définitivement à tous ceux qui continuent de rêver au caviar, ça ressemble tout simplement aux œufs de crapaud. Voilà ce qu’en penseront les masses. Les conditions subjectives qui permettent au consommateur d’aller vers un produit ou d’abandonner un produit, donc de participer à la formation des prix et à la théorie de l’offre et de la demande, n’est valable qu’en fonction des conditions subjectives dépendent des masses elles-mêmes. Elles n’existent dans aucun livre.

La petite bourgeoisie va dire que « consommer burkinabé » est une théorie arriérée, arriériste. C’est L’arriérisme qui a gagné la révolution au Burkina, parce qu’on veut qu’on recule. Répondez à cette petite bourgeoisie que nous ne reculons pas, nous avançons. Entre un burkinabé qui achète sa grosse voiture sophistiquée avec commande électrique, qui a chez lui une chaine stéréo, dernier modèle avec, affichage digital à quartz et qui ne sait même pas comment ça fonctionne d’un côté et de l’autre côté un autre Burkinabé qui a son phonographe avec aiguilles et qui sait comment il fonctionne, je préfère celui qui possède le phonographe. Quand il tombera en panne, il pourra le réparer lui-même. La petite bourgeoisie nous a égarés. C’est la petite bourgeoisie qui nous a amené les usines clés en mains. Toutes les usines clés en mains ont échoué parce que nous ne maîtrisons pas l’outil. Prendre des catalogues et dire voilà les machines que nous voulons, c’est cela que l’autre appelait « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».  Ces usines clés en mains entraînent derrière elles l’assistance technique qui ne partira jamais, parce qu’elle ne sera pas remplacée à cause de l’endettement continuel. Il faut prendre des crédits pour payer les crédits. Quand vous prenez des crédits chez X il faut payer chez X.

Repartons à la base, consultons notre peuple. Qu’est-ce qu’il nous indique, qu’est-ce qu’il nous enseigne ? Un tracteur agricole ne fera jamais le bonheur d’un peuple, tant que ce peuple n’aura pas compris ce qu’est un tracteur. Nous ne sommes pas arriérés, quand nous disons de retourner à la base. Nous ne disons pas qu’il faut oublier le progrès.

Retourner à la daba, cela veut dire que nous faisons les transformations révolutionnaires avec les masses populaires, pas seulement avec une minorité. Nos ingénieurs agronomes n’ont pas été formés à l’université à la daba. Il n’y a pas de daba à l’université, il n’y a pas de daba dans les instituts agronomiques. Combien sont-ils nos ingénieurs agronomes ? S’ils étaient au moins 4 millions, cela allait faire notre affaire. Ils sont si peu nombreux et même certains se permettent de dire qu’ils vont quitter le pays. Quittez, ce n’est pas vous qui nous nourrissez, ce sont les paysans qui nous nourrissent. Par contre, les ingénieurs agronomes qui savent ce que c’est que le peuple restent avec le peuple pour se transformer et évoluer avec le peuple. Et dans ce cas, avoir étudié ce qu’est le tracteur agricole, et revenir à la daba est un signe de progrès. C’est un dépassement de soi. C’est le début du progrès. Nous voulons que l’es paysans burkinabé se disent : « on pourra peut-être améliorer le rendement de la daba. On pourra peut-être améliorer le manche ou le socle de la daba ». Signe de progrès, il faut qu’un jour, le paysan se dise que c’est fatiguant de cultiver avec la daba. On pourrait peut-être faire tirer la daba par un âne. Cela nous fera gagner du temps et nous économiser des forces. Signe de progrès, c’est parce que nous avons toujours cultivé avec la même daba, il y a dix ans, il y a cent ans, il y a cinq cents ans que nous sommes aux mêmes résultats. Tant que nous n’allons pas mettre une transformation supplémentaire, il n’y aura pas de progrès. Le début de la charrue, c’est mettre un bœuf, un âne, un cheval, un mulet pour tirer la daba. On trouvera que c’est toujours lent. Dans ces conditions, on inventera la roue, un jour, on inventera le moteur. Et alors là on verra le paysan burkinabè grimper sur un tracteur. Quand il aura fini de labourer son champ, on le verra prendre son hélicoptère. Il ira dans sa salle d’ordinateurs et programmera « quand est-ce il va pleuvoir et quand est-ce il va récolter ?» (applaudissements).

C’est ça que nous voulons. Ce n’est pas reculer, c’est avancer. C’est pourquoi, malgré la science de ceux qui ont étudié, nous n’arrivons pas à avancer, parce qu’ils n’avancent pas avec le peuple.

Lors de ma visite en Union Soviétique, on nous avait fait visiter beaucoup de lieux historiques,  de musée. On nous avait fait visiter également la cité des Etoiles. A la cité des Etoiles, c’est là-bas que les Soviétiques forment leurs cosmonautes. Tous les cosmonautes Soviétiques sont formés là-bas. Ils font leurs entrainements là-bas, et c’est dans cette cité qu’ils habitent, que les recherches des vaisseaux de l’An 2000 spatiaux sont faites. C’est donc un haut lieu de la recherche spatiale au monde. Là-bas, les chercheurs ne parlent plus avec la terre mais avec la lune. J’avoue que c’est impressionnant. A la fin de la visite, j’ai signé le livre d’Or de la cité des étoiles, j’ai félicité les cosmonautes présents à la visite. Avant de nous séparer, j’ai dit que ce n’était pas tout : ” Attendez Camarades, c’est très beau ce que nous avons vu, ai-je dit. Quand les résultats de ces recherches seront au service des peuples du monde, cela sera un bienfait pour l’humanité. Cependant, je voudrais vous demander deux places à la cité des Etoiles pour former des Burkinabè. Il nous faut deux places. Nous aussi, nous voulons aller à la lune (rires et applaudissements). Nous sommes au sérieux, nous voulons envoyer des chercheurs burkinabè sur la lune. Ainsi, il y aura les Américains, les Soviétiques, quelques chercheurs d’autres pays. Mais il y aura aussi des chercheurs burkinabé sur la lune » (applaudissements).

C’est vous dire que nous ne regardons pas seulement les petites choses arriérées. Nous regardons également vers l’avenir. Notre préoccupation, c’est faire la jonction entre le progrès de pointe et le niveau arriéré de notre peuple. A quoi ça nous sert de dire toujours dans nos discours : « Camarades, la situation est critique, le bonheur de notre peuple exige la lutte contre l’impérialisme ». Zéro, vous ne connaissez pas le peuple. Celui qui connaît le peuple sait qu’il est effectivement arriéré. Tant qu’il n’y aura pas de transformations révolutionnaires, son niveau ne sera jamais élevé. Et pour élever son niveau, il faut retourner à lui.

La petite bourgeoisie dira également que le Faso Dan Fani coûte très cher. Là, je n’insisterai pas beaucoup. C’est simple, si le Faso Dan Fani coûte trop cher, ne vous habillez pas en Faso Dan Fani. Personne ne vous y oblige ! Il ne faut pas que les gens dénaturent les mots d’ordre. On a simplement dit, si vous voulez vous habillez, habillez-vous en FDF, Sinon vous pouvez marcher nu ce n’est pas interdit (rires).

