par Mouhammadou Lamine Bara LO
publié le 15 octobre 2012 sur http://jeunemanager.org
Aujourd’hui, il s’avère nécessaire de rappeler le pas de géant que connût le Burkina-Faso durant quatre années de révolution dirigée par le Capitaine Thomas Sankara qui disait : « Parce que de toutes les races humaines, nous appartenons à celles qui ont le plus souffert, nous nous sommes jurés de ne plus jamais accepter sur la moindre parcelle de cette terre le moindre déni de justice. »
Lundi le 15 octobre 2012, c’est le 25 ème anniversaire de l’assassinat de Sankara qui disait : « Je souhaite qu’on garde de moi l’image d’un homme qui a mené une vie utile pour tous. »
Dans cet article, nous comptons nous remémorer, signaler et rappeler les réalisations de ce dirigeant africain, intègre et dévoué à son peuple, en seulement quatre années de présidence. Assassiné pour ses idées et son intégrité à l’âge de 38 ans, son slogan était : « (il faut) oser inventer l’avenir. »
Lorsqu’il s’installa au pouvoir, Thomas Sankara changea le Nom de son pays. Ainsi, la « Haute-Volta » devint le « Burkina Faso » qui signifie le « Pays des hommes intègres » avec comme devise : « La patrie ou la mort, nous vaincrons ! » Il baissa son salaire de président alors que les hauts dirigeants du pays perdaient des privilèges. Par exemple, les voyages diplomatiques en avion ne s’effectuaient désormais qu’en classe économique tandis que les Mercedes présidentielles et ministérielles laissèrent place à des Renault 5 françaises. Ainsi, le jeune président entreprit la rééducation de son peuple en commençant par les gouvernants à qui il exigea l’intégrité. Pour cela, le peuple devait se débarrasser de certaines mentalités, selon le PF. « Il nous faut travailler à décoloniser les mentalités et réaliser le bonheur à la limite des sacrifices auxquels nous devons consentir. » Le changement du Nom du pays était donc un premier acte pour diriger le peuple vers la quête d’une certaine intégrité. Aussi, la devise du pays est lourde de sens : « La patrie ou la mort, nous vaincrons ! » À travers elle et le nouveau Nom du pays, il fallait comprendre que les révolutionnaires burkinabés étaient des hommes intègres prêts à mourir pour leur patrie.
Thomas Sankara fut l’incarnation de cette devise pour trois raisons :
– D’une part, il a lutté sur tous les plans pour et avec son peuple. Il disait : « Je préfère (faire) un pas avec le peuple que dix pas sans le peuple. »
– D’autre part, il a été tué pour ce peuple alors que, depuis plus d’un an, les rumeurs courraient partout qu’un coup d’état se préparait contre lui, par certaines puissances occidentales et aussi certains dirigeants africains en complicité avec certains acteurs mêmes de la révolution. Dans son discours du 4 août 1987, jour du quatrième anniversaire de la révolution, il prêcha la tolérance, le dialogue. « Nous devrions nous mettre en garde contre une sorte d’unité stérile, paralysante, monolithique. Cherchons plutôt l’enrichissement, la diversité et la différence. Nous avons besoin d’idées et d’activités riches de plusieurs nuances, pour aller de l’avant en acceptant la critique et l’autocritique en vue d’un seul objectif : le bonheur du peuple. » Et il lance : « Préférons la force de l’argument à l’argument de la force ! » Malgré ce mémorable discours, le PF fut victime de l’argument de la force.
– La troisième raison est qu’on peut affirmer que Thomas Sankara a vaincu ses adversaires puisque ses idées demeurent toujours pour nombre de burkinabés et d’africains une référence. « Les (bonnes) idées ne meurent pas », disait-il le 8 octobre 1987, une semaine seulement avant son assassinat. De plus, il suscita aux burkinabés le fait de compter toujours sur leurs propres forces.
Les objectifs et priorités de la révolution étaient évidents à travers les propos du PF : « Notre révolution est et doit être permanente, l’action collective des révolutionnaires pour transformer la réalité et améliorer la situation concrète des masses de notre pays. Notre révolution n’aura de valeur que si en regardant derrière nous, en regardant à nos côtés et en regardant devant nous, nous pouvons dire que les Burkinabés sont, grâce à la révolution, un peu plus heureux, parce qu’ils ont de l’eau saine à boire, parce qu’ils ont une alimentation abondante, suffisante, parce qu’ils ont une santé resplendissante, parce qu’ils ont l’éducation, parce qu’ils ont des logements décents, parce qu’ils sont mieux vêtus, parce qu’ils ont droit aux loisirs, parce qu’ils ont l’occasion de jouir de plus de liberté, de plus de démocratie, de plus de dignité. Notre révolution n’aura de raison d’être que si elle peut répondre concrètement à ces questions. »
Quelle vision, quel espoir et quel engagement pour son peuple ! Ainsi, il fallait travailler fort pour améliorer les conditions de vie de chaque burkinabé.
