Un poème de Marie-Clotile Bastide
RETOURS
Quand les guerres effrayées
par leurs ombres rampantes
quittent les territoires occupés
Djibo, Inata, Arbinda, Solenzo,
Foubé,Yirgou, Itangom
Et tant d’autres encore
Quand le calme soudain
apaise la dune rousse
Juste son clair silence
crissant avec le vent
Quand près du marigot
l’enfant avec sa flûte
s’endort sous les étoiles
dans la nuit du berger
Quand la vieille étonnée
respire le bonheur
d’un foyer retrouvé
Se saisir du pilon laissé à l’abandon.
Bruit sourd du quotidien renaissant de l’horreur
Quand le père tête haute
attrape ses outils
à l’abri d’une pluie
Et le mil orgueilleux sur la terre attendrie
grandit avec le temps regagné du labeur
Quand l’enfant accroché
au fil d’un cerf-volant
vole en éclats de rire
près de sa mère heureuse
accueillant sur son sein
la beauté ordinaire d’une journée sereine
Quand le marché abonde
de tanties accroupies
au milieu des oignons, des tomates juteuses
pagnes aux couleurs vives allumant l’avenir
sur les ventres nourris
Quand les vieux épuisés par d’inutiles errances
causent tranquillement
sous le grand baobab
de demain sans barbare
et racontent aux enfants
comment planter des arbres
Quand l’école portes ouvertes
accueille ses élèves
arrivés en haillons d’un passé incertain
tout en ligne de fuite
Ils se posent légers
avides de savoirs
Le monde ici est vaste
Quand les guerres vaincues
fuient les villes suppliciées
Solhan,Gorom Gorom, Pobe,
Nouna, Markoye, Sebba, Gaskindé
Et tant d’autres encore
Alors
cœur sécurisé et ailes déployées
sourire au soleil
Dans l’étincelle des vies
arrachées au malheur
ensemble
sourire au soleil.
Marie-Clotilde Bastide janvier 2023