Placée sous le thème « Sourire au soleil », la 4e édition du Grand Prix de Poésie Thomas Sankara a livré son verdict ce mardi 21 mars 2023, à Ouagadougou. C’était en marge de la Journée internationale de la Poésie, célébrée tous les 21 mars de l’année.
Portée par la structure Afrique Wilila, le Grand Prix de Poésie Thomas Sankara se veut une compétition avec pour objectif de susciter la lecture et l’écriture au sein de la jeunesse, en lui offrant un cadre sain de formation et de perfectionnement dans les métiers du livre. Et au-delà d’être une compétition, c’est surtout une aubaine pour commémorer la Journée internationale de la poésie à travers une figure emblématique de l’art oratoire et du panafricanisme, à savoir Thomas Sankara.
4e édition du genre, la compétition avait été officiellement lancée le 21 décembre dernier. C’est donc dans les locaux de la Librairie Mercury qu’elle a connu son apothéose, ce 21 mars 2023. À en croire madame Noélie Hien, Présidente du Comité d’organisation, le thème de l’édition se veut un appel à l’espoir, à la résilience et à la combativité au vu du contexte difficile que connaît le Burkina Faso. Pour elle, il y a eu certes quelques imperfections liées à des difficultés de partenariats, mais n’empêche que tout s’est bien déroulé dans l’ensemble. « Aussi, nous avons eu une cinquantaine de candidatures, ce qui est en deçà de l’édition précédente. Et l’innovation cette année, a été de faire concomitamment les proclamations et la remise du Prix », a-t-elle soutenu.
Au terme donc de la proclamation des résultats, c’est Marie-Clotilde Bastide (France/Burkina Faso) qui repart avec le sacre suprême pour son œuvre « Retours » . Elle est directement talonnée par Dô Dao dit Drissa Sôdôrô (Burkina Faso) avec son œuvre « Sourire est espoir de résilience ». La 3e place revient à Nathalie Vincent-Arnaud (France) pour son son œuvre « Sourire au soleil ». Pour Boubacar Dao, président du jury, l’œuvre de madame Bastide, a d’abord séduit le jury pour sa sobriété, sa musicalité, pour la beauté de ses sonorités, son rythme qui ne laisse pas indifférent l’esthétique de ses figures de style, les émotions qu’elle fait vivre et qui procurent toute la splendeur de sa poéticité. Aussi, a-t-il ajouté, l’œuvre a émerveillé par la justesse et la pertinence du traitement de la thématique ainsi que la maîtrise de la langue d’expression.
Du reste, la lauréate du Grand Prix, Marie-Clotilde Bastide, n’a pas manqué d’exprimer sa joie. « C’est un grand honneur pour moi, car cela a été volontaire que je réponde à ce concours à cause du nom qu’il porte. Pour moi, Thomas Sankara est une référence en tant qu’homme politique révolutionnaire, mais aussi en tant que plume. Je trouve qu’il a des discours assez sublimes et que je relis régulièrement pour ne pas perdre le fil de sa pensée mais aussi pour le plaisir de son écriture. Et il faut dire que ce pays est une véritable source d’inspiration. C’est pourquoi j’écris beaucoup sur le quartier que j’habite. Je remercie l’ensemble des organisateurs, ainsi que tous les autres candidats », s’est-elle réjouie.
Une lecture de l’œuvre lauréate du Grand Prix est venue clore cette cérémonie de proclamation. Une lecture faite par Sabari Christian Dao, responsable de la structure Afrique Wilila. Il n’a d’ailleurs pas caché sa joie de voir l’aboutissement de cette 4e édition. Les protecteurs sont d’ores et déjà tournés vers la 5e édition.
Boukari OUÉDRAOGO
On trouvera un autre compte rendu à https://oxygenemag.info/2023/03/23/le-grand-prix-de-poesie-thomas-sankara-marie-clotilde-lemporte-haut-la-main/
Le Poëme de la lauréate Marie-Clotidle Bastide
RETOURS
Quand les guerres effrayées
par leurs ombres rampantes
quittent les territoires occupés
Djibo, Inata, Arbinda, Solenzo,
Foubé,Yirgou, Itangom
Et tant d’autres encore
Quand le calme soudain
apaise la dune rousse
Juste son clair silence
crissant avec le vent
Quand près du marigot
l’enfant avec sa flûte
s’endort sous les étoiles
dans la nuit du berger
Quand la vieille étonnée
respire le bonheur
d’un foyer retrouvé
Se saisir du pilon laissé à l’abandon.
Bruit sourd du quotidien renaissant de l’horreur
Quand le père tête haute
attrape ses outils
à l’abri d’une pluie
Et le mil orgueilleux sur la terre attendrie
grandit avec le temps regagné du labeur
Quand l’enfant accroché
au fil d’un cerf-volant
vole en éclats de rire
près de sa mère heureuse
accueillant sur son sein
la beauté ordinaire d’une journée sereine
Quand le marché abonde
de tanties accroupies
au milieu des oignons, des tomates juteuses
pagnes aux couleurs vives allumant l’avenir
sur les ventres nourris
Quand les vieux épuisés par d’inutiles errances
causent tranquillement
sous le grand baobab
de demain sans barbare
et racontent aux enfants
comment planter des arbres
Quand l’école portes ouvertes
accueille ses élèves
arrivés en haillons d’un passé incertain
tout en ligne de fuite
Ils se posent légers
avides de savoirs
Le monde ici est vaste
Quand les guerres vaincues
fuient les villes suppliciées
Solhan,Gorom Gorom, Pobe,
Nouna, Markoye, Sebba, Gaskindé
Et tant d’autres encore
Alors
cœur sécurisé et ailes déployées
sourire au soleil
Dans l’étincelle des vies
arrachées au malheur
ensemble
sourire au soleil.
Marie-Clotilde Bastide
janvier 2023