QUELLE ORIENTATION FAUT-IL DONNER A L’UNION AFRICAINE ?

Konan N’GUESSAN

Lorsque les deux principaux courants qui se sont affichés lors du sommet des chefs d’Etat et de gouvernements de l’Union Africaine qui s’est tenu à Acrra (Ghana) du 30 juin au 02 juillet 2007 exposent leurs conceptions de l’Unité Africaine, l’on note qu’il y ressort la problématique de l’orientation réelle que doit prendre l’organisation panafricaine. La toile de fond commune à ces deux courants est la réalité qu’il y a en Afrique après le tourbillon des nationalismes, un besoin, une nécessité ou une urgence politique et économique de lier des individus, des peuples, des Etats, des particularités à une idéologie, à des intérêts communs.

Que faut-il entendre en effet par cet autre concept, l’Union Africaine : unité des Etats dans la diversité, interdépendance, homogénéisation des différentes sociétés ou plutôt accentuation des disparités, renforcement des hiatus qui séparent les niveaux de vie, les identités, les originalités ?

Le choix du Ghana, terre natale de Kwame N’KRUMA, qui dans son discours mémorable du 24 mai 1963 à Addis-Abeba ( Ethiopie) lançait les jalons d’une union continentale est à la fois un symbole dans la marche de l’Afrique pour son union, une bénédiction pour les travaux, une reconnaissance et un hommage aussi bien au pionnier N’KRUMAH qu’à d’autres dignes fils du continent tels Patrice LUMUBA, Steve BIKO et Thomas SANKARA qui ont prématurément et lâchement été assassinés pour  avoir  défendu leur peuple, leur continent , pour un meilleur devenir de l’humanité toute entière.

Rappelons l’idéologie défendue par les deux courants. Le courant conduit par la Libye du Frère guide de la révolution libyenne Mouhamar KADAFFI et le Sénégal ; courant qui prône la formation immédiate d’un gouvernement de l’union africaine. Le second courant conduit par La République sud africaine et le Nigeria prône l’idée d’une constitution graduelle des Etats-Unis d’Afrique. Les deux positions ne tarirent pas d’arguments. La première soutient que face à l’incapacité des organisations sous-régionales de conduire les Etats vers la réalisation des objectifs d’essor socio-économique et d’unité, bien qu’elles aient été mise en place depuis plusieurs décennies, il est temps d’entreprendre  directement l’approche d’une intégration à l’échelle continentale. La seconde position estime qu’au regard de la précarité des Etats, du défaut mécanisme de financement fiable des institutions sous-régionales, de la faible avancée des organisations sous-régionales, il est prématuré, incongrue de passer à la phase de la constitution d’un gouvernement panafricain. Face à cette divergence de vues, le sommet a adopté une position mesurée en nommant une commission d’experts chargée d‘étudier les modalités de mise en place d’un gouvernement de l’unité africaine. La commission produira ses conclusions lors du prochain sommet à Luanda.

Quelque soit l’angle sous lequel cette énième commission abordera la formation des Etats-Unis d’Afrique, elle devra surtout proposer des mécanismes concrets pour sortir le continent du gouffre de la décrépitude, de l’ornière de l’entrée précipité, obligatoire dans la mondialisation, de l’extrême pauvreté. Si l’intégration est réellement un produit né du processus d’organisation politico-économique des Etats (création de l’OUA, de communauté sous-régionales, membres d’organisations ayant en commun une même langue….), nécessaire et incontournable pour leur essor, elle doit d’abord signifier un cadre de mieux-être des populations, véritables propriétaires des ressources agricoles et du sous sol, des richesses immenses, mais mal exploitées du continent. Ce principe devra âtre favorisé et renforcé par le mode de gouvernance.  La politique des Etats fédérés devra tourner résolument le dos aux politiques de prestige sans incidence directe sur le niveau de vie des populations. La gouvernance devra se traduire concrètement par la conduite de programmes de réduction de la pauvreté pratiques et adaptés aux contextes socio-économiques des Etats, la définition d’un plan de redistribution des richesses approprié, et la mise en place d’institutions  pratiques, non pléthoriques et non budgétivores.

« Quand le vin est tiré, il faut le boire », dit l’adage. C’est la raison pour laquelle nous assistons impuissants à l’entrée des pays africains dans la mondialisation. Dans le contexte de l’ouverture qu’impose l’entrée précipitée dans la mondialisation, il s’impose à l’Afrique de mettre en place une organisation à la hauteur des enjeux et des défis de la mondialisation. Le succès mitigé de l’union Européenne, l’Europe des 27, bien qu’il ne s’agisse pas d’une intégration mais plutôt d’une union, n’est-il pas une preuve qu’un regroupement bien pensé est une solution dans la quête d’un mieux-être dans un monde devenu un village planétaire, où les  rapports entre entreprises, entre économies ou entre Etats s’apparentent à une jungle ? La compétition demeure désormais la seule force motrice dans un univers mondialisé où que l’on soit un individu, une entreprise ou un pays, l’important pour vivre est d’être plus compétitif que l’autre.

Konan N’GUESSAN, Côte d’Ivoire. Juillet 2007

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