Notons ici quelques réalisations :
– En 1986, donc à la troisième année de la révolution, le Burkina Faso était alimentairement auto-suffisant. ( NDLR, cette affirmation parcourt le net malheureusement sans que jamais personne n’en donne la source. Or l’interview du 4 octobre 1987 voir à l’adresse , montre que l’autosuffisance alimentaire reste ecore un objectif en octobre 1987 ).
– L’opération « Vaccination Commando » où deux millions et demi de burkinabés furent vaccinés en une semaine permit d’éradiquer la polio, la rougeole et la méningite. L’OMS félicita le président Sankara.
– L’opération « Alpha Commando » où le gouvernement de Sankara se donna pour objectif d’alphabétiser plus de cinq millions de burkinabés, y compris les femmes, fait que de 1983 à 1985, le taux de scolarisation passa de 16,5% à 20,9%. La révolution fut alors félicitée par l’UNICEF.
– Le président Thomas Sankara était très soucieux de l’environnement, chose qui préoccupe toute l’humanité actuellement. Par exemple, pour lutter contre la désertification, il fit planter des millions d’arbres pour reboiser le pays.
– L’opération « Un village, un bosquet » eut du ssuccès.
Au niveau des infrastructures, Sankara a fait désenclaver les régions du pays à travers des projets de constructions de routes et de chemin de fer. La construction de logements sociaux et de cités dans chaque province, de dispensaires dans toutes les localités où il n’y en avait pas, de pharmacies populaires et d’hôpitaux avec ambulance pour chaque province furent de grandes réalisations.
Le président Sankara a beaucoup milité pour l’émancipation de la femme qui avait tant besoin d’alphabétisation, d’une part, et de garantie d’emploi d’autre part. À noter qu’on parle des années 1983 à 1987. Il a nommé des femmes à la tête de différents ministères. Il dit : « Il n’y a pas de révolution sociale véritable que lorsque la femme est libérée. Que jamais mes yeux ne voient une société où la moitié du peuple est maintenue dans le silence. J’entends le vacarme de ce silence des femmes, je pressens le grondement de leur bourrasque, je sens la furie de leur révolte. J’attends et espère l’irruption féconde de la révolution dont elles traduiront la force et la rigoureuse justesse sorties de leurs entrailles d’opprimées. »
À présent, écoutons le Président du Faso :
« Je sais que je ne détiens pas la solution parfaite mais s’il n’y avait que 60% de juste dans ce que je décide, je le ferais. Et là, selon moi, nous sommes au-dessus de ce pourcentage. »
« On ne peut rien faire tant qu’on n’impose pas aux mentalités des schémas de rigueur. »
« Notre pays a besoin d’hommes libres pour mettre en place un monde de paix et d’amour. »
« Je souhaite que la conviction gagne tous les autres pour que ce qui semble être aujourd’hui des sacrifices devienne pour eux des actes normaux. »
« Nous encourageons l’aide qui nous aide à nous passer de l’aide. Mais en général la politique d’assistance et d’aide n’aboutit qu’à nous désorganiser, à nous asservir et à nous déresponsabiliser. »
« Tant qu’il y aura l’oppression et l’exploitation, il y aura toujours deux justices et deux démocraties : celle des oppresseurs et celle des opprimés, celle des exploiteurs et celle des exploités. La justice sous la révolution démocratique et populaire sera toujours celle des opprimés et des exploités contre la justice néocoloniale d’hier, qui était celle des oppresseurs et des exploiteurs. »« Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous les modèles que tous les charlatans de même acabit ont essayé de nous vendre 20 années durant. Il ne saurait y avoir pour nous de salut en dehors de ce refus-là. Pas de développement en dehors de cette rupture-là. Il faut ranimer la confiance du peuple en lui-même en lui rappelant qu’il a été grand hier et donc, peut-être aujourd’hui et demain ; (il faut) fonder l’espoir. »
Mouhammadou Lamine Bara
Source : http://jeunemanager.org