Nous ne comprenons pas que vous n’avez pas d’argent pour acheter le coton du Burkina, et que vous en ayez pour acheter des habits d’Italie, de France, de Singapour, des États-Unis, d’Amérique ou d’ailleurs. Comment des gens ne peuvent pas trouver 3.500 pour s’acheter une tenue Faso Dan Fani ils peuvent trouver 35.000, 45.000, 55.000, 100.000 FCFA pour s’acheter des costumes à l’étranger. Pourquoi ? Ça me paraît illogique et inacceptable ! D’autres disent qu’ils n’ont pas d’indemnités, c’est pourquoi ils n’achètent pas. Celui qui dit ça doit être mis en prison. Il est d’intelligence avec l’impérialisme. Je vais vous le démontrer. Vous pensez que seuls ceux qui perçoivent des indemnités peuvent s’acheter des habits du pays. Qui leur donne les indemnités ? Si vous n’achetez pas les produits du Burkina parce qu’il ne vous donne pas des indemnités et vous achetez ceux des pays impérialistes, donc ces pays vous donnent des indemnités ! Vous êtes des traîtres dans nos rangs. Vous êtes à la solde de l’impérialisme. Donc vous irez en prison pour raison de sécurité. C’est tout ! (applaudissements).

Bien sûr, 3.500 F ne sont pas à la portée de tous. Mais les prix des tenues Faso Dan Fani ne feront que baisser chaque fois que le marché sera élargi. Toutes les femmes tisseuses aident à élargir le marché. Et bientôt, les coopératives que nous allons créer vont permettre d’améliorer la qualité et d’augmenter la quantité des tenues Faso Dan Fani. A partir des métiers artisanaux à tisser, nous allons découvrir des machines à tisser plus complexes et plus perfectionnées. Nous irons vers la manufacture, puis l’usine textile « made in Burkina ». En ce moment-là, aucune pièce en panne ne sera irréparable, parce que ce sont nos machines dont nous avons suivi l’évolution pas à pas. Mais nous irons plus vite par rapport aux Européens qui ont mis des siècles pour passer du rouet à l’usine textile. Nous, nous allons profiter des résultats de la science universelle, du savoir universel et en quelques années, nous allons les rattraper. Regardez le temps que les Européens ont mis entre le bouclier et la machine électronique à calculer. Cela fait des siècles. Chez nous, regardez aussi la rapidité avec laquelle nous sommes partis de notre faible niveau pour avoir des machines à calculer. Ça fait plaisir de voir des paysans burkinabé utiliser des machines à calculer. Nous avançons vite, parce que nous partons du principe que la science n’appartient à personne. La science est à la disposition de qui s’en sert. La science est partout pour tous. C’est pourquoi, il faut que nos enfants apprennent l’informatique dès leur bas âge. Demain, ce seront des informaticiens, et nous n’aurons pas besoin d’assistance technique.

La petite bourgeoisie dira également que nous voulons forcer les gens à porter ceci, nous voulons forcer les gens à consommer cela. C’est une atteinte aux libertés individuelles, aux libertés de goût des gens. Nous ne permettrons pas aux gens de venir exploiter notre peuple. Qu’est-ce à dire ?

Les salaires que nous payons chaque année s’en vont à l’étranger. Et rien ne reste au Burkina Faso. Comment pendant des années, nous allons continuer à pressurer le peuple à trouver de l’argent pour payer une minorité dont la plupart des dépenses sont effectuées à l’étranger ? Ceux qui disent que le Faso Dan Fani est une imposition, ils se trompent. Il y a bien d’autres idées que ces gens-là vont développer pour dénigrer nos mots d’ordre. Ils vont dénigrer et semer le doute et la confusion dans nos esprits.

Il vous faut être courageux. Nous devons nous préparer. Le fait d’être réunis à DEDOUGOU ne suffira pas à transformer notre économie, à la rendre nationale et indépendante. Il faudra qu’après DEDOUGOU nous appliquons nos décisions. Et c’est pourquoi je n’ai cessé de répéter de porter le Faso Dan Fani. Malheureusement, il y a des Camarades gui portent le Faso Dan Fani avec une compréhension erronée. Ils portent Faso Dan Fani comme s’ils y étaient obligés. « On a dit de porter Faso Dan Fani, vous savez avec ces gens-là, moi je ne veux pas d’histoire ». Quand vous les regardez habillés, ils sont comme dans une camisole de force. Ils sont ceux qui pensent que nous prônons l’archaïsme. Ils ont mal compris. Il n’est pas normal que les Camarades s’habillent mal en Faso Dan Fani. Le Faso Dan Fani c’est quelque chose de beau, porter Le Faso Dan Fani est un acte économique, culturel et politique de défit â l’impérialisme. Donc, on doit en être fier ! (applaudissements).

Il y a des camarades qui s’habillent en Faso Dan Fani comme un âne invité à témoigner au mariage d’un cheval (rires).

Ce n’est pas normal. Oh doit bien s’habiller ! La révolution n’est pas contre ce qui est beau. La révolution est contre le beau et le luxe pour une minorité.

Je suis fier quand je vois des camarades qui font preuve de créativité, qui trouvent de modèles nouveaux. Le 1er Janvier 1987, j’ai vu dans une rue de OUAGADOUGOU, une jeune fille à mobylette dans un Faso Dan Fani extraordinaire. C’était très beau. Je me suis arrêté pour admirer. Après je me sentais gêné, parce que les gens s’étaient arrêtés pour me regarder, regarder la fille (rires).

Alors je suis parti. Cela fait plaisir. Nous devons être capables de démontrer qu’avec nos mots d’ordre, nous irons loin. Aujourd’hui, c’est du coton pour peut-être demain nous allons y mélanger quelque chose, que sais-je encore.

D’aucuns déforment le mot d’ordre « consommons burkinabé » permettant ainsi à la petite bourgeoisie d’attaquer malhonnêtement. Ainsi, au nom du « consommons burkinabé », on dit qu’il faut être authentique, faire comme nos grands-parents. Non tout ce qui est authentique n’est pas forcément bon. En Afrique, il y a des bêtises authentiques ! Donc ça ne vaut pas la peine de les prendre. Il faut choisir ce qui est authentiquement bon, et mettre de côté ce qui est authentiquement mauvais. C’est dialectique et c’est pour les dialecticiens. Je sais qu’aujourd’hui beaucoup de camarades sont forts embarrassés. La Révolution a surpris des camarades dont les garde-robes restent en contradiction flagrante et directe avec le mot d’ordre. Que faire ? La solution existe. Certains ont dit de continuer à porter leurs habits jusqu’à l’épuisement de leurs garde-robes. D’autres ont dit qu’il fallait procéder à leur autodafé et porter les habits Faso Dan Fani. Non Camarades. La Révolution est venue pour indiquer la voie à suivre. Nous savons que tout le monde n’évolue pas ensemble et à la même vitesse. Comprenons simplement que des Camarades seront encore longtemps habillés autrement qu’en Faso Dan Fani, Et ce sera normal. Le temps qu’ils évoluent, qu’ils comprennent, qu’ils se donnent les moyens nécessaires pour se procurer des tenues Faso Dan Fani.

