Cher Wambi, le procès de l’assassinat du capitaine Thomas Sankara reprend le lundi 25 octobre 2021 à partir de 9h à la salle de Banquets de Ouaga 2000. L’audience avait été suspendue le 11 octobre dernier, lors de la première journée du procès, pour deux semaines afin de permettre aux avocats commis d’office de disposer d’un peu plus de temps pour compulser les 20 000 pages du dossier.

Dans l’attente de cette reprise du procès, il y a un sujet qui continue de défrayer la chronique : il s’agit de la requête formulée par les avocats de la partie civile et même soutenue par le parquet militaire d’autoriser l’enregistrement de ce procès afin de constituer des archives sonores et audiovisuelles pour les générations futures. Les avocats de la défense, eux, étaient contre un tel procédé. Finalement, dans une décision « avant dire droit », cette requête avait été rejetée par Urbain Méda, le président de la chambre de première instance du tribunal militaire de Ouagadougou.

Cher cousin, malgré cette décision de la chambre de jugement, ceux qui tiennent à ce que le procès soit enregistré n’en démordent pas puisqu’une pétition en ce sens circule sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. L’objectif est de recueillir 10 000 signatures. A la date d’hier à 15h30, lorsque je suis passé sur le net pour voir comment cette pétition évoluait, j’ai relevé que 3 699 personnes l’avaient signée, soit un taux de réalisation de 36,99% de l’objectif visé. [NDLR : La pétition est en ligne à http://www.thomassankara.net/cbxpetition/appel-international-proces-de-lassassinat-de-thomas-sankara-de-compagnons-soit-filme/)

A ce propos, j’ai reçu ce laïus du Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo qui soutient que des chercheurs d’ici et d’ailleurs demandent l’archivage audiovisuel du procès Sankara. Je m’empresse de te le proposer pour lecture :

« Le Burkina Faso vit un grand paradoxe dans le procès Sankara. Le pays a rouvert le dossier et consenti des moyens importants pour l’instruction de l’affaire et le procès qui se tient enfin. De façon courageuse et avec le soutien de l’État et de l’opinion nationale et internationale, le juge a travaillé à rassembler des archives à l’étranger, dont certaines ont dû être déclassifiées et expédiées de France. Cependant, il a été décidé qu’aucune archive audiovisuelle du procès ne sera constituée, les avocats de la défense s’y opposant.

Ainsi donc, nous avons dépensé une énergie folle, du temps précieux et des moyens importants pour quémander des archives à l’ex-colonisateur, dont nous vilipendions souvent la mauvaise foi, et nous refusons d’en constituer nous-mêmes pour nous-mêmes.

Bien sûr, les avocats de la défense, à ce qu’en disent des voix expertes, sont dans leur droit de refuser que « leurs voix » soient capturées et retransmises. On peut du reste les comprendre. Face aux fortes attentes de toutes parts et dans un climat aussi tendu, ils peuvent craindre pour leur sérénité et leur quiétude. Toutefois, qu’est-ce qui s’opposerait alors à un archivage sous scellés pendant une période assez longue, pour éviter cet écueil tout en permettant de servir les besoins de l’histoire et de la construction nationale ?

Nous sommes en effet en présence d’enjeux majeurs. L’histoire du continent souffre de l’insuffisance, de la fragilité et de la partialité des archives, dont l’importance, capitale, n’est pas saisie, ou alors l’est par d’autres, pas nécessairement au bénéfice des peuples africains. D’où l’injonction faite par Amadou Hampaté Ba de (re)constituer et de préserver systématiquement la mémoire, à tout prix. La mémoire est en effet le tremplin vers l’avenir (Ki-Zerbo), la sève nourricière des peuples et la ressource stratégique de la construction nationale.

En qualité de chercheur, je connais cette difficulté, j’ai dû passer une année entière de mon doctorat à collecter des données sur les banques et la politique monétaire dans l’UEMOA, données que mes collègues d’ailleurs avaient sur leur pays en format électronique, quasi immédiatement à la requête.

C’est pour cela qu’avec Bruno Jaffré, auteur de plusieurs livres sur Sankara et le Burkina Faso, je me suis associé à une géographe politique britannique du courant décolonial de l’Université d’Oxford ainsi qu’à un historien américain, tous auteurs de travaux sur la révolution, pour lancer un appel à pétition pour la sauvegarde de la mémoire du procès pour l’histoire et les besoins de la construction nationale.

Nous voulons par-là apporter, dans le concert des voix qui appellent à l’archivage audiovisuel, la raison de chercheurs d’ici et d’ailleurs, la demande solennelle d’hommes et de femmes de culture à servir l’histoire pour préserver l’avenir. Mes amis et moi, auteurs de la pétition, comprenons les avocats de la défense ; nous les implorons toutefois d’entrer dans l’histoire en servant l’avenir au-delà des contingences du moment ».

Dr Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, économiste-chercheur, Université Thomas Sankara, Institut FREE Afrik.

Source : https://www.lobservateur.bf/~paalga/index.php?option=com_k2&view=item&id=6161%3Afédération-burkinabè-de-football-tacle-irrégulier-de-lazare

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