4 Août 2007 : Il y a 24 ans la révolution

 Jonas Hien

 

 Cet article a été publié dans le numéro daté du 6 août 2007 de l’hebdomadaire Bendré (voir à l’adresse http://www.journalbendre.net/. Jonas Hien est le Président de la Fondation Sankara pour l’Humanité (voir la présentation à l’adresse http://thomassankara.net/?p=0319 ) et Vice Président du Comité d’Organisation du 20ème anniversaire de la mort de Thomas Sankara)

 

Haute-Volta. Un pays de 274 000 km², 7 millions d’habitants, situé au cœur de l’Afrique. Pendant de nombreuses décennies, la Haute-Volta, comme la plupart des pays africains, a subi la domination coloniale. Pendant longtemps également, ce pays a rêvé d’un Chef d’Etat à même d’opérer des changements stratégiques pour une Haute-Volta nouvelle, aux ambitions nouvelles pour un autre et nouveau développement.

C’est dans ce contexte, alors que le soleil marchait nuitamment vers 21h30mn du 4 août de l’an 1983 qu’apparut un homme qui allait donner corps et vie au rêve des Voltaïques : il s’appelait Thomas Sankara. Il était militaire des forces armées nationales avec le grade de Capitaine. Il venait d’être porté à la tête du Conseil national de la Révolution (CNR), instance de la nouvelle direction politique, Chef de l’Etat, leader de 7 millions de Voltaïques à l’époque, patriote incomparable et porteur d’espoir.

Thomas Sankara naquit dans une famille aux revenus modestes. Dès son jeune âge, il lutta pour la cause de sa patrie et de son peuple. Son retour triomphal dans le pays après la guerre injuste contre le peuple frère du Mali en 1974 et ses propos révolutionnaires sous le Comité militaire de Redressement pour le Progrès national (CMRPN) alors qu’il était Secrétaire d’Etat à l’information, et sous le Conseil du Salut du Peuple (CSP), en sa qualité de premier ministre, permettaient déjà aux Voltaïques de voir en cet officier de l’armée nationale un homme valeureux. La grande lutte anti-apartheid et anti-impérialiste dirigée par le président Sankara confirmera plus tard la vision précédente en cette « nuit du 4 août 1983 aux premiers scintillements des étoiles sur le ciel de notre patrie ». Sur le front de la lutte contre l’impérialisme dominant, le Président Thomas Sankara se souciait déjà du développement du pays dont il avait désormais la destinée.

La Haute-Volta était en retard sur tous les plans de développement et le Président Sankara semblait courir pour rattraper le retard accusé. C’est ainsi qu’il organisa activement et conduisit la lutte avec toute la Nation pour construire un paradis libre, prospère, et baptisa la Haute-Volta « BURKINA FASO » le 4 août 1984, c’est-à-dire « pays des hommes libres et intègres. »

Avec l’instauration d’un régime révolutionnaire, il entreprit la mise en œuvre d’un vaste programme de construction d’une nouvelle patrie contenu dans le Discours d’Orientation Politique (DOP) prononcé le 2 octobre 1983 par le président lui-même. Il confirma la souveraineté du peuple par la Révolution démocratique et Populaire (RDP), anti-féodale et anti-impérialiste. Les forces armées populaires sont désormais acquises à la cause du peuple, la mentalité du peuple est transformée et celui-ci connaît désormais ses droits et ses devoirs.

Dans ses discours prophétiques et visionnaires, Thomas Sankara prévoyait les grands bouleversements économiques et la dévaluation du continent africain. En guise de prévention à ces désastres futurs, il engagea le peuple du Burkina Faso dans la voie du travail inlassable, à produire et à consommer national ; c’est-à-dire à « compter d’abord sur ses propres forces ».

A l’endroit des peuples africains, il conseilla la méfiance vis-à-vis des puissances capitalistes. Il prôna la création des Etats-Unis d’Afrique, comme l’avaient préconisé bien d’autres leaders africains. L’union des Etats devait avoir sa propre monnaie, symbole de l’unité véritable des Africains pour prendre eux-mêmes en main leur destin. Pour Sankara, l’« aide » extérieure au développement des puissances capitalistes est une sorte de corruption, d’aliénation et une manière de désorganiser les Africains afin de mieux instaurer la domination car s’il s’agissait d’une aide véritable, ces donateurs devaient commencer par les quartiers les plus pauvres de leurs pays respectifs.

 Au Burkina Faso, la Révolution continuait à libérer les consciences. Le Président Thomas Sankara prit à bras le corps les problèmes complexes du chômage, de la promotion de la femme, des jeunes, de la lutte contre la prostitution et la mendicité. Il appela à l’unité nationale tout en balayant « les fonctionnaires et les militaires pourris », « les commerçants véreux », « les réactionnaires corrompus » et les « valets locaux de l’impérialisme », c’est-à-dire les « ennemis du peuple. » La France était sans cesse indexée pour son ingérence dans les affaires des pays africains indépendants. C’est pourquoi le Président du Faso ne comprenait pas la présence d’une base militaire française dans certains pays africains dits indépendants. L’attachement indéfectible de la Côte d’Ivoire à la France était aux yeux du Président du Conseil national de la Révolution la présence de l’impérialisme aux portes du Burkina Faso.

Par contre, des pays progressistes comme la Libye, Cuba, la Corée du Nord, etc. inspiraient la Révolution burkinabè. Il prévoyait de faire du Ghana et du Burkina Faso un seul Etat, comme un début de la fédération des pays africains. De l’histoire politique de la Haute-Volta au Burkina Faso, on n’a vu aucun Chef d’Etat accepter risquer sa vie pour conduire le pays et le peuple sur la voie de la prospérité et de la victoire avec conviction, comme le fit Thomas Sankara.

C’est pourquoi, le Président du CNR et du Faso faisait l’orgueil du peuple burkinabè. Les peuples du monde entier respectaient profondément cet « enfant terrible de l’Afrique francophone, d’une finesse intelligence », « le Président le plus surprenant de la planète » qui a voulu inventer l’avenir pour les peuples en lutte.

Thomas Sankara a libéré les consciences et transformé les mentalités des Burkinabè pour l’éternité. Il était cette conscience collective de la jeunesse africaine. Cet espoir a été assassiné le jeudi 15 octobre 1987 aux environs de 16h 30mn (GMT) à Ouagadougou, au Burkina Faso, accompagné de douze de ses collaborateurs par des hommes armés issus de l’armée nationale.

Pourtant, tout était bien parti ce 4 août 1983 pour alléger les souffrances des Burkinabè et les peuples africains. En ce 24è anniversaire de l’avènement de la Révolution burkinabè, nous devons tout simplement garder du Président Thomas Sankara « l’image d’un homme qui a mené une vie utile à tous. ».

 

Hien Jonas

 

Source Bendré http://www.journalbendre.net/spip.php?article1829

 

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