Thomas Sankara porte un uniforme en Faso Dan Fani

Comprenons également que si certains camarades ne se mettent pas en Faso Dan Fani, cela jouera contre la Révolution. Donc, ces derniers ne peuvent pas faire autrement que de porter Faso Dan Fani, parce qu’ils sont délégués par les masses. Il faut que le port de Faso Dan Fani évolue progressivement. Il faut que nous tenions compte des moyens, du niveau de compréhension des uns et des autres, et de leur place en tant que modèles, devant donner de bons exemples. Il faut que nous tenions compte de toutes ces conditions, sinon nous allons faire des erreurs.

Cependant, il ne faut pas se décourager. Nous aurons des amis, des alliés pour soutenir nos mots d’ordre. Nos paysans, nos intellectuels patriotes qui aiment leur patrie, les petits bourgeois qui investissent ici pour transformer, tous ceux-là sont des alliés de la Révolution ou des acteurs de la Révolution qui permettront à ses mots d’ordre de triompher. Ne désespérons pas. Le Ministre de la Question Paysanne dans ses compte-rendu m’a toujours souligné que les masses saluent le mot d’ordre « consommons burkinabé ». J’ai vu une jeune fille la semaine dernière (rires), j’ai vu une jeune personne la semaine dernière (rires) qui me disait qu’elle produisait 16 pagnes Faso Dan Fani par mois. Ce qui lui rapporte 45000 F CFA par mois. Jamais-elle n’avait gagné une telle somme d’argent, il y a quelques six mois. Elle tisse la nuit à des heures perdues, et elle ne travaille que sur commande. Ce n’est pas ça le bonheur ? Cela s’appelle le bonheur chez soi. Elle gagne son argent par son travail émancipateur, le travail qui la rend digne, fière, heureuse ! Elle peut même acheter un mari (rires). Il y a quelque temps une femme était venue me dire (rires) : « Camarades Président, depuis le 4 Août 1983 vous parlez de Révolution. Elle ne m’a jamais concernée. Mais à partir de maintenant, la Révolution m’intéresse ». « Mais pourquoi lui ai-je demandé ?». « Regardez mes mains. Je suis fatiguée de travailler, parce que je reçois chaque fois des commandes Faso Dan Fani ».

Le Faso Dan Fani s’améliore chaque jour. Au début, chacun de son côté allait acheter pour être en règle. Maintenant, le modèle de votre voisin vous intéresse. Sa couturière vous intéresse. Et ainsi nous nous imitons les-uns les autres et la mode continue de plus belle !

Nous devons avoir confiance au peuple. Nous devons avoir confiance aux Burkinabè qui découvrent où se trouvent leurs intérêts quand on le leur indique. Mais les Burkinabé ne vont pas se lever si nous n’allons pas à eux pour leur expliquer. Aller leur expliquer cela veut dire être tolérant, comprendre que les niveaux ne sont pas les mêmes, comprendre que la réaction fait un travail de sape, et que nous devons nous armer de courage pour éduquer les masses. Pour cela, il faut que les CDR se mobilisent, que l’UFB se mobilise que l’UNAB et même que les pionniers se mobilisent. Tant que nous ne serons pas mobilisés, le peuple ne se lèvera pas de lui-même.

Ce sont les mêmes petits bourgeois qui quittent les villes pour aller dans les villages dire : « A OUAGADOUGOU, tout est gâté ». Les paysans disent : « Voilà, ces gens-là si ce n’est pas à cause de Dieu, on ne sait pas. » Le paysan n’est pas organisé pour défendre ses intérêts, pour défendre les acquis de la Révolution. Le paysan est content de la suppression de l’impôt. Lui, il ne sait pas qu’il y a des gens au Burkina qui sont prêts à rétablir l’impôt. Il ne le sait pas. Seule la lutte des paysans organisés, peut barrer la route à ceux qui veulent nous ramener à l’impôt ou à d’autres misères. Notre devoir est d’organiser les masses pour combattre et défendre les acquis de la Révolution.

Nous parlons de « consommer burkinabè ». Prenons le cas de la tomate. Nous consommons de la tomate que nos commerçants importent d’Italie, d’Espagne, du Maroc, de la France et d’ailleurs. Cette tomate importée est une source de devises pour les commerçants. Lesquels commerçants vont mettre cet argent dans les poches des capitalistes. Argent que les capitalistes utilisent parfois pour des régimes qui vont nous oppresser. Comment nous pouvons demander à ces gens de nous comprendre, de diminuer le prix des produits qu’ils nous vendent et d’augmenter le prix de nos produits que nous leur exportons ?  Comment pouvons-nous négocier avec eux, que nous avons un moyen de pression sur eux ? « C’est notre argent qui achète votre tomate. Nous allons cesser d’acheter votre tomate. Si nous n’achetons pas votre tomate, vos industries ne pourront plus travailler, vos paysans ne pourront plus produire de la tomate  et ils vont faire grève. Et s’ils font grève, vous aller tomber ». Donc, c’est nous qui soutenons des régimes là-bas. Et si ces régimes nous soutenaient, cela allait être compréhensible. Le roi d’Espagne, quand ça ne va pas au Burkina, est-ce que le roi d’Espagne vient nous aider ? Il y a une quantité de tomates au Burkina. Il faut donc consommer burkinabé. Et pour consommer burkinabé, la meilleure arme, ce sont les femmes. Si les femmes ne sont pas d’accord, si les femmes sont pro-impérialistes, les repas seront pro-impérialistes ! Si les femmes sont décidées à boycotter les produits importés, alors c’est la garantie !

C’est pourquoi l’UFB doit nous aider, nous peuple du Burkina, à résister. C’est l’UFB qui peut nous amener à consommer burkinabé. Il faut que le Burkinabé se distingue de tous par son mode alimentaire. Il faut qu’à table chez le Burkinabè, on voit de la viande, le lait, les œufs, les légumes et les fruits. Et nous devons travailler à populariser toutes ces denrées. On me dira que les paysans n’ont pas d’argent pour s’acheter toutes ces denrées. Comment les paysans ont fait pour acheter des postes-radio pour écouter « le liwaga » ? Ils pourront produire plus, élever, des poulets, des moutons, et les vendre pour-acheter des œufs, de la viande pour nourrir les enfants. A l’ouverture de notre conférence, le porte-parole des pionniers nous a dit qu’ils veulent bien manger. C’est un engagement que nous devons prendre pour bien nourrir nos enfants. Bien manger, est une obligation de la Révolution. Les gens qui mangent mal doivent être punis. Ceux qui vont manger deux brochettes avec beaucoup de piment et boire quatorze bières, seront punis (rires).

