par Pascale Larenaudie

26 octobre 2015

C’est le jeudi 15 octobre 2015 date symbolique que Per a Pace – Pour la Paix a choisi pour la projection d’un film, non encore finalisé dans sa version définitive, de Mehdi Lallaoui sur les actions de l’association au Burkina Faso. L’Aghja, lieu culturel à Ajaccio sensible au témoignage, s’est associée en ouvrant grandes ses portes à déjà quelques premières notes de reggae entendues.

Soixante-dix personnes étaient présentes en ce 15 octobre, date anniversaire de la mort du très emblématique Président Burkinabé, Thomas Sankara, en 1987. 28 ans ont passé.

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En 2014 et 2015, les événements se sont précipités et en près d’un an, le pays des hommes intègres a été bouleversé.

Un soulèvement populaire, en octobre 2014, chassait Blaise Compaoré du pouvoir, qui après 27 ans de présidence n’hésitait pas à influer pour remettre en cause l’article 37 de la constitution qui lui interdisait un nouveau mandat.

L’installation d’un gouvernement de transition a fait suite avec pour une de ses missions premières la mise en place de la future élection présidentielle prévue le 11 octobre 2015. Un coup d’état militaire, au soir du 17 septembre 2015, mené par le général Gilbert Diendéré, chef du régiment de la sécurité présidentielle et proche de Blaise Compaoré, stoppait la mise en place du processus démocratique.

Mais c’était sans compter sur le peuple et la société civile qui ont mis fin à ce coup d’état. Des femmes et des hommes fiers et courageux qui, au prix de leur vie, sont descendus dans la rue instantanément et pendant plusieurs jours pour défendre leur dignité et leur liberté portant haut et fort les paroles de Thomas Sankara « Tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront », « Malheur à ceux qui bâillonnent le peuple ! »

Aujourd’hui le gouvernement de transition a repris sa place et l’élection présidentielle aura lieu le 29 novembre 2015.

Mehdi Lallaoui est réalisateur et écrivain. Il est l’un des fondateurs de l’association Au Nom de la Mémoire. Il aime à filmer des femmes et des hommes qui se racontent dans leur vie pour transmettre une mémoire, une expérience en partage au travers souvent d’événements qui ont marqué l’histoire. Parmi ces thèmes privilégiés, les mémoires ouvrières liées souvent à l’immigration ; les mémoires urbaines, et en particulier la banlieue, et enfin les mémoires issues de la colonisation. Avec Per a Pace, il a réalisé un film et co-écrit un livre « Maroc, Terre de partage » qui racontent l’aventure humaine de 13 jeunes de 6 nationalités différentes dans l’Atlas et leurs rencontres avec des coopératives

Au Burkina Faso, Mehdi a mis, dans son film, en exergue la parole d’hommes engagés dans leur pays. C’est un voyage qui nous mène de Ouagadougou à Sindou en passant par Banfora et plus loin encore dans les villages de Pobié et Bori. Dans ces endroits, l’association Per a Pace y a des amis de longue date. Auprès et avec eux, elle s’est engagée dans le domaine de la santé, de l’éducation, de l’eau ce que l’exposition installée pour la circonstance à l’Aghja a mis en évidence.

Un film, empreint d’émotion, ou chacun s’exprime et délivre son message. C’est ainsi que l’on écoute Bayco avec l’association Bolo Yan (cœur dans la main) et son attachement aux valeurs de partage et d’échanges ; Timoko et son dévouement, avec l’association Djiguiya (chaîne de l’espoir) qu’il préside, aux enfants les plus démunis pour qu’ils puissent aller à l’école tout en s’attachant à leurs besoins les plus élémentaires ; Yacouba qui, représentant de la communauté villageoise, exprime sa crainte de voir la terre volée, ne pouvant rien laisser aux enfants, son besoin aussi de rencontres telles que les nôtres pour se projeter dans l’avenir et reprendre confiance. Et Samsklejah qui sous le baobab centenaire du village de Bori, ou Per a Pace a réalisé son 5ème forage rappelle la fraternité et la solidarité entre les peuples vecteurs de Paix, Peace.

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Samsklejah, chanteur reggae, exprime, depuis plusieurs années, par ses chansons ce besoin de liberté, de changer le monde pour plus de justice et de dignité. Des messages empreints des discours de Thomas Sankara. Il est l’un des animateurs du balai citoyen, mouvement non violent, animé par des jeunes, avec le musicien et rappeur Smockey. Le Balai citoyen incite les Burkinabés à s’engager et en octobre 2014, il a joué un rôle décisif dans la chute du président Blaise Compaoré.

C’est une projection de 52 minutes de belles images et de beaux visages rythmées par des paysages et une vie si humainement palpable qui, ce soir du 15 octobre 2015, n’a pas laissé indifférent les 70 personnes qui ont assisté à la projection et au débat. C’est l’émotion qui étreint les gorges, tout le monde est ravi de ses paroles partagées. La discussion très vite se poursuit et s’enrichit de l’expérience des membres de l’association.

Chacun est conscient des événements qui se sont produits et des enjeux économiques et politiques que représente l’Afrique. Avec ce témoignage, l’association Per a Pace s’attache à sensibiliser sur une situation souvent difficile et participe au projet émancipateur d’un peuple qui demande à vivre libre, vivre digne, vivre africain.

En ce jour du 15 octobre, il est rappelé qu’au bout d’une procédure de plusieurs années et suite à l’exhumation des corps supposés de Thomas Sankara et de ses 12 compagnons en mai dernier, la justice confirmait lors d’une audience rendue le 13 octobre que les corps avaient bien été criblés de balles sans avoir pour l’instant les résultats des tests d’ADN prouvant leur identité.

Le réseau international « Justice pour Sankara, Justice pour l’Afrique » qui effectue un travail considérable poursuit son action pour contribuer à faire la lumière de la participation française sur l’assassinat de Thomas Sankara en revenant sur son refus d’ouvrir une commission d’enquête parlementaire et en ouvrant ses archives.

Une pétition « Ouverture d’une enquête parlementaire sur les conditions de l’assassinat de THOMAS SANKARA » est en ligne (voir https://www.change.org/p/public-et-d%C3%A9cideurs-parlementaires-ouverture-d-une-enqu%C3%AAte-parlementaire-sur-les-conditions-de-l-assassinat-de-thomas-sankara) et continue à comptabiliser les signatures pour que la vérité soit dite et la reconstruction de relations plus sereines et constructives avec le continent africain.

Pascale Larenaudie

Je m’élève ici au nom de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils pourront faire entendre leur voix et la faire prendre en considération, réellement. Sur cette tribune beaucoup m’ont précédé, d’autres viendront après moi. Mais seuls quelques-uns feront la décision. Pourtant nous sommes officiellement présentés comme égaux. Eh bien, je me fais le porte-voix de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils peuvent se faire entendre. Oui, je veux donc parler au nom de tous les « laissés pour compte » parce que « je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger.” Thomas Sankara

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