“Thomas SANKARA : un modèle et un visionnaire” de Katemawo Sanou

“Thomas SANKARA : un modèle et un visionnaire” de Katemawo Sanou

J’étais étudiant à la Fac de Ouaga. Le 15 octobre 1987 à 16h00 je roulais sur le bitume aux environs du Conseil de l’Entente (siège du Conseil National de la Révolution). C’est à ce moment que tout les badauds s’arrêtent et se crispent : des coups de feu rétentissent dans l’enceinte du Conseil. Ca dure 15mn et puis une silense total. Je décide de continuer mon chemin et au niveau de la Radio je constate des militaires surarmés (fusils d’aasut et lance roquette) partout. Environ une heure plus tard, les programmes de la radio annoncent ce que la plupart des burkinabès craignaient. Un coup d’Etat ! Mais personne encore n’imagine que Thomas SANKARA est mort. On l’apprendra par RFI et la rumeur se propagera dans tout Ouaga comme une mauvaise odeur noséabonde….
Il n’y a pas eu beaucoup d’échos (y compris à l’étranger) sur toutes les exactions du régime de Blaise COMPAORE : bains de sang de Koudougou suite à la répression de la rebellion contre la mort de SANKARA….

A sa mort cet homme avait conquis plus que les coeurs, l’esprit et l’âme des Burkinabès et des africains je crois. Il était une modèle de volonté, de détermination, d’honnêteté. Ces paroles guidaient ses actes et vis versa. Il avait bien compris les maux qui minaient la jeunesse et l’économie africaine, les causes du sous-développement. Il avait réussi à responsabiliser les Burkinabè (compter d’abord sur soi-même avant de faire appel aux autres). Il avait compris les ressorts inéquitables de la dépendance de l’Afrique envers l’Occident. Et cela il voulait le changer. Je crois que c’est pour cela qu’il est mort.

Il a rêvé d’une Afrique en phase avec ses propres valeurs ouvertes sur le monde, une Afrique qui lève enfin la tête, une Afrique fière et réconnue à sa juste valeur. Je crois qu’il n’était pas dupe sur le rythme de l’évolution des mentalités et surtout économique, mais il savait par quel chemin il fallait commencer : s’appuyer avant tout sur les données et les réalités africaines. Pour cela c’était un objectiviste avec une énorme capacité de travail et de projection dans l’avenir. C’était cela SANKARA.
Certes il a commis des erreurs ! Ne se trompe pas celui qui n’agit pas !

Je voudrais dire ici que le deuil de SANKARA n’est pas encore fait au Burkina surtout dans la tête des jeunes. Sa mort injuste et cruelle n’a jamais été élucidée, il n’y a jamais eu de parole vraie de la part du pouvoir de Blaise COMPAORE sur les évènements du 15 octobre 1987. Pire des partis politiques se réclamant de lui sont instrumentalisés au Burkina pour exorciser et tenter la normalisation et la banalisation de sa mort. Mais pourquoi sa veuve et ses enfants ne vivent toujours pas au Burkina ? Pourquoi la plainte déposée par sa famille pour assassinat a-t-elle été classée sans suite soit disant pour prescription, alors que la justice a pris connaissance de cette plainte plusieurs mois avant le dixième anniversaire de sa mort ?
Pourquoi il n’y a jamais eu d’obsèques ? Pourquoi a-t-il été enterré comme un chien ? J’ai vue de mes yeux une semaine après sa mort, sa tombe sur laquelle défilait les gens pour lui rendre hommage. J’ai été horrifié par l’odeur et les mouches qui sortaient et entraient de la fine couche de terre qui recouvrait son corps.
Méritait-il vraiment de mourir et d’être ensevelie de cette façon ? Si Blaise se dit non responsable de sa mort (puisqu’il dit qu’il dormait !)pourquoi son “ami et frère” a-t-il été enterré de cette façon ?

Je suis convaincu que l’histoire le réhabilitera et sa mort ne restera pas impuni. Seul le temps nous dira quand, oû et l’heure.
Auteur: SANOU katemawo