Souvent nous avons entendu qu’il y a beaucoup de fruits qui pourrissent au Burkina, notamment à Orodara, c’est vrai ! Si chacun faisait l’effort de consommer cinq mangues par an. Bien sûr pour l’écoulement de tous ces fruits, il faudrait des routes et des magasins pour les stocker, pour pouvoir les vendre toute l’année. Plus tard, on fera des usines pour les mettre en boîtes. Ainsi, les paysans de la Province de Kénédougou seront bien rémunérés. Je demande aux Camarades de l’UFB, mais également aux Camarades de l’UNAB, d’en faire un mot d’ordre. Il faut que les Burkinabé mangent bien ! Nous ferons une étude pour déterminer la quantité de légumes consommés dans chaque province. Il en sera de même pour la viande, les œufs, les fruits pendant l’année 1987-1988. Ensuite, l’enquête sera étendue de 1988 à 1989. Si la consommation n’évolue pas, c’est que les structures populaires n’ont pas fait un travail d’agitation, pour que les gens augmentent la quantité et la qualité de leur production et de leur consommation, Nous devons donc organiser les masses pour lutter, résister et gagner. Pour que demain, s’il y a un blocus contre le Burkina, ce soient les masses qui descendent dans les rues pour chanter leur joie? Alors, le blocus ne fera que nous renforcer. Mais cela exige que les CDR jouent le rôle qu’ils doivent jouer, continuer la mission d’éducation et de conscientisation politiques des masses !

Continuer la lutte pour la ‘société ! Continuer également le travail pour rendre notre cadre de vie agréable ! Il y a des complots que nos ennemis trament contre notre pays. Il y a trois semaines, on m’a amené un document pour me montrer qu’il y a un complot qui se prépare au Burkina pour les mois à venir. Ensemble, nous attendrons ce complot. Il y a des complots tout le temps, et nous devons vaincre tout le temps. Il faut que nous arrivions à ce que chaque CDR jauge effectivement ses victoires dans le cadre de la production, ses victoires dans le cadre de la consommation, dans la cadre de l’indépendance économique dont nous avons besoin. Et cette indépendance économique, je le répète, n’est pas une forme de recul. Nous ne devons pas désespérer, parce que l’Afrique a de quoi nourrir les Africains.

L’Afrique a tout pour tous les Africains. Nous devons travailler avec courage et détermination. Les pharaons avaient 3000 ans d’avance de civilisation sur le reste du monde. Donc, il y a des bases. Et il nous faut continuer de chercher. C’est parce que nous n’avons pas cherché que nous n’avons pas trouvé. Les rapports du monde peuvent changer à condition que nous luttions pour notre indépendance économique. Regardez ce qu’était le monde aux 16ème et 17ème et même au 18ème siècle. Qui dominait le monde ? C’étaient l’Espagne et le Portugal qui se partageaient le monde. C’étaient les deux superpuissances de l’époque. Aujourd’hui où se trouvent l’Espagne et le Portugal ? Quand on parle de sommet des grands aujourd’hui, on ignore l’Espagne et le Portugal ! Par le travail capitaliste, les Anglais ont pris la relève. L’Angleterre dominait le monde. Les Anglais étaient les maîtres du monde, et avaient colonisé plusieurs pays. Ils avaient colonisé le Ghana et laissé la Haute-Volta aux Français qui étaient plus faibles qu’eux. Ils ont colonisé les Américains. Aujourd’hui où se trouvent les Anglais ? Ils occupent la 4ème position, la 5ème position, voire la 7ème position dans le monde. Là aussi les rapports ont changé. Demain, quand on va parler des grandes puissances, on ne désignera pas seulement le Burkina, mais tous les peuples (applaudissements).

Et c’est ce que nous dévons viser. C’est ce que ne comprennent pas les petits bourgeois attardés ! Parce qu’ils sont nombreux ces opportunistes qui ne comprennent pas et ne comprendront pas. Nous devons les combattre.

C’est une véritable vermine ! Dans le combat économique, nous allons trouver des opportunistes, encore plus raffinés, Et je vous invite à être vigilants pour les démasquer et les combattre. En effet, les opportunistes ont peur du combat économique, parce qu’ils ne peuvent plus gagner leur Champagne. Ces bandits vont dénigrer de gauche à droite. Les opportunistes ont peur quand la lutte révolutionnaire se radicalise.  Ils ont peur des luttes qu’implique une conférence comme celle de Dédougou ; chantiers populaires pour l’édification de la patrie, trois semaines de travaux sur le terrain.

Quand la petite bourgeoisie entend cela, elle tremble, les opportunistes ont peur. Qu’est-ce qu’ils vont faire ? Ils vont commencer par dénigrer, on veut faire plusieurs choses à la fois ! On prend les décisions précipitamment : ils vont prétendre que Lénine lui-même n’a pas préconisé ces tâches. Ils doivent savoir que si Lénine revient au monde, il dira que ce que nous faisons au Burkina est scientifique. Si Lénine était délégué CDR, il allait applaudir les conclusions de nos travaux. En Russie, on a vu des femmes tirer des charrues, le joug sur les épaules. Ce que les hommes ici n’ont pas fait, les femmes là-bas l’on fait. Ce qui est fait ici par les animaux, était là-bas par des hommes, sous Lénine. Et pourtant,  était-il contre le peuple ? N’oublions pas cela ! Ce sont des gens qui ont mal compris les œuvres de Lénine. Ces opportunistes vont essayer d’éviter d’être en première ligne.

Maintenant, nous allons savoir qui est révolutionnaire et qui ne l’est pas. Aujourd’hui, être révolutionnaire, c’est posséder une brouette ou une pelle, ou un pic. La main d’un révolutionnaire n’est pas douce. A l’heure de la pelle-pioche, la main du révolutionnaire est rageuse, parce qu’elle cultive, creuse des canalisations, des trous pour planter des arbres.

Local CDR source thèse de doctorat d'Anselme Lalsaga
Local CDR source thèse de doctorat d’Anselme Lalsaga

Nos opportunistes ont peur des responsabilités» Quand on veut leur confier des responsabilités, ils cherchent des stratagèmes pour les éviter. Lors des élections des délégués CDR, on entend ceci : « compte tenu de mes charges, je préfère ne pas être candidat. Il faut prendre un tel, on va l’épauler on va être derrière lui ». Alors tout le monde va être arrière, et qui va être devant alors ? Après les élections, ils sont premiers à chercher la caution des délégués CDR. Quand on demande un cadre compétent, on le présente. Il est compétent, mais est-ce qu’il est révolutionnaire ? S’il est révolutionnaire, il est militant CDR, il participe au reboisement, il participe aux Assemblées Générales CDR. En réalité, c’est un opportuniste qui cherche la caution, des délégués CDR, Tous les opportunistes ont des pratiques sordides. Ce sont eux qui fréquentent les boîtes de nuit qui existent encore à OUAGADOUGOU. Lorsqu’on dira qu’il faut envoyer des Camarades sur tel ou tel chantier, il y aura certains qui ne voudront pas quitter Ouagadougou, parce qu’ils font la révolution pour rester à OUAGADOUGOU. Ce sont des révolutionnaires d’un autre type. Ils sont nombreux et il faut les combattre (applaudissements).

Qu’allons-nous faire quand les camarades qui savent et peuvent ne font rien ? C’est indignant !  II faut aller là où sont les masses pour les organiser et les éduquer. Les masses nous réclament partout. Celui qui fait la révolution à OUAGADOUGOU seulement ne peut pas parler du Burkina Faso. Les opportunistes, ce sont ceux qui vont parler révolution, en termes maximalistes. « Cette révolution est faible, il faut aller plus loin ! » Alors qu’ils négocient la direction des projets, tout ce qui est juteux, tout ce qui attire l’impérialisme ici : «  Projet N… financé par telle source de financement à tant de millions ». Ensuite, ils sont nommés directeurs du projet, contrôleurs techniques du projet, coordonnateurs généraux de projet. Il a la voiture, les bons d’essence, il vole, il a le camping… C’est ça qu’ils aiment. Et ils disent qu’il faut développer le pays comme cela. Quand vous voulez discuter ils disent que « ce sont les lois objectives. Le degré de développement de notre pays nous commande de traiter tactiquement avec l’impérialisme. Souvenez-vous de ce que Lénine avait… » Vous voyez ils prennent Lénine pour servir des causes contre-révolutionnaires. « Camarades, n’oubliez pas la NEP, Lénine avait dû composer avec des réactionnaires. Il faut aller par étapes ». Ceux qui parlent ainsi sont des rats palmistes qui nous tiennent un langage dangereux. On les connaît. Ce sont les mêmes qui hier avaient menacé ici des régimes pour avoir un peu d’argent en plus, oubliant que tout ce qu’on leur accordait, c’étaient des sacrifices qu’on imposait aux masses pour les satisfaire.

Je ne dis pas que toutes les luttes ont été négatives. Elles ont été utiles dans la mesure où elles ont aidé à la prise de conscience du peuple. Parfois, elles étaient le cri de la révolte contre les injustices qui existaient. En ce sens, elles étaient justes, mais d’autres ont été menées dans des calculs d’intérêts personnels égoïstes. Ils menaçaient les dirigeants de l’époque en prédisant la révolution. Ils ont chaque fois menacé de faire la révolution pour qu’on leur donne quelque chose. Ce sont les maîtres chanteurs historiques ! Aujourd’hui encore ils nous menacent de faire la révolution, si jamais nous ne leur donnons pas tout ce qu’ils veulent. Mais la révolution est là ! Nous n’avons jamais dit que nous allons nous arrêter ici. Nous voulons aller plus loin ! Il faut dénoncer et combattre les maîtres chanteurs qui se posent en fossoyeurs de la société de justice que nous bâtissons.

Des révolutions connaissent des difficultés, c’est vrai, elles existent. En Éthiopie, vous entendez chaque fois des démissions des membres du Parti des Travailleurs éthiopiens. La presse internationale aime ça ! Goshu Woldé ce bandit Ministre des Affaires Étrangères Colonel de l’Armée éthiopienne ! Qui l’a fait ministre, ce n’est pas 1a Révolution ? Il a dit que les mesures de la Révolution éthiopienne n’étaient pas bonnes, qu’il n’aime plus l’Éthiopie parce que la Révolution est devenue fasciste, et il a fui aux Etats-Unis d’Amérique. Toutes les mesures étaient prises par le Bureau politique et le Comité Centrai du P.T.E. Pourtant, il était un membre important de toutes ces structures dirigeantes. En plus, il était chargé d’aller expliquer la politique de l’Éthiopie à l’étranger en tant que Ministre des Affaires Étrangères. Il a quitté l’Éthiopie lâchement, traîtreusement, nuitamment. Alors, les hommes de l’obscurité, il faut les écarter Tous ceux qui parlent de la Révolution et cachent au fond d’eux la volonté de trahir la révolution, ce sont des Goshu Woldé. Les Goshu Woldé, nous devons les démasquer et les combattre. II faut qu’on sache « qui est qui » dans la révolution maintenant ! Qui est sûr et qui ne l’est pas ? Nous sommes tous les Goshu Woldé potentiels ! Et nous devons faire un effort pour tuer le Goshu Woldé qui dort en chacun de nous, et qui peut se réveiller.

Ce sont toujours les mêmes opportunistes qu’on entend. Ils disent qu’on a créé la CPPC  (Commission du peuple chargée de la prévention contre le corruption)  pour lutter contre la corruption, mais c’est un tel qu’on vise. Ils tremblent ! Ils disent alors que ce n’est pas bien, Tout le monde passera devant la CPPC. Il n’y a pas un délégué qui n’y passera pas. Ce sont les opportunistes qui ont peur de la Révolution quand elle avance.

Notre lutte n’est pas une partie de plaisir mais notre lutte n’est pas non plus pour nous faire du mal, c’est pour créer la joie, le bonheur, c’est pour le peuple. Pour cela il faut des militants convaincus. Seul le contact des masses éduque. On veut du travail, on aura du travail parce qu’il se trouve partout au Burkina. Seulement il faut savoir à quel niveau chercher le travail. Soit en haut et vous montez le faire soit en bas, et vous descendez pour cela. D’aucuns ne veulent pas descendre pour rejoindre le travail, parce qu’ils estiment avoir des diplômes. « Moi je suis un intellectuel, je ne peux pas descendre à ce niveau-là ». Et quand vous voulez qu’ils travaillent, « moi je suis un intellectuel. Il ne faut pas qu’on me traite comme ça. Voilà un pays où on n’aime pas les intellectuels ».  Cela veut dire simplement que cet homme-là aime son diplôme plus que le peuple. Donc il faut s’en méfier. Dans nos rangs se trouvent toutes sortes d’individus, toutes sortes de personnages pour s’attaquer à la Révolution, en faisant semblant de la soutenir. Ils vous menaceront avec un tract par-ci, un par-là. Les tracts n’empêchent pas la révolution d’avancer. Ils menaceront de créer une organisation pour torpiller la Révolution.

source thèse de doctorat d'Anselme Lalsaga 1
source thèse de doctorat d’Anselme Lalsaga 1

Eh bien, Camarades, c’est armé de tout cela que nous devons construire .ensemble. Mais nous devons lutter au niveau des CDR, c’est cette base vivante, révolutionnaire, dynamique pour créer l’unité. Créer l’unité, cela veut dire que nous devons accepter le dialogue, accepter les débats, même avec ceux qui, de prime abord, ne semblent pas pour nous. Je ne dis pas que nous ne commettons pas des erreurs. Je ne dis pas qu’à force de vouloir accepter le débat, nous n’allons pas donner vie et survie à de la vermine, Non ! Il faut continuer de discuter. Il faut être tolérant. Le courage de dénoncer et de combattre doit aller de pair avec le courage de tolérer pour comprendre autrui.

Un militant peut se tromper, et paraître comme un Goshu Woldé, mais être capable de se transformer dans la lutte, au-contact des masses, au contact des réalités. Donc nous devons être suffisamment tolérants en révolutionnaires pour comprendre les autres. Beaucoup ont commis des erreurs et sont en train de se transformer admirablement. Ils sont en train de se corriger eux-mêmes parce qu’ils ont honte des fautes qu’ils ont commises. Passé le moment de l’excitation fébrile, même du subjectivisme, de la colère, parfois justifiées, ils sont revenus à d’autres attitudes de lutteurs, de combattants dynamiques. Là aussi, ne pas le savoir, c’est commettre l’erreur, la faute du sectarisme. Nous ne devons pas être sectaires. La violence d’un côté doit aller forcément avec la tolérance de l’autre.

Camarades, il faut que nous habituions notre peuple à la lutte, parce qu’après quelques années de lutte révolutionnaire, nous tous de plus en plus, nous aspirons à nous asseoir. Si la révolution tombe, ça sera surtout à cause du fauteuil. On aime trop s’asseoir et trop s’asseoir n’est pas bon. Les Révolutionnaires doivent de temps en temps s’asseoir, se reposer, c’est bien pour la santé, mais ils doivent être souvent debout, marcher, tourner, aller et revenir. Si vous n’allez pas, vous ne saurez pas quel est le terrain qui n’est pas encore occupé par la Révolution. Or nous devons occuper tous les terrains. Et quand nous allons commencer à nous asseoir, nous nous installerons dans le confort. Alors, nous serons incapables de lutter, si ce n’est pas déjà le cas, il faut en être bien persuadé. C’est pourquoi, chaque fois que nous voulons engager une lutte, on entend les gens dire : « On cherche encore la bagarre, on cherche plusieurs ennemis à la fois. On ouvre trop de fronts à la fois ». Ils ne savent pas que le Burkina est craint et respecté, justement parce qu’il soutient des combats. Il faut multiplier les fronts de combat, les maintenir et les tenir ! Si nous devons reculer tactiquement sur une position, nous reculons tactiquement mais nous ne devons pas reculer en débandade. Or la débandade c’est la couardise que les opportunistes petits bourgeois suggèrent chaque fois. « Voilà disent-ils, nous allons nous créer des problèmes. Est-ce que vous savez que le pétrole peut être rationné ? Est-ce que vous savez que L’impérialisme peut verrouiller ? On ne peut plus dire A bas L’apartheid ».

Vous avez entendu, quand les Français ont appris la condamnation d’un de leurs compatriotes en Afrique du Sud à quatorze ans de prison, il y a eu des manifestations de protestation. C’est normal, parce que le peuple français n’est pas d’accord avec cette condamnation. Et nous ? Nos parents en Afrique du Sud sont condamnés depuis 400 ans ! Et des gens veulent ici qu’on se taise !

Nous devons choisir le camp le plus juste, nous éduquer chaque fois dans la lutte. Et un peuple vaut également par sa dignité et non pas seulement par ses richesses matérielles. Un homme vaut de par sa dignité et son courage ! Et le jour où nous cesserons d’être nous-mêmes, nous ne pèserons pas lourd quelle que soient nos richesses. C’est pourquoi, en prévision de moments plus durs où il nous sera demandé de nous définir, de nous déterminer de façon plus marquée, nous devons commencer dès aujourd’hui à éduquer notre peuple dans le sens du refus de l’injustice à laquelle nous assistons. C’est un apprentissage. Aucune vertu ne se maintient sans exercice, et sans pratique quotidienne permanente. La vertu n’est pas donnée une fois pour toutes. On ne dit pas, moi je ne fume pas. Il faut quotidiennement s’exercer à refuser la cigarette. Vous dites une fois, après vous oubliez. La cigarette revient, vous ailes fumer. Des gens disent qu’ils ne volent pas. Il faut s’exercer à avoir l’argent devant soi, sans témoin sans risque d’être découvert et refuser. Là vous faites un apprentissage. Mais devant les gens, on dit qu’on ne vole pas, ce n’est pas toujours vrai. Qu’on nous laisse dans l’obscurité avec de l’argent et on verra. Nous sommes tous là, je ne pense pas qu’il il y ait un seul qui veuille dire qu’il est voleur. On peut poser beaucoup d’argent ici dans cette salle puis on éteint les lumières. Cinq minutes après, on rallume. On verra !

Il faut qu’un jour au Burkina Faso, on puisse déposer son argent partout sans être volé, parce qu’aucun burkinabé n’est voleur. Sauf les étrangers qui viendront voler chez nous. Il faut que la clé de la banque soit accrochée à un arbre. Quand vous voulez de l’argent vous allez la décrocher, vous enlevez votre part et vous la raccrochez là-bas, au cas où quelqu’un d’autre voudrait de l’argent la nuit. C’est à ça qu’il faut parvenir ! (applaudissements).

Il faut donc qu’on s’entraîne qu’on s’exerce à développer la vertu. Même le vice, même le mal s’il n’est pas maintenu, il se perd. Un voleur qui oublie de voler de temps en temps, il perd la main, il ne sait plus comment on vole. C’est pourquoi on attrape certains.

La vertu et le courage révolutionnaire ne se développent que par la pratique. Le DITANYE, notre hymne de la victoire nous enseigne qu’une seule nuit nous a réconciliés avec les peuples du monde. Cette nuit qui nous a réconciliés avec les peuples du monde veut dire que si hier on avait exploité, le Burkina, dominé le Burkina, exploité les Burkinabè au point qu’ils avaient fini par croire que tout ce qui est blanc est mauvais, au point qu’ils avaient fini de croire que tous les étrangers sont mauvais maintenant grâce à la Révolution, nous devons changer de position et nous dire qu’il y a des exploiteurs ici comme ailleurs s il y a des ennemis, les uns des autres.

Nos grands chantiers vont aboutir. Il nous faut démontrer à la face du monde que nous ne craignons pas les travaux forcés pour notre libération. Il nous faut savoir faire appel aux autres.  C’est pourquoi, nous allons lancer un appel aux travailleurs Internationalistes, qui viendront pour nous aider de leurs bras, de leur intelligence, de leur savoir-faire, afin que la révolution au Burkina Faso soit toujours victorieuse et qu’elle puisse être au service des autres peuples. (Applaudissements).

Il y a de par le monde des ingénieurs, des professeurs, des savants, des médecins qui demandent à venir au Burkina Faso au nom de l’idéal révolutionnaire. Je ne parle pas de ceux qui cherchent des CFA. Je ne parle pas non plus de ces gens qu’on envoie habilement comme des assistants alors que ce sont des espions. Je parle de ceux qui sont des révolutionnaires, militants déterminés qui veulent nous aider. Beaucoup de pays l’on fait. C’est le cas par exemple de CUBA et du NICARAGUA. Après la guerre de libération en Algérie, beaucoup y sont allés pour travailler. Il faut que nous le fassions aussi. Nous allons les appeler et, ils viendront nous aider parce qu’ils accepteront les conditions réelles du Burkina.

Il ne s’agit pas de ces messieurs qui descendent avec mallettes, qui exigent de voyager par avion en classe première et d’avoir des vacances tous les six (6) mois. Il ne s’agit pas des experts. Ces derniers sont une race dans le monde. En fait qu’est-ce qu’un expert ? C’est un individu qui a une mallette et qui voyage loin (rires).

Vous êtes un ingénieur au Burkina, on ne vous appellera jamais expert. On vous sort du Burkina et on vous amène là-bas au Zimbabwe, vous devenez expert. Je ne parle pas de cette race-là. Je parle des techniciens internationalistes qui vont venir travailler avec nous, pour montrer que ce n’est pas l’affaire du Burkina seul, parce que si notre révolution tombe, c’est aussi le progrès social dans le monde qui va en pâtir.

De même, nous sommes solidaires de toutes, les luttes des peuples dans le monde, et particulièrement en Afrique. Lorsque l’impérialisme crée des difficultés en Libye, c’est un souci pour nous. Ce n’est pas seulement parce que nous sommes pro-Libyens, comme le disent les gens, mais parce que nous sommes pour les idées qui y sont développées. Quand la Libye attaque l’impérialisme, nous sommes contents. S’il y avait quinze États comme la Libye, nous serions plus contents. Nous ne sommes pas pro-Libyens, mais pour la justesse des idées qui y sont défendues. Lorsque nous apprenons que la révolution Cubaine remporte des victoires, que la révolution NICARAGUAYENNE remporte des victoires, nous sommes contents.

Au contraire, lorsque des révolutionnaires apprennent qu’une révolution a été balayée dans le monde, ils sont tristes. Quand on a envahi l’Ile de Grenade, les révolutionnaires de là-bas ont été éliminés, les plus tristes dans le monde, ont été les révolutionnaires. Donc, il nous faut montrer que notre révolution est l’affaire des autres révolutionnaires, pour le triomphe de la cause des peuples. Ils viendront de partout travailler concrètement sur nos chantiers, manger ce que nous mangeons, dormir là où nous dormons, et produire avec nous. C’est de cette façon que nous appliquerons réellement ce que nous commande et enseigne le DITANYE. « Et une seule nuit nous a réconciliés avec tous les peuples du monde pour la conquête de la liberté ».

Camarades, je vous ai pris beaucoup de temps. Mais ce n’était pas un discours. J’ai voulu simplement parler aux militants, après cette moisson éclatante, après ce travail énorme que vous avez abattu. Je voulais simplement dire à ceux qui étaient officiellement délégués à Dédougou, et à travers vous au nom des délégués présents ici ou qui m’écoutent, que notre révolution va toujours de l’avant. Nous ne pouvons que nous féliciter. Regardez l’organisation de cette conférence ! Son organisation matérielle est un succès! Nous félicitons le Haut-Commissaire du Mouhoun. Nous félicitons toutes les structures révolutionnaires de Dédougou. La ville de Dédougou est propre. Et je pense que les autres Haut-commissaires présents ici prendront note pour faire mieux.

On a souvent entendu dire que nous gaspillons l’argent pour des fêtes. Au premier anniversaire de la Révolution, une rumeur a couru comme quoi, nous avions dépensé des milliards pour organiser cet anniversaire, Le réactionnaire croit que seuls les milliards permettent de réussir la fête. Il ne sait pas que la part l’homme est plus importante que ce que 1’argent peut apporter. A l’an II de la RDP les réactionnaires ont parlé de centaines de millions. Au troisième anniversaire, ils ont parlé moins. Nous réussissons grâce à 1’organisation, à la discipline révolutionnaire, grâce à la volonté de servir les masses, grâce à la volonté d’être avec les masses.

C’est pourquoi, nous ne pouvons que féliciter le Secrétariat Général National des CDR, pour avoir réussi une telle conférence matériellement. Ceux qui sont dans les sociétés d’État, dans les bureaux, dans le commerce, à l’étranger disent que ce sont les CDR qui gâtent le pays. Si au moins, ils pouvaient faire leur travail comme le Secrétariat Général National des CDR, nous serions loin ! J’adresse mes félicitations à tous ceux qui ont œuvré pour le succès de cette conférence. Je le fais au nom du Conseil National de la Révolution ! Je le fais au nom du Gouvernement, Je le fais également au nom du reste du peuple. Il aurait été beau que tous les Burkinabè viennent voir le cadre de notre conférence. C’était beau. Et nous donnons mission à notre Ministre de la Planification et du Développement Populaire de prévoir la construction de grandes salles pour parler, comme nous l’avons fait à Dédougou. Je ne sais pas où on va trouver l’argent. De toute façon l’argent sera trouvé. Pour reconstruire, il faut casser. Après l’argent viendra. Nous avons toujours procédé ainsi. Des nôtres veulent voir 1’argent d’abord avant de casser. Quand l’argent arrive, ils « bouffent » Or, nous, après avoir déjà cassé, nous sommes condamnés à reconstruire.

Nous sommes des révolutionnaires, ce que vous avez décidé a été bien entendu. Nous prendrons des décisions conséquentes. Soyez-en assurés ! Pour commencer, à partir de ce soir, le Ministre du Commerce et de l’Approvisionnement du Peuple est chargé de la publication d’un raabo portant interdiction d’importer des fruits, au Burkina Faso (applaudissements).

Celui qui ne veut pas manger nos mangues, nos oranges, il n’a qu’à Laisser. Celui qui ne veut pas des raisins, le Frère Sylvestre de Goundi dans la Province du Sanguié en produit, Il faut manger ceux-là. Celui qui veut manger des pommes on plantera des pommiers ici sous climatiseurs pour avoir la température qu’il faut, et alors une pomme coûtera 14.525 F. CFA.

Les petits bourgeois disent : « Au lieu d’interdire, il faut mettre des taxes ». C’est une attitude réactionnaire anti¬peuple. Selon leur explication, ils veulent dire ceci : une pomme coûte 100 F CFA. En taxant, elle peut coûter 175 F CFA, 500 F CFA, voire 1000 F CFA. Celui qui peut acheter, achète. Ainsi les taxes reviennent à l’État burkinabè. Ce n’est pas bon. Pourquoi ? Leur raisonnement veut dire que le peuple ne consommera pas les produits qui coûtent cher. Par contre, le bourgeois s’il a l’argent, peut consommer ce qu’il veut. Ainsi donc le peuple regarde le bourgeois manger sa pomme, on a envie, l’eau lui vient à la bouche, c’est de la frustration. Et les gens deviennent malheureux. Et chacun est prêt à volet pour acheter une pomme parce qu’elle coute 14.525 F CFA. Nous n’allons pas mettre des taxes, nous allons interdire purement et simplement les produits concurrents. Dire qu’au Burkina Faso celui qui veut acheter une voiture de 700 millions est libre de le faire, cela veut dire que vous encouragez une minorité à tout faire pour avoir 700 millions de francs pour se distinguer. C’est ça le luxe. Le luxe est du superflu dans la qualité. Nous ne voulons pas de luxe. Nous ne voulons que des choses utiles, belles, bonnes. Le luxe c’est la différence qui fait qu’on n’est pas comme les autres.

Y-a-t-il combien de sortes de papier hygiénique au Burkina Faso ? Il en existe plusieurs modèles,  or ça fait le même travail. Pourquoi cette différence ? C’est parce que chacun veut se sentir différent des autres. Quand nous disons « il faut consommer burkinabé », il faut aller jusqu’au bout. Les soutiens-gorge, les slips, tout ça doit être en Faso Dan Fani (rires). Il faut aller jusqu’au bout. Une femme qui achète un soutien-gorge à 12.000 F, 15.000 F, 25.000 F CFA, c’est pourquoi faire ? Quand on utilise ça c’est qu’on est prisonnier d’un style de consommation. A la rigueur, une jeune fille qui n’a pas compris peut penser que c’est un élément supplémentaire pour conquérir celui pour qui elle a de doux yeux. Mais une femme mariée qui a des enfants, un soutien-gorge de 25.000 F CFA, où ça l’amène ? (rires). Prenez 1000 F CFA, pour acheter une étoffe Faso Dan Fani, l’aiguille 75 F et le fil 50 F vous pouvez coudre vous-mêmes votre soutien-gorge. Vous pouvez en coudre quatre pour la durée du Plan Quinquennal (rires).

Je vous dis que tout ce que nous pouvons interdire, nous allons interdire ! On a crié au protectionnisme, ce n’est pas nous qui l’avons inventé. Quand les Français veulent acheter des avions AWACS aux Américains, ils exigent, qu’en échange, les Américains achètent du matériel aussi en France pour équilibrer, Nous aussi, nous connaissons la balance commerciale. Quand les Français achètent le gaz et d’autres produits en Algérie, ils exigent que l’Algérie achète certains produits chez eux pour que ça soit équilibré. Ce que nous allons tous faire ! D’ailleurs je vais voir le cardinal pour lui dire d’interdire l’importation des chapelets, des médailles et des croix au Burkina Faso. La révolution n’est pas contre la religion. Nos bijoutiers de la place peuvent les fabriquer. S’il s’agit de leur bénédiction, nous avons des gens capables de le faire, et ça va marcher. (Rires) Le cardinal n’a pas besoin de les bénir lui-même. Il peut déléguer quelqu’un pour le faire, et ça va être valable. Pourquoi les importer de très loin, alors qu’on peut les fabriquer chez nous ? Ceux qui les fabriquent là-bas sont guidés par leur profit uniquement. Les fabricants de chapelets ne ‘croient pas forcément au Christ, c’est l’argent qui les intéresse.

Pour les musulmans, à partir de maintenant, des turbans Faso Dan Fani (rires).

On ne va plus importer des bibles aussi. Les imprimeries de la place vont désormais imprimer la bible. La Révolution n’est pas contre la religion.

L’importation des sacs en cuir, des chaussures, des ceintures sera interdite.

Camarades, je voudrais, simplement vous dire que j’ai bien reçu votre message. Les mesures que vous demandez seront prises continuellement. Mais il faudrait les assumer sur le terrain. Et c’est nous tous qui allons les assumer. Que personne ne dise qu’il mange mal depuis qu’on interdit 1’importation de tel ou tel cube Maggi. Désormais du soumbala ! En Inde, Gandhi a lutté contre le colonialisme anglais en refusant de porter les habits anglais. Il s’est mis lui-même à tisser. Et c’est comme ça que ses compatriotes indiens l’ont suivi massivement. Ainsi les capitalistes de 1’industrie textile anglaise ont fait pression sur les autorités anglaises pour qu’elles améliorent leurs relations avec les Indes. C’est ainsi que Gandhi est allé jeter le sel dans le fleuve pour protester contre son importation aux Indes. Ensuite les indiens ont récupéré l’eau pour la sécher afin d’avoir du sel de leurs propres mains.

Quel est l’ingénieur qui n’est pas fier de boire l’eau de nos barrages, de nos puits creusés par nous-mêmes ? Quelle fierté l’on peut avoir en ouvrant un robinet d’eau à OUAGADOUGOU, parce que c’est construit par telle ou telle source de financement ? Il n’y a pas de routes ! Les Burkinabé vont se doter de routes dans toutes les provinces. On n’entendra plus quelqu’un dire « chez nous, il n’y a pas de routes parce que nous ne sommes pas aimés. » Celui qui s’aime se donne la route ! Celui qui ne s’aime pas se laisse tomber. Chacun sait maintenant que la route dépend de nous et non plus de l’endettement extérieur.

Nous aurons bientôt la Troisième Conférence Nationale des CDR, Mais avant cela, nous aurons comme rendez-vous intermédiaire l’anniversaire de la mort de KWAME N’KRUMAH. Il nous faudra nous opposer à la balkanisation de l’Afrique, Il avait voulu que les Africains soient unis afin d’être plus forts pour pouvoir résister. Faute pour nous d’avoir accepté de nous unir, nous sommes partis en petits morceaux. Nous devons nous souvenir du combat de KWAME N’KRUMAH. Et nous devons nous souvenir que les Africains doivent travailler à leur unité. Ce sera difficile, parce que nos égoïsmes sont là. Le chauvinisme est là, nos faiblesses sont là. Nos incompréhensions sont là. Tout cela va s’opposer à cette unité. Mais nous devons tout faire pour nous entendre avec nos voisins avec les autres Africains. Et c’est là que nous allons perpétuer ce que KWAME Nkrumah nous a enseigné à son temps, à savoir : « L’Afrique doit s’unir ! » Il y a les réactionnaires qui sont contents aujourd’hui que KWAME N’KRUMAH soit mort, parce qu’ils peuvent maintenant être tranquilles pour mourir tranquillement de leur pouvoir féodal et égoïste. Nous, nous ne sommes pas de ceux-là ! Nous devons être tristes parce que KWAME N’KRUMAH est mort ! La tristesse révolutionnaire doit leur enseigner de dépasser celui-là que nous pleurons pour ses valeurs. Donc, on prend un peu de ses valeurs pour aller loin. C’est ça la révolution,

Camarades, nous aurons notre Troisième Conférence Nationale des CDR encore plus grande pour renforcer davantage la révolution ici au Burkina qui est l’affaire de personne, qui est l’affaire de tous, que plus personne ne pourra déraciner. Je vous prie de m’excuser si j’ai été long. Je voudrais souhaiter bon retour à chacun de vous dans son CDR, dans sa structure de base, L’UFB, l’UNAB, les pionniers. Je voudrais souhaiter bon retour à tous nos amis qui ont accepté de faire le déplacement de Dédougou. Nous allons partir. Et puis nous allons nous retrouver face à nous-mêmes, face à notre conscience de révolutionnaire ou de réactionnaire. Nous allons avoir à tordre le cou à ce Goshu Woldé qui est en chacun de nous. Le petit cochon qui veut se réveiller chez nous, on doit l’étouffer, pour laisser vivre et parler seule la voix du révolutionnaire, du militant.

Cela pourra se faire, et chercher avec tous les Burkinabè l’unité nécessaire pour avancer, combattre au contraire l’opportunisme et tous ceux qui s’opposent à l’unité. Celui qui s’appuie sur l’opportunisme périra de l’opportunisme, l’opportunisme n’a jamais nourri aucun régime.

Je voudrais déclarer clos les travaux de la Deuxième Conférence Nationale des CDR du Burkina. Mais ce n’est jamais clos, puisque les travaux vont maintenant commencer.

Je voudrais donc déclarer ouvert le combat pour le triomphe des justes résolutions de la Deuxième Conférence Nationale des CDR ! (applaudissements).

LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS !

LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS t

Camarades, l’Impérialisme ! A bas !

Le néo-colonialisme ! A bas !

Le fantochisme ! A bas !

Les hiboux au regard gluant ! A bas !

Les tortues à double carapace !  A bas !

Les camélions équilibristes ! A bas !

Les musaraignes ! A bas !

Les charognards ! A bas !

Les dindons gonflés ! A bas !

Camarades, Gloire ! Au peuple !

Victoire ! Au peuple !

Dignité ! Au peuple !

Pouvoir ! Au peuple !

Tout le pouvoir ! Au peuple !

LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS !

Je vous remercie.

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